Monsieur David Henny, le nouvel horaire vient d'être instauré. Vous devez vous sentir comme un cuisinier après avoir servi la soupe. Nerveux?
Au contraire. Nous avons mis beaucoup d'énergie dans cet horaire. Je suis convaincu que tout va fonctionner!
Qu'est-ce qui pourrait malgré tout aller de travers?
Les dernières années ont montré qu'un peaufinage est parfois inévitable. Au niveau de l'engagement du personnel ou de la longueur des compositions par exemple. L'objectif est qu'il y ait suffisamment de places assises pour tous les clients, même après le changement d'horaire.
Il y a toujours quelqu'un qui monte aux barricades lorsque quelque chose change. Dans quelle mesure pouvez-vous modifier à nouveau les horaires?
La question est clairement réglée. Les clients peuvent s'exprimer auprès des cantons après la publication du projet d'horaire. Ces réactions nous permettent d'évaluer l'ambiance dans le pays et de savoir où nous devons éventuellement apporter des améliorations.
L'être humain est une créature d'habitude. Si un train part une minute avant, notre routine est perturbée. Pourquoi nous faire subir cela?
Pour que nous puissions mettre plus de trains sur les rails. La population augmente, de plus en plus de gens choisissent le train, nous avons donc besoin de plus de places assises. De plus, les besoins des voyageurs évoluent. Nous développons donc aussi des offres, testons par exemple de nouvelles liaisons de nuit en trafic grandes lignes. Enfin, les chantiers d'entretien et d'extension entraînent également des adaptations au niveau des minutes.
A quel point pouvons-nous encore densifier le trafic?
Aujourd'hui, 45% de trains circulent en plus par rapport à 1990. Pourtant, l'infrastructure n'a augmenté que de 5%. Nous avons donc incontestablement besoin d'agir pour créer davantage de capacités. Au cours des dix dernières années, le Parlement a accordé 20 milliards de francs pour l'extension du réseau ferroviaire. Bien entendu, il faudra encore quelques années pour que tout soit réalisé. Il y a déjà des goulets d'étranglement sur certaines lignes, où nous essayons de faire circuler des trains plus longs avec plus de places.
Penchons-nous sur les chiffres. Où y a-t-il le plus et le moins de trains?
La gare centrale de Zurich est en tête avec plus de 1600 départs par jour. Au Col-des-Roches, vers le Locle dans le canton de Neuchâtel, 12 trains partent chaque jour.
Quels sont les plus grands changements du nouvel horaire?
En Suisse romande, c'est le plus grand changement d'horaire depuis l'introduction de Rail 2000 en décembre 2004. Un train supplémentaire circule dans chaque sens sur la ligne Zurich-Munich. Et entre Saint-Gall et Sargans, il y a désormais une cadence à la demi-heure en trafic grandes lignes. Je suis impatient de voir notre projet pilote avec de nouvelles liaisons nocturnes. Sur huit week-ends, des trains de nuit circuleront sur la ligne Berne-Olten-Zurich Aéroport et plusieurs week-ends entre Fribourg/Sion/Bienne et Genève Aéroport.
Vous venez d'évoquer l'extension. Y a-t-il des suppressions prévues?
Il n'y a pas de suppression. Ces dernières années, nous n'avons fait qu'agrandir. Néanmoins, toute adaptation fait des gagnants et des perdants. Mais nous espérons qu'il y aura plus de gagnants que de perdants.
Combien d'heures avez-vous investies dans le nouvel horaire?
Notre équipe se compose de 50 personnes qui, ensemble, consacrent chaque année environ 100'000 heures de travail à la planification de l'offre à court, moyen et long terme. En contrepartie, les voyageurs circulent 300 millions d'heures par an avec les CFF. Notre temps est donc bien investi.
Maintenant que l'œuvre est achevée, êtes-vous devenu un indicateur d'horaire infaillible?
(Rires) J'aimerais bien. Malgré tous mes efforts, je ne me souviens pas de toutes les heures de départ des quelque 8000 trains CFF qui circulent chaque jour. Consultez donc l'application CFF pour être sûr d'attraper votre prochain train.
Une question test simple: à quelle heure le train IC5 part-il de Saint-Gall pour Zurich?
(Réfléchit longuement) À chaque heure, aux minutes 28 et 58.
C'est vrai. Et le Regio de Landquart à Davos?
Là, je dois malheureusement passer mon tour. Un train des Chemins de fer rhétiques...
17 et 47. Changeons de sujet. Cinq liaisons directes circulent toutes les heures entre Fribourg et Berne. De Bâle à Berne, l'offre est beaucoup plus restreinte. Pourquoi?
Parmi ces cinq liaisons, il y a deux RER et un RegioExpress. Ce n'est pas comparable à Bâle-Berne, où il y a beaucoup plus de kilomètres entre les deux.
N'est-ce pas aussi lié au fait que votre patron, Vincent Ducrot, fait la navette en train entre Fribourg et Berne pour aller travailler?
C'était déjà le cas auparavant, bien avant qu'il ne devienne CEO.
Désormais, un IC reliant Berne à Zurich s'arrêtera à la gare du Wankdorf, précisément là où se trouve votre siège social. Un cadeau de Noël pour le personnel?
Nous avons fait ce choix pour désengorger les trains au départ de Zurich le matin à 7h32 et le soir à 17h31 au départ de Berne. Pour que tout le monde ait une place assise. Cela profite à tous les clients de l'est de la ville de Berne, également à Ostermundigen ou Zollikofen, et pas seulement à nous – à la gare du Wankdorf. En outre, cela permettra de désengorger la gare de Berne. Nous comptons sur 200 personnes qui monteront et descendront chaque jour sur cette liaison.
La semaine dernière, le Conseil national s'est prononcé en faveur de nouveaux trains de nuit vers l'Europe. Avez-vous encore de la place pour ces liaisons dans votre horaire?
Le défi n'est pas seulement l'infrastructure, mais aussi le manque de matériel roulant. A cela s'ajoutent de nombreux chantiers à l'étranger, qui se déroulent principalement la nuit et qui ont des répercussions considérables sur le trafic nocturne.
A propos de nos voisins, cela vous irrite-t-il lorsque des trains en retard en provenance de l'étranger font bégayer vos rouages parfaits?
Ces retards nous ont fait du mal et nous avons dû couper certaines liaisons directes depuis l'Allemagne à l'été 2022. Mais nous n'avions pas d'autre choix. La situation était désastreuse.