Le CEO d'Opel
«A partir de 2028, nous ne vendrons plus que des véhicules 100% électriques en Europe»

Dans un entretien accordé à Blick, le CEO Florian Huettl explique comment il compte faire basculer son catalogue de véhicules vers le tout électrique... d'ici 2028.
Publié: 23.07.2023 à 06:09 heures
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Dernière mise à jour: 23.07.2023 à 10:31 heures
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Blick a rencontré le CEO d'Opel dans le cadre de la réunion annuelle des concessionnaires suisses à Martigny, pour une interview consacrée aux véhicules électriques.
Photo: Silvio Gallo
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Andreas Faust

A peine a-t-il mis un pied dans l'entreprise, que le voilà désormais chef. En mars 2022, Florian Huettl a commencé à travailler pour le groupe automobile Stellantis-Opel en tant que membre du conseil d'administration. Trois mois plus tard, il sera promu CEO d'une des filiales du groupe à Rüsselsheimm, en Allemagne.

Après un an d'activité, nous l'avons rencontré lors de la réunion annuelle des concessionnaires suisses à Martigny (VS).

Monsieur Huettl, qu'est-ce qui a changé chez Opel depuis 2017?
Depuis que nous sommes passés entre les mains des groupes PSA, puis Stellantis, nous nous sommes réorganisés. Nous sommes à nouveau rentables depuis 2018, nous avons ouvert de nouveaux marchés comme le Maroc et nous avons pris le virage de l'électrique.

Aujourd'hui, la gamme de véhicules utilitaires est entièrement électrique et nous proposerons 15 modèles électriques d'ici la fin de l'année. D'ici 2024, nous aurons un modèle électrique rechargeable dans chaque gamme de véhicules. Puis à partir de 2025, chaque nouveau modèle ne sera plus proposé qu'en version électrique rechargeable. A partir de 2028, nous ne vendrons plus que des véhicules 100% électriques en Europe.

Quels modèles Opel seront purement électriques?
Tous les modèles de notre offre. Nous avons arrêté l'Insignia parce qu'elle reposait encore sur une ancienne motorisation. Nous ressentions également une baisse de la demande des clients. C'est pourquoi nous travaillons désormais sur une nouvelle génération, 100% électrique. Et l'année prochaine, la production d'une nouvelle version du SUV électrique Grandland débutera à Eisenach, en Allemagne.

Et pour les plus petites voitures? C'est là qu'il y a le plus grand retard en matière de véhicules électriques...
Pas chez Opel. Nous avons du succès avec le SUV électrique Mokka et la Corsa. Le défi des petits modèles électriques, c'est surtout de les rendre abordables. Nous venons de lancer en Suisse le Rocks Electric, un véhicule électrique urbain pour les jeunes. Il est disponible à l'achat pour 9190 francs ou en leasing pour 99 francs par mois.

Autrefois, Opel proposait deux modèles sous la Corsa, l'Adam et la Karl.
Aujourd'hui, nous n'avons pas de projets dans ce sens. Nous considérons que la Corsa est désormais la bonne et seule offre.

La sortie prochaine de la Volkswagen ID.2 n'y changerait rien?
Nous travaillons sur une offre électrique abordable dans les segments jusqu'à 4,10 mètres de long, qui nous permettrait de toucher de larges groupes de clients. C'est notre priorité.

D'un point de vue technique, vous êtes liés aux stanfards du groupe Stellantis. Comment apportez-vous l'identité d'Opel dans vos modèles?
Prenons l'Astra, qui sera lancée en 2022: le développement, le design et la production sont réalisés à Rüsselsheim. Elle a des caractéristiques claires qui sont importantes pour nos clients.

L'intérieur correspond à notre philosophie épurée, avec des lignes élégantes, un large écran, peu de boutons et une interaction équilibrée entre l'écran tactile et les manettes. Les sièges, les systèmes d'éclairage et l'expérience de conduite sont des exigences que nous avons formulées à nos ingénieurs parce que nous savons qu'elles sont importantes pour nos clients. Et dans ce design, on retrouve de nombreux détails de l'histoire de la marque, sans que cela soit forcément rétro.

