La Police Nord Vaudois (PNV) est contrainte de s'adapter pour faire face à l'explosion du deal de rue à Yverdon. Elle doit notamment concentrer son activité sur le secteur de la gare, où la présence policière, en heures, a bondi de 72% entre août et septembre.
Pour y parvenir, son commandant Marc Dumartheray explique que la PNV a dû «réorienter ses efforts» en étant moins présente dans d'autres quartiers. Certains plannings ont aussi dû être revus. Le Groupe d'appui tactique, dédié normalement à plusieurs tâches, se concentre désormais uniquement sur le trafic de rue. Par ailleurs, des patrouilles à la gare sont régulièrement assurées par Police-secours qui, elle aussi, a dû se détourner d'autres missions.
«Ce sont des mesures prises dans l'urgence. Il faudra désormais trouver des solutions à long terme», reconnaît Marc Dumartheray, qui a été contacté par Keystone-ATS. Il explique que l'objectif consiste, dans un premier temps, à «déstabiliser» le deal de rue avec une présence policière accrue sur les sites sensibles, particulièrement à la gare et sur la place d'Armes.
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Fermetures d'espaces publics
Sur la place d'Armes justement, la Municipalité yverdonnoise vient d'ordonner la fermeture de la Kipole, la structure dédiée aux marginaux et devenue ingérable avec l'explosion du trafic. Un peu plus loin, la place de jeux est désormais interdite d'accès durant la nuit, là aussi pour éviter les rassemblements et les incivilités liés au deal.
Pour Marc Dumartheray, «il est encore trop tôt pour évaluer l'efficacité de ces mesures.» Il reconnaît qu'un «report» est possible, notamment vers Zone bleue, le centre d'accueil des toxicomanes. «Nous sommes en étroite communication avec eux» pour savoir comment la situation évolue sur place», indique-t-il.
Le commandant de PNV relève que s'il y a bien un événement qui a produit rapidement un effet, c'est le reportage d'une équipe de la RTS pour l'émission «Mise au Point». Le temps d'une journée, «les caméras ont fait fuir les dealers», raconte-t-il, s'amusant sur le fait qu'il faudrait «faire venir plus souvent la RTS» à Yverdon.
Réprimer ne suffit pas
Selon Marc Dumartheray, «il n'y a pas de solution miracle» pour endiguer le deal de rue qui, depuis cet été, a explosé avec une forte hausse de la consommation de crack. Il juge toutefois que «le système actuel a atteint ses limites» et que, au niveau de la police, «la répression seule ne suffit pas.»
Une répression qui, à ses yeux, démontre «l'échec d'un processus». Il milite ainsi pour une meilleure coordination «entre tous les acteurs des quatre piliers» en matière de drogue, à savoir la prévention, la thérapie, la réduction des risques et la répression. «Nous devons travailler avec plusieurs services de la Ville, par exemple le Jecos à Yverdon (Service de la jeunesse et de la cohésion sociale), pour aboutir à de vrais résultats», estime-t-il.
Vision large
A ce titre, il dit «saluer» la démarche des Municipalités d'Yverdon, mais aussi de Lausanne et Vevey, qui ont écrit la semaine dernière au Conseil d'Etat vaudois pour demander la tenue d'assises de la chaîne pénale et de la santé publique. «Cela sera l'occasion d'avoir une vision plus large de la situation», espère-t-il.
En attendant et malgré des conditions de travail difficiles, Marc Dumartheray souligne que l'ambiance est «franchement bonne» au sein de ses troupes. «Nous sommes habitués à devoir nous adapter et à faire preuve de résilience», remarque-t-il. Et d'ajouter qu'en tant que chef, son rôle consiste particulièrement à «donner du sens» à ces missions de lutte contre le deal de rue.