C'est une résurrection inattendue: après l'ouverture du tunnel de base du Saint-Gothard en 2016, l'ancienne route de montagne avec sa célèbre petite église de Wassen (UR) était délaissée ou vue comme un itinéraire panoramique pour les fans de chemin de fer et les amoureux de montagne. Désormais, rien ne serait possible sans elle, car depuis le déraillement d'un train de marchandises la semaine dernière, le tunnel est fermé et le trafic ferroviaire est assuré par la ligne de montagne.
Mais celle-ci n'a qu'une valeur de remplacement limitée. En effet, les tunnels n'étant pas assez hauts, il n'est pas possible d'y faire circuler des trains à deux étages ou de hauts wagons de marchandises. «L'ensemble de la ligne de montagne n'est pas adapté aux conteneurs avec une hauteur de quatre mètres», confirment les CFF. Conséquence: moins de places assises pour le trafic voyageurs, restrictions pour le trafic de marchandises.
Pour les Tessinois, ce n'est pas assez. «Passer des mois sans une bonne liaison avec le nord est une catastrophe - pour l'économie et le tourisme tessinois, mais aussi pour toute l'Europe», déclare Fabio Regazzi, conseiller national du centre et président de l'Union suisse des arts et métiers (USAM).
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Faut-il aménager la ligne de montagne?
Au vu de la situation, il affirme donc qu'il trouverait «raisonnable de mettre de l'argent de côté et d'aménager la ligne de montagne». Le transport des personnes et des marchandises est effectivement très dépendant de ces infrastructures, et une situation comme celle d'aujourd'hui pourrait se reproduire dans le futur.
Les CFF admettent qu'ils n'avaient jamais pensé se retrouver un jour dans une situation comme celle-ci. «Ces dernières années, j'ai toujours dit qu'il n'y aurait pas d'interruption totale de ce système, a déclaré mercredi Rudolf Büchi, directeur adjoint de l'infrastructure. Je me suis trompé.»
Pour Fabio Regazzi, «c'est une chance que la ligne de montagne existe encore - et je rappelle que les CFF voulaient en effet la fermer après l'ouverture du tunnel de base».
En effet, en 2016, lorsque le tunnel de base a été mis en service, des demandes ont été faites pour clore la ligne de montagne, ou du moins la réduire à une voie. La raison en était les coûts d'entretien, qui représentent 40 à 50 millions de francs par an. Heureusement, poursuit le conseiller national du centre, la protestation contre cette décision a fait effet à l'époque. «Nous - et surtout les CFF - pouvons s'en réjouir aujourd’hui.»
«D'autres lignes ferroviaires sont plus urgentes»
Mais l'idée de Fabio Regazzi suscite aussi des critiques. Le conseiller national des Verts et membre du comité d'audit et de la Commission des transports Michael Töngi n'y croit guère. «Cela coûterait des centaines de millions si l'on aménageait tous les tunnels de la ligne panoramique.» Selon lui, il y a d'autres lignes ferroviaires suisses qui nécessitent des aménagements plus urgents. Il faudrait plutôt réaliser enfin les projets ferroviaires sur le Plateau qui ont pris du retard depuis longtemps.
«Si la ligne panoramique était élargie maintenant, ce serait mettre une priorité au mauvais endroit. Après tout, le trafic vers le Tessin peut encore être maintenu pour le moment, poursuit Michael Töngi. Des liaisons à d'autres endroits en Suisse devraient compter sur des liaisons par bus pendant des mois si un tel accident survenait là-bas.»