Les sauveteurs en montagne après une semaine de décès dans les Alpes suisses
«De plus en plus de freeriders s'aventurent dans les zones interdites les plus dangereuses»

Le mois de janvier a été dramatique dans les montagnes suisses. Au cours de la dernière semaine, cinq amateurs de sports d'hiver sont morts, dont trois dans des avalanches. Des experts expliquent pourquoi la météo rend la situation particulièrement dangereuse.
Publié: 04.02.2025 à 06:08 heures
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A Parpan (GR), un snowboarder est mort le 29 janvier dans une avalanche au Ochsentobel. Il a skié en dehors des pistes balisées et sécurisées.
Photo: Kantonspolizei Graubünden
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Beat Michel

Le mois de janvier 2025 restera dans les annales comme un mois particulièrement dangereux dans les montagnes suisses. Après un début d’hiver marqué par un cruel manque de neige et une sécheresse persistante, de fortes chutes de neige ont recouvert le relief de 50 à 120 centimètres de neige en peu de temps. Cette succession de conditions météorologiques a créé une situation extrêmement périlleuse. 

Malgré l’alerte de niveau 4 (sur 5) émise par l’Institut pour l’étude de la neige et des avalanches (SLF), trois personnes ont perdu la vie dans des avalanches dans les Grisons en seulement deux jours. Par ailleurs, deux autres skieurs ont été retrouvés inconscients sur les pistes de Zermatt (VS) et Saas-Fee (VS) avant de succomber, dans des circonstances pas encore éclaircies.

Thomas Stucki, responsable du service d’alerte aux avalanches du SLF, explique que le danger vient de la structure même du manteau neigeux: «Jusqu'au 25 janvier, il y avait une hauteur de neige bien inférieure à la moyenne. La fine couche en place s’est métamorphosée, formant de gros cristaux, qui adhèrent mal entre eux. Les importantes chutes de neige de la fin janvier se sont déposées dessus. Cette nouvelle couche s’est solidifiée en surface, mais en dessous, la neige est restée friable, constituant une couche fragile. Lorsqu’un skieur ou une nouvelle accumulation de neige exerce une pression, cela peut déclencher une avalanche en plaque.»

Un terrain miné pour les skieurs

Le chef des secours de Zermatt, Anjan Truffer, décrit également la stratification de la neige comme un grand danger pour les randonneurs à ski: «Les gros cristaux agissent comme des roulements à billes. La situation est très tendue, l'Institut pour l'étude de la neige et des avalanches a publié le deuxième niveau de danger le plus élevé.» Malgré la mise en place de nombreuses restrictions et fermetures de secteurs à risque, de nombreux skieurs ignorent les panneaux d’avertissement.

L'expert en sauvetage en montagne poursuit: «C'est un miracle qu'il n'y ait pas plus d'accidents. Les domaines skiables ont beau mettre en place des blocages très élaborés, de plus en plus de freeriders s'aventurent dans les zones interdites les plus dangereuses. Ils peuvent y déclencher des avalanches qui mettent ensuite en danger les skieurs sur les pistes.» Selon lui, le glacier du petit Cervin est un exemple de cette importante prise de risque. «Ici, nous avons chaque année des accidents avec des skieurs qui tombent dans des crevasses. Et ce malgré les nombreux panneaux d'avertissement et d'interdiction.»

Petites connaissances, grande prise de risque

De même, il voit d'un mauvais œil le nombre croissant de skieurs de randonnée inexpérimentés qui prennent des risques élevés. Anjan Truffer explique: «Ils sont certes souvent parfaitement équipés, mais économisent sur le guide de montagne. Ils se laissent influencer par les réseaux sociaux. Ils essaient d'imiter les influenceurs.»

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Même les professionnels ne sont pas à l'abri d'une avalanche à 100%. Il y a toujours un certain risque résiduel, Mère Nature a ses propres lois
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Le guide de montagne sait toutefois que ses collègues professionnels ne sont pas non plus à l'abri d'un grave accident d'avalanche: «Même les professionnels ne sont pas à l'abri d'une avalanche à 100%. Il y a toujours un certain risque résiduel, Mère Nature a ses propres lois.»

En ce moment, Anjan Truffer travaille dans les montagnes du Canada. «Ici, la situation n'est pas plus simple», révèle-t-il à Blick. Ce sont surtout les bulletins d'avalanches qui lui manquent le plus: «En Suisse, nous sommes gâtés avec le SLF», poursuit-il. «Au Canada, nous devons composer chaque jour notre propre bulletin d'avalanches. Ce service n'existe pas.»

La situation reste délicate

Bien que la situation évolue lentement, elle reste préoccupante. «Il faut encore patienter», prévient Thomas Stucki. «Ce type d’instabilité persiste longtemps. Le danger diminue progressivement, mais des avalanches restent possibles, notamment en Valais, au Tessin et dans les Grisons.»

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