C'est un moment crucial pour Thomas Süssli. Tout comme Viola Amherd, le chef de l'armée a été constamment sous le feu des critiques au cours des dernières semaines et des derniers mois. «Son ou sa successeur(e) au Département de la défense ne mettra pas le chef de l'armée sur la liste des personnes à abattre comme première action», s'accordent à dire les initiés. Il s'agit au début de maintenir la stabilité au sein du DDPS et de l'armée, même si tout ne fonctionne pas de manière optimale».
Il y a eu par exemple la discussion sur un éventuel «manque de liquidités» de l'armée, avec laquelle Thomas Süssli avait mis le Parlement en émoi il y a un an. Le commandant de corps avait alors fait pâle figure et avait même été laissé en plan par Viola Amherd.
Récemment, la Délégation des finances du Parlement a également tiré la sonnette d'alarme. Dans une lettre cinglante adressée à la ministre étaient énumérés pas moins de sept grands projets d'armement et d'informatique pour lesquels avait été constaté des problèmes et des risques massifs. C'est justement sous la houlette de Thomas Süssli que les pannes informatiques se sont enchaînées. Le projet de numérisation le plus important du département est devenu pour lui un gros risque. «On s'est un peu emballé», dit-on au sein de l'armée.
Le choix de l'Argovien en a froissé plus d'un
En 2019, Viola Amherd avait surpris beaucoup de monde en choisissant Thomas Süssli comme nouveau chef de l'armée. La ministre de la Défense avait mis devant les yeux d'officiers vétérans un homme qui n'avait pas un long passé de soldat derrière lui: il n'était militaire de carrière que depuis quatre ans à l'époque. Il avait notamment commandé une compagnie sanitaire et était chef de la cyberdéfense. A l'origine, Thomas Süssli avait appris le métier de laborantin en chimie, puis il avait suivi une formation de programmeur/analyste et d'informaticien de gestion. Il a fait carrière dans le secteur financier avant de rejoindre l'armée.
Mais Viola Amherd avait défendu son poulain bec et ongles: «Il peut mettre en œuvre de grands projets et possède une grande connaissance de la cyberdéfense.» Mais au sein des officiers, la rumeur s'est répandue: «Malgré tous les problèmes survenus, elle n'a jamais eu le courage de s'en débarrasser. Elle aurait dû reconnaître une erreur de casting, mais ça, elle voulait l'éviter à tout prix.»
Thomas Süssli a reconnu au départ ressentir un certain scepticisme de la part de ses collègues de l'armée. Mais avec le temps, le dialogue s'est créé. Effectivement, il a désormais plus de soutien au sein de l'armée. En revanche, sa direction ne reconnait toujours pas son autorité. Selon les personnes interrogées, il a encore du mal à s'imposer. «Et comme les chantiers s'accumulent dans l'armée, il pourrait bien y avoir un changement à la tête à moyen terme.»