Il y a moins d’un mois, le président américain brandissait triomphalement une liste de nouveaux droits de douane devant les caméras, infligeant à la Suisse une taxe de 31%. Peu de pays ont été aussi durement touchés. Puis, changement de cap: Donald Trump a finalement suspendu ces droits de douane pour une durée de 90 jours. Et voilà que la Suisse semble de nouveau compter parmi les pays favoris de Trump, puisqu'elle figure parmi les 15 Etats avec lesquels les Etats-Unis souhaitent conclure en priorité un accord douanier.
La politique de Trump suit une logique de «stop and go» et certains y voient une tactique de négociation. Quoi qu’il en soit, les milieux diplomatiques assurent que la taxe de 31% n'était pas spécifiquement dirigée contre la Suisse. En réalité, les droits de douane visaient la moitié du monde sur la base d’un calcul jugé absurde. L'objectif était avant tout de maximiser la pression, une phase qui semble désormais révolue.
«La liste douanière de Trump appartient au passé»
Un nouveau chapitre s’ouvre dans le dossier des droits de douane, confirme également Edward McMullen, ancien ambassadeur américain en Suisse. Il explique à Blick: «La liste douanière de Trump appartient au passé, désormais, on est en phase de négociation.» Ce sont les faits et les données qui vont primer. Le Conseil fédéral et ses représentants doivent présenter leurs arguments de manière convaincante à Washington. «Dès le début, la Suisse a négocié avec intelligence, sans confrontation», souligne-t-il.
De fait, l’offensive diplomatique suisse commence à porter ses fruits, du moins pour l’instant. Cette semaine, plusieurs hauts responsables se sont rendus à Washington: un envoyé spécial, trois secrétaires d'Etat, la présidente de la Confédération Karin Keller-Sutter et le ministre de l'Economie Guy Parmelin. Dans leurs valises, ils ont emporté une proposition de déclaration d'intention. Les Américains se sont montrés ouverts à définir des champs thématiques en vue des négociations futures. Certes, aucun calendrier concret n’a encore été fixé, mais la Suisse a obtenu l’assurance que les droits de douane punitifs resteraient suspendus tant que les discussions sont en cours, même si elles devaient dépasser la période initiale de 90 jours.
Un peu de français pour briser la glace
On ignore encore quels thèmes précis figureront dans la déclaration d'intention. Le Conseil fédéral statuera une fois que l’administration aura élaboré des propositions concrètes. Selon les personnes impliquées, l'administration Trump a clairement exprimé sa volonté de réindustrialiser les Etats-Unis. Il est donc certain que des propositions visant à accroître les investissements en Amérique feront partie des discussions. Un deuxième objectif central de l'administration est de renforcer la coopération en matière de formation professionnelle et la Suisse est considérée comme un modèle à l’échelle mondiale. Les Américains sont conscients qu’aucune relance industrielle n’est possible sans une main-d’œuvre hautement qualifiée.
À Berne, on a le sentiment que Washington comprend à nouveau les positions suisses. Guy Parmelin a qualifié les entretiens de «très constructifs», tandis que Karin Keller-Sutter a salué une atmosphère «très amicale». La rencontre entre Guy Parmelin et le représentant américain au commerce, Jamieson Greer, illustre cette proximité: Jamieson Greer, qui a vécu plusieurs années en Europe, a pu échanger en français avec Guy Parmelin, jusqu’à ce que ce dernier, en plaisantant, propose de poursuivre en anglais pour que l’ensemble des participants puisse suivre la conversation. Une manière de briser la glace.
La ministre américaine de l'Education, Linda McMahon, semble également avoir manifesté un intérêt pour la Suisse. Elle aurait confié à la délégation suisse qu’elle était originaire de New Bern, une ville américaine portant le nom d'une commune suisse, et qu’elle ressentait ainsi un «lien particulier» avec la Suisse. Reste à savoir si Donald Trump écoutera ses conseillers favorables à un rapprochement avec la Confédération.