Pas de design rétro, cela veut dire que nous aurons une nouvelle version de l'Opel Manta?
La future Manta ne doit pas être une copie revisitée des deux premières générations. Nous ne faisons que nous inspirer du passé. Ce que la marque proposait autrefois sur le plan émotionnel, nous l'emmenons avec nous vers demain. Dans l'habitacle, nous irons beaucoup plus loin qu'aujourd'hui avec la future Manta, mais en simplifiant et en nous concentrant sur l'essentiel. Une fois que l'on commence à remettre en question ce qui existe aujourd'hui, on s'engage dans un voyage très intéressant.

Quelles sont les compétences qu'Opel apporte à Stellantis?
Un exemple: en Allemagne, nous avons une longue expérience dans la pile à hydrogène. Notre site de Rüsselsheim est actuellement précurseur dans cette technologie et la met à la disposition de toutes les marques du groupe. Ou encore: les systèmes d'assistance à la conduite sont testés dans notre centre d'essai de Dudenhofen. Chaque marque apporte sa contribution au réseau de développement global et développe ses propres avancées technologiques.

En Europe, le marché des voitures électriques montre parfois des signes de ralentissement. Cela vous préoccupe-t-il?
Je pense que l'électrique est une bonne chose – et c'est la ligne politique officielle de l'Union européenne, décidée par ceux qui représentent peuple.

Les pays qui sont très avancés en matière d'infrastructure de recharge sont aussi en train de passer rapidement à l'électromobilité – comme l'Allemagne, les Pays-Bas ou le Portugal. Quant à la Suisse, elle présente l'une des parts les plus élevées du marché des voitures neuves, avec près de 19% pour les voitures de tourisme.

L'électromobilité évolue très rapidement.

Malgré une plus grande autonomie, le scepticisme vis-à-vis de l'électrique persiste. Comment comptez-vous convaincre les clients?
Nous misons sur une évolution constante de la technologie, mais en conservant ce que nos clients apprécient dans la marque.

La Corsa existe depuis 40 ans, et depuis quatre ans en version purement électrique. La version électrique a tout ce que les clients apprécient dans la Corsa. Celui qui teste la version électrique lors d'un essai sur route pourrait certes aussi acheter la version thermique, mais le pas vers le modèle électrique est tout aussi simple, car il ne nécessite aucun compromis.

L'électromobilité n'est pas un monde parallèle, mais fait partie intégrante d'Opel. Et une fois que l'on achète une voiture électrique, on s'y tient et on ne revient plus aux voitures à combustion.

Où en est Opel en matière de neutralité carbone et de durabilité?
D'ici 2038, Stellantis veut être complètement neutre en termes de CO₂. Tout est passé au crible pour cela. À Rüsselsheim, nous travaillons actuellement à une production neutre en carbone, par exemple en utilisant la géothermie. Il y a deux ans, nous comptions à 100 % sur les transports routiers pour acheminer nos véhicules chez les concessionnaires. Aujourd'hui nous utilisons davantage de trains.

Ce ne sera pas donné...
Il est plus facile de faire des investissements si l'on peut exploiter les économies d'échelle au sein du groupe. Et le fait que Stellantis ait récemment affiché l'un des rendements les plus élevés de la branche automobile – avec 13% – ça aide.

Combien Opel investit-elle?
Opel est durablement rentable depuis 2018 et apporte une contribution significative au résultat du groupe.

Son directeur général, Carlos Tavares, a identifié de potentielles économies à faire dans la vente et la distribution. Qu'est-ce que cela signifie pour Opel et son réseau de concessionnaires?
Stellantis opère à l'échelle mondiale et gère 14 marques. La culture des coûts est profondément ancrée dans cette organisation, car elle est fondamentale pour la transformation de l'industrie automobile. Cela concerne tous les domaines. La vente bien sûr, mais aussi le développement et la logistique par exemple.

