Les chercheurs sont inquiets
Les Freiheitstrychler dérivent dans le complotisme

Une nouvelle vidéo des essayeurs de liberté circule sur Telegram. Le mouvement y reprend également des théories du complot bien connues. Un expert explique pourquoi le groupe a franchi une limite.
Publié: 10.11.2021 à 08:55 heures
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Dernière mise à jour: 10.11.2021 à 08:58 heures
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Depuis l'automne 2020, les Freiheitstrychler se décrivent comme des «Suisses primitifs engagés» qui défendent «leurs droits consitutionnels avec le coeur»
Photo: Thomas Meier
Jana Giger

Un bûcher en forme de seringue avec la mention «Covid-19» qui s'embrase. Une affiche représentant le Palais fédéral qui est détruite par d'immenses mains. Et un ballon avec le symbole du «Great Reset», cette fameuse théorie de la «grande réinitialisation» attribuée au Forum de Davos: sur Telegram, la dernière vidéo des «Freiheitstrychler» pose de nombreuses questions.

Voilà un an, dès l'automne 2020, que ce groupe est sur le devant de la scène en Suisse alémanique. Ses membres se présentent comme des «Suisses primitifs engagés», qui veulent «défendre leurs droits avec le coeur et une main sur la Constitution». Ce sont eux qui ont organisé la plupart des manifestations contre les mesures Covid. Une posture hostile à l'action du Conseil fédéral, mais toujours respectueuse — ils n'ont jamais appelé à participer aux rassemblements interdits. Aujourd'hui, toutefois, ils mettent plus qu'un pied dans le complotisme.

«Un coming-out du complotisme»

Le chercheur en sciences sociales Marko Kovic abonde: «Avec cette vidéo, les Trychler font leur coming-out — ils font clairement partie de la sphère complotiste». Le symbole du «Great Reset» est connu internationalement, c'est une façon de dire que la pandémie est orchestrée et qu'elle est utilisée pour de sombres motifs, rappelle le scientifique à Blick.

Le terme même de «Great Reset» a bien un lien avec le fondateur du World Economic Forum (WEF) de Davos Klaus Schwab. L'Allemand l'a utilisé pour la première fois en mai 2020, dans la foulée de la première vague de Covid. Avec cette notion, le scientifique voulait exprimer le fait que le capitalisme devait devenir plus vert, plus durable et social, surtout dans une économie globalisée.

Or, pour de nombreux sceptiques du Covid, cette citation prouverait qu'une élite a organisé la pandémie afin de faire passer ses plans d'un «nouvel ordre mondial».

«De tels propos rendent impossible tout dialogue»

Le fait qu'un Palais fédéral symbolique soit écrasé par des mains extérieures est clairement un signe de ralliement à ces théories. «On ne peut pas faire plus clair comme lien avec le Great Reset», analyse Mirko Kovic. Quand est-ce que les Trychler ont commencé à adhérer à ces théories? Ce n'est pas clair. «Est-ce qu'ils y croyaient depuis le début ou ont-ils dérivé récemment? Les deux options sont possibles.»

Pour le chercheur en sciences sociales, une ligne rouge est franchie. «C'est dérangeant. Cela va beaucoup plus loin que simplement défendre des droits constitutionnels!» Il est en effet légitime de mettre en question les mesures anti-Covid, selon Mirko Kovic. «Mais les messages contenus dans cette vidéos ne font même pas partie d'un dialogue ou d'un débat politique...»

Radicalisation en vue?

Le consultant ne pense toutefois pas que tous les Trychler adhèrent à ces mouvances. «Néanmoins, on voit que la proximité avec les milieux complotistes n'est jamais loin», analyse-t-il. Le fait que le mot «dictature» soit prononcé dans les différentes manifestations anti-mesures Covid montre que les théories complotistes ne sont jamais loin.

Mirko Kovic est inquiet que les Freiheitstrychler fassent passer de tels messages — ils avaient beaucoup de sympathie dans la population, et certains pourraient soient se sentir trahis, soit se radicaliser. «En quelque sorte, ils pourraient être de superspreaders de théories du complot...»

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