Ils s'adressent au Tribunal cantonal lucernois
Une aide de 14,15 francs par jour? Trop faible, pour ces Ukrainiens

L'aide sociale pour les demandeurs d'asile dans le canton de Lucerne (14,15 francs par jour) serait trop basse. C'est ce que pensent 39 réfugiés ukrainiens — qui se tournent désormais vers le Tribunal cantonal.
Publié: 02.02.2023 à 06:09 heures
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Dernière mise à jour: 02.02.2023 à 06:35 heures
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Des réfugiés ukrainiens du canton de Lucerne estiment que leur aide sociale est trop basse.
Photo: keystone-sda.ch
Sermîn Faki

Trente-neuf réfugiés ukrainiens vivant dans le canton de Lucerne se sont adressés au tribunal cantonal. Celui-ci doit vérifier si les taux d’aide sociale que le canton verse aux demandeurs d’asile sont contraires au droit fédéral.

En effet, l’aide sociale lucernoise en matière d’asile est l’une des plus basses du pays: un adulte reçoit 14,15 francs par jour s’il vit dans un logement individuel. S’il vit dans un hébergement collectif, comme un foyer d’asile ou une installation de protection civile, il ne reçoit même que 11,50 francs. En comparaison, les bénéficiaires de l’aide sociale avec un passeport suisse, mais aussi les réfugiés reconnus, reçoivent 33,90 francs, soit plus du double.

Déjà critiqué au Grand Conseil

Avec ces montants, Lucerne se situe dans le bas du classement des cantons. Selon la Conférence suisse des institutions d’action sociale (CSIAS), les forfaits journaliers dans les cantons pour les requérants d’asile dans un logement individuel se situent entre 9,70 et 26,80 francs.

Le faible niveau de l’aide sociale en matière d’asile a déjà fait l’objet d’un débat au parlement cantonal de Lucerne. Ce qui n’a pas servi à grand-chose: le Conseil d’Etat a, certes, adapté cette aide au renchérissement au début de l’année, mais cela fait tout juste 20 à 30 centimes de plus par jour et par requérant d’asile, comme le critique le député vert Urban Frye.

«On ne peut pas vivre avec ça»

Il est également à l’origine du recours au tribunal et supporte les coûts de la procédure. Urban Frye est l’initiateur du centre culturel ukrainien Prostir à Reussbühl (LU), dont sont issus tous les Ukrainiens qui s’adresseront aux juges. Le politicien souligne toutefois que la requête concerne tous les demandeurs d’asile, et pas seulement les Ukrainiens bénéficiant du statut de protection S.

«On ne peut pas mener une vie digne avec si peu d’argent», a-t-il déclaré au «Bote der Urschweiz» et annoncé que si nécessaire, l’affaire sera portée devant le Tribunal fédéral et la Cour européenne des droits de l’homme. Selon lui, le canton de Lucerne devrait payer entre 16 et 20 francs par personne et par jour.

Le canton s’enrichit-il sur le dos des demandeurs d’asile?

Pire encore: Urban Frye reproche au Conseil d’Etat de détourner l’argent de la Confédération. «Le canton fait un bénéfice d’environ 200 francs avec chaque personne réfugiée pour laquelle il reçoit des contributions de la Confédération», calcule-t-il. La Confédération verse aux cantons 1500 francs par mois et par requérant d’asile.

Ce montant comprend l’aide sociale, mais aussi des frais comme le loyer et la caisse maladie. Mais alors que le canton d’Argovie, par exemple, verse 550 francs par mois aux requérants d’asile, Lucerne n’en verse que 350. Le canton n’a pas encore pu lui répondre sur la répartition des 200 francs restants.

Lucerne veut rectifier le tir

Mais peut-être que le recours au Tribunal fédéral ou à Strasbourg n’est plus nécessaire: le Conseil d’Etat planche actuellement sur une modification de l’ordonnance cantonale sur l’asile.

«Celle-ci doit contenir une augmentation des taux de l’aide sociale économique pour les personnes relevant du domaine de l’asile», explique Guido Graf, le directeur des affaires sociales en charge du dossier. Sa direction prévoit de mettre le projet en consultation avant la fin du premier semestre 2023.

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