La pauvreté frappe à la porte de la classe moyenne suisse. Pour plus de la moitié des familles, le revenu suffit à peine, voire pas du tout, pour vivre dignement. Et les conséquences sont tristes: même les familles qui travaillent et qui disposent d'un revenu décent renoncent de plus en plus aux vacances, aux repas à l'extérieur et, par la force des choses, à avoir d'autres enfants. C'est ce que montre la dernière enquête de Pro Familia.
Témoignages de familles en difficultés
Les témoignages récoltés par Blick donnent un aperçu encore plus inquiétant que les statistiques brutes. Comme la famille Roth: Sabine travaille à 80% comme laborantine, son mari Mark à 90% comme électrotechnicien. Ensemble, ils gagnent 11'000 francs par mois. Ils ont deux enfants et vivent modestement. Et pourtant, il ne leur reste presque rien à la fin du mois... avec 11'000 francs de revenu!
Qu'attendent les politiques pour tirer la sonnette d'alarme? Si des citoyens, qui travaillent et sont bien formés, ne peuvent vivre pas dignement avec leur salaire, c'est que quelque chose cloche dans notre riche pays. Familles de la classe moyenne, que faut-il attendre des partis?
UDC: les conseillers égratignent le tabou de la crèche
En faisant de la migration son bouc émissaire généralisé – criminalité, coûts, crise climatique – le parti espère gagner les élections. Mais cela ne suffit plus pour empêcher ses propres électeurs de soutenir des initiatives socialistes (55% de la base de l'UDC a dit «oui» à la 13e rente AVS). Les jeunes familles sont de toute manière accablées par les frais de crèche et de caisse maladie, qu'elles votent UDC ou PS.
Les premiers politiciens de l'UDC l'ont reconnu. «En matière de politique familiale, nous devons nous adapter à notre époque, sinon les jeunes électeurs ne nous prendront plus au sérieux», a déclaré le conseiller national Benjamin Giezendanner (41 ans, 3 filles) dans une interview au «Tages-Anzeiger».
Les nouvelles approches pour les crèches et autres formes d'accueil extra-familial ne sont pas encore susceptibles de réunir une majorité au sein de l'UDC. Si le parti souhaite proposer quelque chose aux familles de la classe moyenne, il doit d'abord dépasser son ombre idéologique.
PLR: chercher une solution avec l'économie
Aucun parti ne se positionne avec autant de véhémence que les libéraux-radicaux. Après la défaite de la votation sur l'AVS, le président Thierry Burkart a clairement indiqué qu'il n'accepterait pas que la 13e rente soit financée par des déductions salariales ou des impôts. Cela représenterait une charge supplémentaire pour la classe moyenne.
Le financement de l'AVS par des prélèvements sur les salaires coûterait en moyenne 600 francs de plus par an à une famille. La prochaine étape pour le PLR est de monter en première ligne pour mettre à terre l'initiative du PS sur l'allègement des primes et, dans la foulée, l'initiative du Centre sur le frein aux coûts.
Mais si le parti fondateur de la Suisse moderne ne veut pas être perçu uniquement comme un parti pour les riches et l'économie, il doit proposer aux familles quelque chose de concret qu'elles puissent ressentir dans leur porte-monnaie. Bien sûr, personne n'attend du PLR qu'il veuille soudainement ponctionner l'Etat pour tout. Mais il pourrait jouer un rôle positif en impliquant l'économie pour soulager les familles. Et ce serait dans leur propre intérêt. Car si les citoyens ne dépensent plus d'argent au restaurant ou pour des vacances à la montagne, l'économie nationale en pâtira.
Le Centre: un rôle clé pour le pacte familial
Depuis que l'ancien PDC s'est débarrassé du côté chrétien de son nom et se positionne comme un large parti centriste, il s'ouvre aux préoccupations des électeurs plus jeunes et moins conservateurs. Mais en fait-il assez pour les familles? Sa grande préoccupation, la suppression de la pénalisation du mariage (pour les impôts et l'AVS), est une bonne chose, mais cela ne peut pas suffire.
En tant que pourvoyeur de majorité au Parlement, le Centre a les meilleures conditions pour jouer un rôle clé dans l'allègement des charges des familles. Un pacte familial qui dépasse les frontières des partis. Qui, sinon le Centre, pourrait assumer cette responsabilité?
PS: extension de l'Etat social
Les socialistes ont la tâche la plus facile. Après la victoire sur l'AVS, ils peuvent plus que jamais poser des exigences pour une extension de l'Etat social, avec de bonnes chances de succès auprès du peuple. L'initiative sur la réduction des primes mentionnée plus haut est le prochain coup, mais de loin pas le dernier. Et avec le patron des syndicats Pierre-Yves Maillard (55 ans, 2 enfants), le PS dispose d'un porte-parole qui peut pousser les autres partis devant lui, comme Christoph Blocher l'a fait pour la droite.
La pression de la gauche est manifestement nécessaire pour que la politique n'abandonne plus les familles de la classe moyenne. Mais les bourgeois ne doivent pas laisser le sujet à la seule gauche et à ses hautes exigences, mais contribuer à trouver des solutions qui soient finançables et qui ne pèsent pas indirectement sur de nombreuses familles.