Le conseiller national UDC Yvan Pahud veut agir
«Les Roumains et les Marocains se partagent ces attaques de bancomats, c'est très clair»

Depuis mai, au moins neuf bancomats ont été attaqués en Romandie par des malfrats usant d'explosifs. Le conseiller national UDC Yvan Pahud appelle à renforcer la présence aux frontières, déplorant les lacunes actuelles en matière de sécurité. Interview.
Publié: 31.07.2024 à 18:01 heures
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Dernière mise à jour: 01.08.2024 à 16:56 heures
Un distributeur de billets attaqué à l'explosif à l'aube, le 30 juillet, près d'Yverdon.
Photo: Police cantonale vaudoise
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Lucie FehlbaumJournaliste Blick

Depuis le mois de mai, au moins 9 bancomats ont été attaqués en Romandie. Le mode opératoire est toujours le même: vers 4h du matin, des malfrats munis d'explosifs endommagent un distributeur de billets proche de la frontière française, puis prennent la fuite.

Le canton de Vaud a été touché trois fois par ces attaques rien qu'au mois de juillet. La dernière action, le 30 juillet à Montagny-près-Yverdon (VD), n'a servi à rien puisque les voleurs sont repartis les mains vides.

Mais Yvan Pahud en a ras-le-bol. Le conseiller national de l'Union démocratique du centre (UDC) réside à Sainte-Croix où il est vice-syndic. Une machine à billets y a été explosée le 22 juillet. L'élu a également été garde-frontière, un métier qui se nomme aujourd'hui «spécialiste en douane et sécurité des frontières».

Le 13 juin dernier, Yvan Pahud a déposé une motion demandant à l'Office fédéral de la douane et de la sécurité des frontières (OFDF) de revoir ses effectifs. Il demande notamment le retour des patrouilles mobiles présentes 24h/24 sur le terrain, alors qu'elles sont aujourd'hui mobilisées la journée uniquement, et certaines nuits. L'élu UDC nous explique ses motivations. Interview.

Yvan Pahud, quand vous étiez garde-frontière, êtes-vous tombé sur des braqueurs?
Non, mais ces bandes criminelles sont très bien organisées et c’est toujours la hantise des employés de l’OFDF de tomber sur ce genre d’individus. Comme ils n’ont pas encore été arrêtées, on ne sait pas si les malfrats sont armés. Ils roulent très vite, et peuvent ne pas
s’arrêter et foncer sur les forces de l’ordre si celles-ci se mettent en travers de leur route.

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Que font les douaniers s'ils voient ces braqueurs? Ils tentent de leur tirer dessus?
Le problème, c'est qu'il n'y a plus personne la nuit, et ce n'est pas le rôle de la gendarmerie de faire de la surveillance. Mais admettons qu'une équipe est alertée. Comme les douaniers ne savent pas à qui ils ont affaire, ceux-ci se préparent au pire et s'équipent de gilets pare-balles capables de retenir des calibres de style kalachnikov. Les douaniers essaient d'empêcher ces malfrats de repartir, mais sans trop s'exposer, car ils ne savent jamais comment ils sont armés.

Le conseiller national vaudois, membre de l'Union démocratique du centre, Yvan Pahud.
Photo: KEYSTONE

Pourquoi toutes ces attaques ont lieu vers 4h du matin, y a-t-il une raison?
Force est de constater que c’est l'heure du changement d’équipe de la gendarmerie. L’équipe de nuit rentre au poste, et échange des informations avec celle qui arrive peu avant 4h. Entre 3h45 et 4h15 il n’y a donc quasi aucune patrouille de gendarmerie en activité. Déjà qu’il n’y a pas beaucoup de chance de tomber sur une patrouille de gardes-frontières…. Les voleurs ont entre 5 et 15 minutes, selon les lieux, pour agir et fuir.

Récemment, les attaques ont eu lieu dans les cantons de Vaud, Neuchâtel, Jura… Genève n'intéresse pas les braqueurs, malgré ses 110km de frontière avec la France?
Cela dépend vraiment de l'organisation des régions. A Genève et Bâle, il y a des douaniers 24h/24. Si vous prenez le Tessin avec l’afflux massif de réfugiés, il y a une présence continue et beaucoup d'équipes dans le terrain, du côté suisse comme du côté italien. Les voleurs ne s'y risquent pas. Mais entre Vaud, Jura, Neuchâtel, jusqu'à la région bâloise, il n'y a hélas plus d'équipe de nuit...

Vous parlez dans votre motion de contrôles des points de passages par des moyens électroniques, à quoi faites-vous référence?
Aux caméras. Il y en a déjà, d'ailleurs. Elles sont très utiles. Mais il faut bien quelqu’un sur le terrain pour intervenir. Les malfrats font du repérage en journée. Si vous tombez sur une voiture avec des profils correspondant au rapport de l'Office fédéral de la police, soit des Roumains ou des Marocains qui passent la frontière à L’Auberson (VD) en pleine journée, ça donne une piste si un bancomat pète quelques heures ou quelques jours plus tard.

N'est-ce pas la définition du contrôle au faciès?
Selon les statistiques de la police fédérale, les deux groupes qui se partagent ces attaques de bancomats sont les Roumains et les Marocains. C'est très clair. Alors, oui, ils peuvent passer la frontière pour aller chez des cousins ou acheter des cigarettes, mais si les
caméras fonctionnaient, on pourrait faire des recoupements. Force est de constater que la collaboration au niveau européen est très lente pour arrêter ces bandits.

Combien coûteraient des patrouilles mobiles disponibles 24h/24?
Supprimer ces patrouilles est une mesure d'économie de la Confédération. On donne des dizaines de millions pour sécuriser les frontières Schengen à l'étranger, alors qu'on a enlevé ce budget pour protéger les frontières suisses. Par ailleurs, c'est une perte de service pour la population. À Sainte-Croix, le bancomat Raiffeisen qui a été détruit ne sera peut-être pas remplacé. Il faut soit tirer de l'argent aux distributeurs d'autres banques, et c'est plus cher, soit se déplacer.

Mais comment retrouver ce budget? En ponctionnant celui alloué à l'armée, comme le suggérait le conseiller national vert Fabien Fivaz dans les colonnes de «24 heures»?
Les soldats qui font l'école de recrue en service long, à la police militaire par exemple, pourraient venir en appui chez les gardes-frontières, temporairement. Ils pourraient faire de la surveillance, pas forcément de l'engagement. Mais ces effectifs et ce budget, la douane les avaient par le passé. Il s'agirait plutôt de mettre les moyens pour la sécurité des suisses, avant de le distribuer à l’étranger.

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