Famille et amis à la rescousse des PME
La Suisse manque cruellement d'apprentis

Est-ce la mauvaise image, les salaires bas, ou le travail physique? Les PME suisses s'interrogent sur la grave pénurie d'apprentis.
Publié: 08.07.2022 à 17:58 heures
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Le boucher Beat Wüthrich et son équipe. Ses parents n'ont pas trouvé d'apprenti pendant dix ans. Grâce à des outils contemporains, il a déjà pu engager un apprenti cette année.
Photo: Beat Michel
Beat Michel

Les PME suisses tirent la sonnette d’alarme. Elles n’arrivent pas à pourvoir leurs places d’apprentissage. Les conséquences inquiètent: à moyen et long terme, la pénurie actuelle persistera.

«Nous devons faire connaître nos métiers aux jeunes», déclare Martin Truninger, maître ferblantier et propriétaire d’une entreprise à Rikon (ZH). Pour Nicole Thönen, assistante médicale principale à Belp (BE): «Si nous ne formons pas plus d’assistants médicaux, il sera difficile de maintenir l’activité du cabinet.» Beat Wüthrich, gérant et propriétaire d’une boucherie à Münchenbuchsee (BE) insiste: «Nous devons faire quelque chose, rapidement.»

Chaque métier est précieux

17’000 places d’apprentissage sont actuellement mises au concours, selon la liste LENA. «Nous nous battons depuis des mois pour intéresser les jeunes à la formation de ferblantier, explique Martin Truninger. Aujourd’hui, le métier est devenu inconnu.»

Prêchant pour sa paroisse, l'artisan affirme que «c’est l’un des plus beaux métiers artisanaux qui soit. Le métier est varié, créatif, et le salaire est correct.» Malgré tout ces aspects positifs (selon lui), il peine à trouver chaussure à son pied.

Famille et amis à la rescousse

Martin Truninger tente de comprendre pourquoi la relève n’est plus au beau fixe. Lors d’un rendez-vous au sein du comité de l’association sectorielle Suissetec Nordostschweiz, il annonce travailler «à une campagne de promotion de la branche». Le manque de main-d’œuvre qualifiée est si important qu’il est obligé de faire appel à des amis et à sa famille...

Il a également dû emprunter du personnel à d’autres entreprises du secteur. Et les bureaux temporaires ne sont pas non plus une solution: «Cela fonctionne peut-être pour les grandes entreprises, mais pas pour notre petite équipe.»

Le son de cloche est identique dans le secteur médical. «Les jeunes ne s'intéressent plus à notre métier d’assistant médical», déplore Nicole Thönen. Selon les chiffres transmis par la présidente de l’Association suisse des praticiens médicaux (SVA), «plus de 1’200 postes sont à pourvoir. Si nous n'avons déjà plus assez d’apprentis aujourd’hui, la pénurie de personnel s’aggravera à l’avenir.»

La faute aux salaires trop bas

Si peu de jeunes veulent aujourd'hui faire ces métiers, c'est probablement à cause des salaires trop bas. La présidente centrale de la SVA explique: «Les recommandations pour le salaire minimum sont données par la Fédération des médecins suisses (FMH) et se situent entre 3’800 et 4’200 francs selon les cantons. Bien sûr, les cabinets individuels peuvent aussi payer des salaires plus élevés, mais c’est compliqué.»

Le secteur de la boucherie subit également sa mauvaise réputation. Beat Wüthrich, qui a repris l’entreprise de ses parents, est inquiet: «La Suisse aurait besoin de 300 à 400 apprentis pour maintenir les boucheries existantes. Cette année, il en manque déjà 150.»

Recruter sur Instagram

Beat Wüthrich, encore lui-même loin de la vieillesse, a donc innové: il a recruté sur les réseaux sociaux. Il publie régulièrement des postes sur une page Instagram dédiée, développe sans cesse de nouveaux produits, et alimente une esthétique moderne.

«Dans notre magasin, on peut tout acheter, de l’apéritif au dessert. L’élevage respectueux des animaux et l’utilisation intégrale des animaux abattus sont des points centraux. Et cela fonctionne, nous venons d’engager le prochain apprenti.»

(Adaptation par Mathilde Jaccard)

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