La chasse a commencé!
Bataille au sein du Conseil fédéral pour les départements clés

Les départs d'Ueli Maurer et de Simonetta Sommaruga libèrent deux départements clés au sein du Conseil fédéral. En coulisses, on se bat déjà pour la redistribution des départements.
Publié: 14.11.2022 à 10:06 heures
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Dernière mise à jour: 14.11.2022 à 10:40 heures
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On ne sait pas encore qui succédera à Ueli Maurer et Simonetta Sommaruga au Conseil fédéral. Mais la future répartition des départements fait déjà l'objet de discussions.
Photo: Keystone
Daniel Ballmer, Pascal Tischhauser, Rudolf Studer Monachino

Le grand favori de l'UDC Albert Rösti parviendra-t-il à entrer au Conseil fédéral? Eva Herzog s'imposera-t-elle face à Evi Allemann pour le PS? Seront-elles toutes deux dépassées par Elisabeth Baume-Schneider?

On ne sait pas encore qui le Parlement élira le 7 décembre pour succéder à Simonetta Sommaruga et Ueli Maurer. Mais en coulisses, la lutte pour la répartition des différents départements a déjà commencé au Conseil fédéral. Et il pourrait s'agir d'un grand chassé-croisé.

Le département des Finances doit rester bourgeois

Karin Keller-Sutter serait la plus motivée par un changement de poste. Ce n'est un mystère pour personne: le département de la Justice n'a jamais été son premier choix. La libérale-radicale aurait donc jeté son dévolu sur le département des Finances qui, par chance, se libère. Elle a d'ailleurs déjà entamé une véritable tournée de promotion.

Il s'agit tout de même du département clé le plus important: il n'y a pas de grande affaire dans laquelle le ministre des Finances ne puisse pas intervenir. Les bourgeois veulent absolument le garder sous leur contrôle.

C'est le gouvernement national qui décide de la répartition des départements lors de la séance suivant les élections. Les membres peuvent exprimer leurs souhaits en fonction de leur ancienneté. Le premier à le faire sera le ministre de l'Intérieur Alain Berset, membre du gouvernement depuis 2012.

Karin Keller-Sutter supplie Alain Berset

Depuis des années, on prête au Romand l'ambition de passer au département des finances. Après l'épuisante période du coronavirus, Alain Berset pourrait aspirer à une nouvelle tâche. Parallèlement, il peut se targuer d'être le premier à avoir fait passer une réforme de l'AVS depuis près de trois décennies.

Toutefois, le Romand reprendra la présidence de la Confédération l'année prochaine, un changement de département en même temps serait donc une lourde charge. De plus, les bourgeois du Conseil fédéral ne veulent guère laisser les finances à un homme de gauche. A l'inverse, lui interdire un changement reviendrait à lui faire un affront. Selon les informations, Karin Keller-Sutter se concerte étroitement avec son collègue. Elle demande qu'il lui laisse la priorité.

Viola Amherd ne veut pas rester éternellement

Une option plutôt improbable est qu'Alain Berset hérite du département de l'énergie de Simonetta Sommaruga. On peut partir de ce principe: Si le conseiller fédéral PS change de département, il voudra en choisir un qu'il pourra gouverner quelques années. En revanche, s'il reste au département de l'Intérieur, cela indiquerait qu'il pourrait quitter son poste après son année de présidence.

Outre, on dit que la conseillère fédérale du centre Viola Amherd a, elle aussi, de plus en plus envie de changer. C'est un secret de polichinelle que le DDPS n'a jamais été le département qu'elle souhaitait. Mais elle s'est arrangée et peut faire état de succès. Ainsi, elle a non seulement réussi à faire passer l'achat de nouveaux avions de combat, mais aussi à obtenir un budget de l'armée nettement plus élevé.

