Une vue «à couper le souffle», cinq chambres et cinq salles de bains, un espace spa tout équipé, le tout à deux pas des remontées mécaniques de la région. Pour s’offrir ce chalet d’exception au Mont-Pélerin, il faut débourser la coquette somme de dix millions de francs suisses et s’adresser à l’agence immobilière de luxe Sotheby’s International Realty.
Le site de l’agence regorge d’autres annonces pour des chalets suisses de luxe. Leur prix oscille en moyenne entre cinq et dix millions de francs et la demande pour les acquérir ne cesse d’augmenter.
Des ventes qui ont doublé en un an
Le marché des chalets suisses de luxe est effectivement en plein essor. «Que ce soit sur le lac Léman ou à la montagne, le segment du luxe a connu un boom de la demande», explique Katharina Hofer, experte en immobilier chez UBS. Un engouement qui s’est répercuté sur les chiffres de ventes: «Le nombre de transactions a vraisemblablement doublé en montagne pour l’année en cours par rapport à 2019», estime l’experte.
«La situation actuelle est unique», confirme Florian Steiger, professionnel du secteur et agent immobilier de Steiger & Cie. Ce dernier, qui possède des bureaux à Zermatt VS, Verbier VS et Crans-Montana VS, est, selon ses propres dires, le leader du marché de l’immobilier de luxe en Valais.
Plus demandé que jamais
«Depuis notre fondation il y a 15 ans, nous avons connu plusieurs vagues d’acheteurs, mais jamais aussi importantes que maintenant», affirme le courtier de luxe. Actuellement, il reçoit deux à trois fois plus de demandes qu’au cours d’une bonne année.
Cette année, Florian Steiger a déjà vendu 20 chalets de luxe d’une valeur de cinq millions de francs suisses ou plus chacun. Vingt autres sont en cours de vente: dix à Verbier, cinq à Crans-Montana et cinq à Zermatt.
Une ruée provoquée par le Covid
D’où vient un tel engouement? L’experte d’UBS pense que cela tient principalement à deux facteurs. D’un côté, les acheteurs suisses fortunés augmentent. «Les propriétés de luxe promettent de garder leur valeur sur le long terme, car elles ne sont disponibles qu’en quantité limitée dans des endroits recherchés», explique Katharina Hofer. Selon elle, la demande est particulièrement forte depuis la période incertaine qu’a provoquée la pandémie de Covid-19.
D’un autre côté, l’engouement de propriétaires fortunés venus de l’étranger a également fait augmenter la demande de chalets de luxe suisses. «Pour ces acheteurs, le fait que les mesures sanitaires soient moins drastiques en Suisse est un facteur déterminant», continue Katharina Hofer. Dans l’immobilier de luxe, la demande pour les résidences secondaires mais aussi pour les résidences principales a donc fortement augmenté.
La commune de Gstaad reste la plus chère
Cette demande accrue a également fait grimper les prix: en moyenne, l’année dernière ils ont augmenté d’environ 10% dans les régions de montagne très prisées, selon l’experte d’UBS. Une augmentation beaucoup plus forte que dans le reste du marché du logement d’ailleurs.
La commune de Gstaad, dans l’Oberland bernois, est de loin la commune où les prix sont les plus chers. D’après le consultant immobilier britannique Knight Frank, le mètre carré y coûte 34’700 francs pour un luxueux chalet de quatre pièces. À Verbier, il est près de 30% moins cher avec 23’100 francs le mètre carré. À Zermatt, enfin, ce dernier coûte 20’800 francs.
Le prix au mètre carré en francs suisses dans les stations de ski suisses.
Le prix au mètre carré en francs suisses dans les stations de ski suisses.
Les habitants se retrouvent sur la paille
Les prix de ces chalets suisses de luxe sont comparables à ceux d’autres stations de ski dans le monde. Si ces augmentations profitent au secteur de l’immobilier, elles sont dévastatrices pour les habitants de ces régions. Les aspirants propriétaires n’ont plus les moyens d’acheter, et ceux qui possèdent déjà une maison sont taxés plus durement.
C’est le cas dans le canton de Berne, par exemple, qui a réévalué début 2020 la taxe sur les propriétés. Dans le Saanenland, dont fait partie Gstaad, la réévaluation des propriétés a au contraire créé des millionnaires du jour au lendemain. Pour certaines familles, la réévaluation a fait qu’elles ne pouvaient plus se permettre d’acheter leur propre maison car la charge fiscale devenait trop importante.
(Adaptation par Louise Maksimovic)