«Ils veulent que vous ayez froid!»
Après la pandémie, les coronasceptiques ont trouvé une nouvelle cible

La crise énergétique fait peur. La «résistance» s'organise en Suisse et en Europe et certains demandent l'arrêt des sanctions contre la Russie pour assurer l'approvisionnement en gaz et en pétrole. Parmi les contestataires: des coronasceptiques.
Publié: 09.09.2022 à 15:07 heures
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En Allemagne, comme ici à Leipzig, les gens descendent dans la rue pour manifester contre la politique énergétique du gouvernement.
Photo: keystone-sda.ch
Johannes Hillig

Après avoir bataillé contre les mesures sanitaires liées au Covid-19, les complotistes ont trouvé un nouveau cheval de bataille: la crise énergétique. Le mouvement «Volksaufklärung», en plein essor en ligne, a appelé à une grande manifestation ce vendredi à 18h à la gare de Zurich. Le but: demander l’arrêt immédiat des sanctions contre la Russie pour relancer l’approvisionnement en gaz vers l’Europe.

La crise énergétique fait peur. En coupant le robinet de gaz à l’Occident, Vladimir Poutine a provoqué une flambée des prix sur tout le continent et fait planer le risque d’une pénurie.

Il n’en fallait pas plus pour que ce mouvement «Volksaufklärung» monte au créneau. «Vous ne devriez pas avoir froid en hiver! Votre gouvernement veut que vous ayez froid», peut-on lire dans son appel à manifester. La police municipale de Zurich en est informée. «Nous sommes au courant de cet appel. Nous n’avons pas déposé de demande pour cette manifestation», explique Judith Hödl, porte-parole de la police, à Blick. «Nous nous préparons en conséquence», indiquent les autorités, sans donner plus de détails.

Simonetta Sommaruga doit démissionner

Le mouvement populaire en ligne n’est pas le seul à critiquer la politique énergétique suisse. Les coronasceptiques sont également de retour sur le devant de la scène. En tête de file: Nicolas Rimoldi et son mouvement «Mass-Voll». «Ils ne peuvent tout de même pas nous couper le courant en hiver!», déclarait déjà ce dernier à Blick en juillet.

Sur Telegram, le jeune homme de 27 ans a lancé une pétition. Il demande la démission de la conseillère fédérale Simonetta Sommaruga, car elle serait «en grande partie responsable de ce désastre». Aux côtés du mouvement «Mass-Voll», de vieilles connaissances de la scène coronasceptique sont de retour: les «Freiheitstrychler» et leurs cloches.

Et cette mobilisation n’est pas propre à la Suisse: des coronasceptiques de toute l’Europe se sont réunis pour dénoncer les politiques d’économies d’énergie.

A Prague, l’Ukraine plus importante que son propre peuple?

Rien qu’à Prague, près de 70’000 personnes se sont rassemblées ce week-end sous le slogan «La République tchèque d’abord» pour défiler contre le gouvernement. Les manifestants ont reproché aux politiques d’accorder plus d’importance à l’Ukraine qu’à leur propre peuple.

Comme on pouvait s’y attendre, la crise énergétique n’a pas été la seule à être critiquée par les manifestants. La vaccination contre le Covid-19 et l’accueil des réfugiés étaient également au menu des sujets conspués. La République tchèque a accueilli près de 400’000 réfugiés de guerre en provenance d’Ukraine et a fourni à ce pays du matériel militaire et de l’aide humanitaire en grande quantité.

«Abuser des crises»

En Allemagne aussi, la résistance s’organise et l’on s’inquiète de plus en plus que la situation puisse être pire que celle lors de la pandémie de Covid-19. En juillet déjà, la ministre fédérale de l’Intérieur, Nancy Faeser, avait averti qu’une radicalisation pourrait se produire à l’automne. Une période où les prix vont continuer d’augmenter et où une nouvelle vague d’infections au Covid pourrait entraîner la mise en place de nouvelles mesures.

«Les ennemis de la démocratie n’attendent qu’une chose: abuser des crises pour répandre des fantasmes d’apocalypse, de peur et d’insécurité», analysait la politicienne pour le magazine allemand «Der Spiegel» en juillet.

«Les porte-parole du mouvement de protestation anti-Covid changent actuellement de thème sans transition», a encore estimé le chef de la protection de la Constitution de Basse-Saxe, Bernhard Witthaut. Les contenus semblent presque quelconques, l’essentiel étant qu’ils soient aptes à «attiser la peur et la colère et à les projeter sur l’Etat».

Thomas Haldenwang ne pense pas jusqu’à présent que les manifestations pour demander la fin des sanctions contre la Russie seront aussi intenses voire violentes que celles de la période de pandémie. «Actuellement, nous n’avons aucun signe d’émeutes de masse violentes», a assuré le président allemand de l’Office fédéral de protection de la Constitution fin août au journal «Bild am Sonntag».

Les autorités restent néanmoins préparées à tous les scénarios possibles.

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