Elle pourrait ainsi passer au prochain département en toute bonne conscience. Si tant est qu'elle le veuille. En effet, au début de son mandat, elle aurait signalé en interne qu'elle ne souhaitait pas rester éternellement au Conseil fédéral. Mais ses succès au DDPS pourraient aussi avoir donné des ailes à la Valaisanne dans sa volonté de maîtriser les défis d'un autre département.

Deux Valaisannes pour le prix d'une

Actuellement, Viola Amherd fait confiance à une autre Valaisanne: Brigitte Hauser-Süess. Cette dernière, alors âgée de 64 ans, a été nommée début 2019 comme sa conseillère personnelle. Elle doit accompagner la conseillère fédérale dans son année présidentielle 2024, dit-on.

Brigitte Hauser-Süess a déjà travaillé pour la conseillère fédérale Eveline Widmer-Schlumpf ainsi que pour la conseillère fédérale PDC Doris Leuthard. Il est peu probable que Brigitte Hauser-Süess reste aux côtés de la magistrate du centre au-delà de l'année présidentielle de Viola Amherd. Et selon des proches, il n'est pas certain que la conseillère fédérale veuille continuer à gouverner sans sa bonne amie au Conseil fédéral.

Lutte pour le DETEC

Mais ce que l'on sait, c'est que le département de la justice a longtemps été le département de rêve de la juriste valaisanne. Mais on entend dire que son intérêt se porte désormais aussi sur le département de l'énergie et des transports, beaucoup plus important. Avant d'entrer au Conseil fédéral, Viola Amherd faisait en effet de la politique au sein de la commission des transports du Conseil national. Et en tant que ministre des Transports, la Valaisanne pourrait faire avancer l'extension complète du tunnel de base du Lötschberg, si importante pour son canton.

Une véritable lutte de pouvoir pourrait toutefois s'engager autour de ce département clé - d'autant plus important depuis la crise énergétique. En effet, si l'UDC Albert Rösti est élu, il devrait également jeter un œil sur le DETEC, car il est considéré comme un fin politicien en matière d'énergie.

Mais cela marchera-t-il? «Si l'UDC et le PLR s'unissent, ils auront quatre voix au sein du Conseil fédéral composé de sept membres et pourront décider de beaucoup de choses», explique un bourgeois. C'est bien sûr l'objectif. Des discussions devraient avoir lieu dans ce sens. «Mais il n'est pas certain que cela fonctionne réellement.»

Parfois, c'est une question de hiérarchie

La répartition des départements a ses propres lois et dynamiques. C'est l'ensemble du conseil qui doit décider. Et là, on regarde moins les souhaits des supérieurs du parti que la question de savoir si, lors des prochaines vacances ou d'une affaire importante, on ne risque pas tout à coup d'avoir un boomerang si on irrite trop ses camarades.

Et parfois, il s'agit simplement de marquer la hiérarchie. Les nouveaux venus doivent donc généralement passer derrière et se contenter des départements moins importants. Il est donc fort possible que les nouveaux membres du Conseil fédéral doivent se contenter du DDPS et du DFJP. Le premier reviendrait alors probablement à l'UDC et le second au PS.

«Il n'est pas en pleine ménopause»

Il est peu probable que la lutte pour la répartition s'étende également au Département de l'économie et au Département des affaires étrangères. Le conseiller fédéral UDC Guy Parmelin ne devrait en tout cas pas aspirer à un nouveau départ, puisqu'il n'est passé qu'en 2019 du département de la défense à celui de l'économie. «Il reste, c'est sûr. Il n'est pas en pleine ménopause», plaisante un collègue de parti.

Le conseiller fédéral PLR Ignazio Cassis devrait lui aussi rester fidèle au département des Affaires étrangères. Il a encore des ambitions dans le dossier européen, dit-on. Le maintien de cette situation devrait par ailleurs dépendre du fait qu'Alain Berset continue ou non à revendiquer le département de l'Intérieur. S'il devait tout de même effectuer un changement, les cartes seraient complètement redistribuées.

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