Ces jolies petites maisons aux toits de tuiles bordant les douanes remplissent aujourd'hui une toute nouvelle fonction. Là où vivaient autrefois les gardes-frontière suisses, des restaurants, des centres culturels ou des familles y ont désormais emménagé. L'Office fédéral des douanes et de la protection des frontières (OFDG) vend depuis quelques années ses maisons de douane.
Les contrôles systématiques aux frontières ayant été supprimés après l'adhésion de la Suisse à l'accord de Schengen, la Confédération n'a plus besoin de ces biens immobiliers. De plus, la numérisation conduit à des interventions «mobiles et basées sur les risques», explique l'OFDG. Cela signifie que les douaniers ne doivent plus nécessairement se tenir aux postes-frontière.
Ce changement de stratégie représente aussi une opportunité lucrative. En quatre ans, une centaine de biens immobiliers ont passé la rampe. Rien que sur cette période, la Confédération a ainsi encaissé 30 millions de francs, selon l'office fédéral.
Les douaniers partent à l'étranger
Mais cette braderie immobilière ne plait pas à tout le monde. Les communes et les cantons possèdent en fait un droit de préemption (soit la priorité sur un achat) sur ces biens immobiliers. Toutefois, selon l'OFDG, seuls 20% environ ont été vendus aux pouvoirs publics. Environ 80% ont donc été vendus à des acheteurs privés.
Alors que la Confédération vend assidûment d'anciens logements de fonction en plus des sites opérationnels, de plus en plus de douaniers partent à l'étranger. L'OFDG le confirme: actuellement, 150 employés de l'office fédéral sont domiciliés à l'étranger. La plupart vivent en France, mais certains se sont également installés en Italie, au Liechtenstein, en Autriche ou en Allemagne. Les loyers plus attractifs de l'autre côté de la frontière poussent de plus en plus les travailleurs suisses à s'expatrier.
«Des subventions pour les propriétaires immobiliers»
Pour le conseiller national socialiste Emmanuel Amoos, cette situation est inacceptable. «Il est clair qu'il n'y a pas de logique de rentabilité à long terme dans cette nouvelle stratégie.» Il rappelle que dans les régions de Bâle ou de Genève, par exemple, l'immobilier prend considérablement de la valeur année après année.
Ce qui dérange particulièrement Emmanuel Amoos, c'est qu'au lieu de mettre à disposition des logements de fonction existants, la Confédération verse à ses employés à la frontière une allocation pour un logement privé. L'OFDG souligne que l'attribution des logements de service se fait en fonction de leur disponibilité, mais aussi des besoins de l'entreprise. Si les collaborateurs de l'OFDGne trouvent pas ce qui leur convient dans le parc immobilier de la Confédération, ils reçoivent une aide mensuelle pour louer un logement privé. Le conseiller national s'insurge: «Ces allocations sont donc en fin de compte des subventions pour les propriétaires immobiliers privés et coûtent très cher à la Confédération et au personnel.»
Sécurité à la frontière
Emmanuel Amoos soutient donc une intervention du conseiller national UDC Yvan Pahud. Celui-ci demande un arrêt de toutes les ventes immobilières de l'OFDG et ce avant tout pour des raisons de sécurité. «J'ai le brevet fédéral de garde-frontière et je connais donc très bien la situation à la frontière», explique Yvan Pahud. Avec la vente des bâtiments, le travail de l'OFDGsera nettement plus difficile car les agents devraient souvent parcourir de longues distances avec des criminels à la remorque pour se rendre dans des bases ouvertes. Cela n'est pas raisonnable du point de vue de la sécurité et de l'efficacité, a ajouté le Sainte-Crix.
Le conseiller national du Centre Benjamin Roduit soutient également l'intervention. Il estime qu'il est problématique qu'autant de douaniers habitent à l'étranger: «Si quelqu'un habite en France par exemple, il doit contrôler son voisin qui traverse peut-être la frontière tous les jours. Ce n'est pas possible.» Si la Confédération veut des contrôles efficaces à la frontière, elle doit conserver son infrastructure, a-t-il ajouté.