La Confédération veut briller dans les airs. En acquérant le Global 7500 de Bombardier, le Conseil fédéral s'est ainsi offert «le plus grand jet d'affaires au monde, avec le plus grand rayon d'action». Coût total de l'engin: environ 103 millions de francs. Fin janvier, l'Office fédéral de l'armement, Armasuisse, avait présenté le nouvel avion à l'aéroport de Berne-Belp.
Le jet dispose de 19 places assises et peut atteindre une vitesse proche du supersonique puisqu'il peut filer dans les airs à 982 km/h. Avec une autonomie de 14'000 kilomètres, il peut atteindre Sydney en Australie. Insuffisant toutefois pour le Conseil fédéral, qui a donc fait installer quelques extras comme un système radio militaire ou un système d'autoprotection. Une merveille de technologie.
Mais il y a un hic: avec une longueur de 33,83 mètres, une envergure de 31,79 mètres et une hauteur de 8,14 mètres, le nouvel avion de luxe est nettement plus grand que les précédents jets du Conseil fédéral. Résultat des courses: le nouvel avion, aussi merveilleux soit-il, ne rentre pas dans les hangars appartenant à la Confédération à l'aéroport de Berne-Belp! Une solution doit donc être trouvée en urgence.
Une tuile qui profite à l'aéroport de Berne
L'aéroport de Berne compte bien en profiter. Son plus grand hangar, qui date de l'époque de sa construction à la fin des années 1920, doit être remplacé par une nouvelle construction. Celle-ci a d'ailleurs déjà été approuvée. «Le projet a été lancé il y a quatre ans déjà, indépendamment du nouveau jet du Conseil fédéral», explique Urs Ryf, directeur de l'aéroport de Berne.
Mais ce n'est que maintenant, alors que la Confédération souhaite louer un espace plus grand, que l'aéroport met les bouchées doubles. «Pour nous, c'était clair: dès que nous avions un locataire, nous mettrions le projet en œuvre», explique Urs Ryf. Il faut dire, la construction d'un nouveau bâtiment est une opération onéreuse.
Les coûts d'un tel agrandissement sont estimés à plusieurs millions de francs. L'argent doit ensuite être récupéré par l'aéroport grâce aux loyers payés par les locataires. Pour la Confédération, la location d'un espace plus grand entraînera donc des dépenses supplémentaires.
Le jet doit déménager pendant deux ans
Mais la Confédération devra attendre deux ans pour que le nouvel hangar soit prêt. Pendant cette période, l'avion du Conseil fédéral devra être déplacé sur l'aérodrome militaire de Payerne, dans le canton de Vaud, comme le confirme la porte-parole de l'armée Delphine Schwab-Allemand. Le Département de la défense aurait été informé du problème dès le départ.
Le transfert temporaire dans le canton de Vaud ne sera pas non plus gratuit: les hangars militaires sur place sont également trop petits pour accueillir l'avion, confie des sources militaires à Blick. Ainsi, la Confédération devra louer un espace supplémentaire, ce qui entraine également des coûts en plus.
Un tour de passe-passe... qui ne passe pas
Ce qui gêne particulièrement dans cette affaire, c'est que la situation financière tendue de la Confédération devait théoriquement rendre impossible l'achat d'un nouveau jet. Le Conseil fédéral a dû trouver une astuce financière: les coûts ont été intégrés au dernier moment au budget 2023 sous la forme d'une dépense supplémentaire.
Dans son dernier projet de budget, le Conseil fédéral a lui-même reconnu ce tour de passe-passe. «En raison de la situation budgétaire tendue des années 2024 et 2025, le prix d'achat doit être intégralement réglé dans l'exercice comptable 2023.»
Un jet obsolète, et un autre fichu
Les avions du service de transport aérien sont utilisés lors de voyages du Conseil fédéral, pour le transport d'autres magistrats, mais aussi lors d'évacuations, d'aide d'urgence en cas de catastrophes écologiques ainsi que dans des situations d'urgence humanitaire à l'étranger.
Actuellement, la flotte aérienne de la Confédération comprend deux avions. Le premier, le Cessna Citation Excel 560XL, vieux de 21 ans, doit être remplacé par le nouveau jet. Le second, un Falcon est surnommé «le jet en panne» par la presse. Et pour cause...
A plusieurs reprises, des membres du Conseil fédéral ont dû interrompre leur voyage en raison de défaillances techniques, au point parfois de devoir manquer des visites d'Etat. Pour des raisons d'économies, le Falcon ne sera toutefois pas remplacé tout de suite.