Une voiture ne s'améliore-t-elle pas souvent de manière décisive grâce à un petit investissement supplémentaire?
Chez Opel, nous devons investir notre budget de développement de manière à ce qu'il apporte un vrai plus au client.

Les problèmes d'approvisionnement de ces dernières années se sont-ils atténués?
Nous avons eu des défis, par exemple en ce qui concerne la disponibilité des semi-conducteurs et les chaînes d'approvisionnement, mais aussi les capacités logistiques pour faire parvenir les voitures aux clients.

Mais nous avons travaillé notre résilience. Normalement, nous planifions la production sur plusieurs semaines afin que les fournisseurs puissent s'organiser. Mais si le jeudi, on ne sait pas si l'équipe du matin aura les pièces nécessaires d'ici le lundi, on se réorganise en urgence. Par exemple avec des horaires de travail flexibles, de sorte que le lundi matin puisse être supprimé et rattrapé le vendredi après-midi. Maintenant, nous sommes beaucoup plus agiles qu'avant.

Produirez-vous à l'avenir de manière plus locale, avec des fournisseurs plus proches?
Prenez la production de batteries: jusqu'à présent, nous les faisions venir d'Asie. Aujourd'hui nous disposons de nos propres centres de productions en Europe, dans le cadre du regroupement avec Stellantis. L'un d'entre eux se trouve sur le site d'Opel à Kaiserslautern. À l'avenir, la distance de transport vers Rüsselsheim ne sera plus que de 60 kilomètres.

Même si la fabrication en Europe est plus chère qu'en Asie du Sud-Est?
Fabriquer ici est un élément indispensable pour les chaînes d'approvisionnement de demain. Nous devons nous assurer que cela fonctionne en termes de coûts. Et des coûts de transport réduits constituent bien sûr un avantage.

Pendant longtemps, la motorisation 100% électrique n'a été considérée que comme une étape intermédiaire vers l'hydrogène. Comment voyez-vous l'avenir de ce dernier?
L'hydrogène est intéressant pour les longues distances, pour les véhicules lourds et pour le transport commercial, où les temps de chargement ou de ravitaillement doivent être courts. L'hydrogène permet également de réduire considérablement la taille de la batterie.

C'est pourquoi il a surtout sa place dans les véhicules utilitaires comme notre Vivaro-e Hydrogen. Avec 4,4 kilogrammes d'hydrogène, il peut parcourir 400 kilomètres et faire le plein en trois minutes. Pour l'hydrogène, nous nous concentrons entièrement sur ce segment des utilitaires.

La nouvelle norme antipollution Euro 7 arrivera probablement en 2024 dans l'UE. Que signifie-t-elle pour Opel?
Nous ne pensons pas que cette norme soit judicieuse. L'industrie automobile est déjà en train d'opérer une transition vers une mobilité à zéro émission. Investir en parallèle dans des moteurs à combustion pour qu'ils fonctionnent encore deux, trois ou quatre ans demande beaucoup d'efforts et est difficilement réalisable en termes de temps.

Les investissements nécessaires devraient plutôt être consacrés à l'électromobilité.

Et si Euro 7 voit quand même le jour?
Nous mettrons alors chaque moteur au banc d'essai et ferons les investissements nécessaires pour respecter les normes. Et là, ce sont justement les petits moteurs – ceux des véhicules de catégorie B et C – qui soit seront plus chers, soit ne satisferont pas la nouvelle norme.

Quelle est l'importance de la Suisse pour Opel?
La Suisse est un marché très important pour nous. Nous y avons même produit autrefois. De nombreux concessionnaires nous sont fidèles depuis des générations. Bien sûr, nous ne sommes pas satisfaits de notre part de marché, qui est aujourd'hui de 2%. Mais il y a de nombreux signes positifs: nous sommes par exemple leader du marché des véhicules utilitaires électriques pour l'année en cours.

L'électromobilité peut nous donner nettement plus de poids en Suisse.

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