Les syndicats se réjouissent: dès l'année prochaine, les salaires devraient enfin augmenter! «Après des années difficiles, nous récoltons les fruits de notre travail», se félicite Daniel Lampart, économiste en chef de l'Union syndicale suisse (USS), à Blick. Même si les négociations sont encore en cours, il a été possible jusqu'à présent de négocier des augmentations de salaire moyennes comprises entre 2,5 et 3%.
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Cet été encore, on prédisait un automne salarial houleux. Le renchérissement massif qui a suivi la pandémie a fait chuter les salaires réels. Selon une évaluation de la société de conseil économique Wellershoff & Partners, ils ont baissé de 3,1% entre début 2021 et mi-2023. Les syndicats ont donc exigé en juillet des augmentations de salaire de 5%. Les employeurs, quant à eux, attendaient environ 2%, comme l'a montré une enquête menée auprès de 4500 entreprises par le Centre de recherches conjoncturelles (KOF) de l'EPFZ.
Les salariés en position de force
En raison de la pénurie de main-d'œuvre, les salariés sont en position de force. C'est ce que montre le résultat provisoire des négociations. «Mais ce n'est pas un buffet à volonté», déclare Simon Wey, économiste en chef de l'Union patronale suisse. Les 5% exigés par l'Union syndicale, considérés comme une compensation pour les négociations salariales passées, restent illusoires.
L'argent pour les augmentations de salaire doit d'abord être gagné, rappelle-t-il. «Actuellement, nous n'en disposons pas assez.» En effet, les entreprises se montrent réticentes à augmenter à tout-va, notamment à cause des mauvaises perspectives économiques. Elles ne veulent pas payer des salaires trop élevés à l'avance.
On a souvent reproché aux entreprises de s'enrichir sous le couvert de l'inflation. Simon Wey dément: «Une grande partie des entreprises sont soumises à une concurrence internationale, il n'est donc pas possible de procéder à des augmentations de prix injustifiées.» Il rappelle que, pour les entreprises aussi, la marge diminue suite au renchérissement, par exemple à cause de la hausse des prix de l'énergie.
Les experts donnent raison aux syndicats
Dans certaines branches, ces conditions ont tout de même suffi à augmenter les salaires. Chez Coop, par exemple, les syndicats ont annoncé la «plus forte augmentation de salaire depuis des années».
«Une partie du chemin est faite», dit Daniel Lampart. Il s'agit toutefois de continuer à rattraper le retard dans les années à venir. Car on ne peut pas parler de succès dans toutes les branches. Les négociations salariales avec la Société Suisse des Entrepreneurs, notamment, ont échoué.
Pour plusieurs experts, l'optimisme de l'USS est légitime, mais devrait rester modéré: selon l'économiste Klaus Wellershoff, les salaires devraient augmenter plus rapidement que l'inflation au cours des deux prochaines années. Mais cela ne sera pas uniquement positif. «Les banques centrales ne vont pas voir cela d'un bon œil.» En effet, la hausse des salaires entraînerait une augmentation de la demande – et une baisse de l'inflation serait difficile à gérer.
Daniel Lampart considère cette conséquence comme négligeable. Même après le cycle de négociations de cette année, les salaires ne dépasseront pas l'inflation de plus de 1%. Il y aurait des soucis plus importants qu'une éventuelle poussée inflationniste: «De nombreux travailleurs gagnent trop peu pour vivre.»