Plus de 284 personnes se retrouvent, en l'espace d'un instant, menacées de finir à la rue. Le monde de ces centaines de locataires s'est soudainement écroulé mercredi: Zurich Assurance leur a envoyé une lettre pour leur demander de quitter leur logement, situé dans le lotissement Vita à Langnau am Albis, le long du lac de Zurich. Ils ont en principe jusqu'à la fin du mois de septembre pour partir.
Le propriétaire prévoit une densification et une rénovation complète de ce terrain de 65'000 mètres carrés. Selon l'agence immobilière Apleona Schweiz AG, des grosses rénovations sont nécessaires un peu partout: dans les cuisines, les salles de bain, les conduites, les sols, les murs, les cages d'escalier, les façades, les toits, ainsi que les fenêtres. «Une grande partie du lotissement actuel devra être entièrement rénovée et sera conservée, tandis que de nouveaux bâtiments seront construits après la démolition d'immeubles existants», indique la lettre qui accompagne la lettre de résiliation.
Selon Apleona, le projet est nécessaire afin de permettre le développement de la commune. Raison pour laquelle une réalisation rapide est nécessaire. Le délai de résiliation pourrait cependant être prolongé d'une année, si les locataires renoncent à des démarches juridiques afin de contester le projet de construction.
Ils ne veulent pas partir
Emine Januzi n'a pas du tout envie de déménager. Cette femme vit avec son mari et sa petite fille de trois ans. Ses parents habitent, eux aussi, dans le quartier, tout comme son frère et sa femme, ainsi que ses beaux-parents. Au total, la famille Januzi occupe cinq appartements. «Nous ne trouvons rien du tout, déplore Emine Januzi. Est-ce que je vais réussir à trouver un logement à Langnau?» Elle craint des prix exorbitants, d'autant plus qu'elle a besoin d'un appartement de 3,5 pièces.
Emine Shabani est un peu dans le même cas de figure. Bien qu'elle n'a pas encore reçu de préavis, cela ne saurait tarder. Le loyer de son trois pièces s'élève à 1850 francs, un prix plutôt avantageux. Déménager pour cette mère de deux enfants est loin d'être facile. «Notre fille aînée souffre d'un trouble autistique. Nous sommes à la recherche d'un appartement depuis un certain temps déjà et nous n'avons rien trouvé jusqu'à présent», explique-t-elle.
Des personnes actives dans le milieu l'avaient déjà avertie de ce projet de rénovation. «C'est ce qui nous a poussés à commencer à chercher», confie-t-elle. Sans succès pour le moment, bien qu'elle travaille à 80% et son mari à plein temps. Selon Emine Shabani, Apleona n'a proposé aucune alternative jusqu'à présent.
«Nous ne recevons aucun soutien»
De leur côté, la famille Ponti regrettent de devoir quitter leur maison à l'automne. La mère, Susan, 40 ans, vit avec son mari et ses cinq enfants dans une maison individuelle qui devra être rénovée – et probablement démolie. «Nous avons toujours su que quelque chose allait se passer», confie Susan. Elle espérait toutefois une résiliation socialement acceptable, ses moyens financiers étant limités. «Nous aimons beaucoup vivre ici. Il y a beaucoup de familles et des générations différentes: des jeunes, des vieux, des personnes seules, des petites familles, des grandes familles.»
De plus, Susan Ponti travaille à Langnau am Albis, au sein de la commission scolaire. Un déménagement dans un autre quartier serait donc malvenu pour une employée communale. Elle estime que le marché du logement dans la région de Zurich complique la situation. «On ne nous a pas présenté d'alternatives. Nous ne recevons aucun soutien. Dans d'autres endroits, on a construit des logements temporaires, dans des conteneurs par exemple. Ce n'est pas le cas ici», déplore-t-elle.
Lettre ouverte au conseil municipal
Aujourd'hui, l'ambiance est morose dans le quartier Vita. Mais plusieurs habitants refusent de se laisser faire, et souhaitent unir leurs forces pour défendre leurs intérêts. «Nous avons demandé une assistance juridique», explique Susan Ponti. Elle accuse Apleona d'agir de façon malhonnête: «c'est à la limite du chantage !» Les habitants adresseront une lettre ouverte au conseil municipal.
Le début du projet de construction est prévu pour le 1er octobre 2026. Le propriétaire souligne que le projet représente un équilibre entre la rénovation et la construction.