Elle réclame 5 millions
Une médecin-cheffe fait recours contre son licenciement abusif

Natalie Urwyler est médecin-cheffe et milite depuis des années pour une meilleure protection de la maternité et des femmes en milieu hospitalier, ce qui a conduit à son licenciement abusif à l'Inselspital de Berne. Elle poursuit l'hôpital en justice pour cinq millions.
Publié: 26.08.2021 à 12:46 heures
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Dernière mise à jour: 26.08.2021 à 15:44 heures
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Natalie Urwyler milite pour une meilleure protection des femmes et des femmes enceintes sur le lieu de travail.
Photo: Isabelle Favre
Jana Giger, Jocelyn Daloz (adaptation)

L’égalité des salaires, une meilleure protection des femmes enceintes et les mêmes opportunités de carrière que les hommes, sont autant de revendications que Natalie Urwyler porte depuis longtemps. La médecin-cheffe en a payé le prix fort.

Anesthésiste de haut niveau, celle qui a effectué des recherches à la prestigieuse université de Stanford en Californie a travaillé pendant dix en tant que médecin-cheffe à l’Inselspital de Berne. Durant ces années, elle constate que de nombreuses directives en matière de protection de la maternité ne sont pas appliquées: les femmes enceintes doivent travailler beaucoup plus longtemps qu’autorisé et sont exposées à des rayons X ou à des solvants dangereux pour l’enfant à naître.

Lorsqu’une collègue enceinte ne se sent pas bien, Natalie Urwyler réorganise les missions de cette dernière, afin qu’elles soient compatibles avec les dispositions légales. Ce qui n’est pas du goût de ses supérieurs. L’incident déclenche une vive discussion sur le congé maternité à l’Inselspital et sera à l’origine d’un conflit qui va durer des années.

Licenciement pendant son congé maternité

Lorsque Natalie Urwyler tombe elle-même enceinte, elle demande à prendre un congé sans solde de six mois, ce que l’Inselspital refuse. Au bout de longues négociations, la hiérarchie finit par céder.

Le coup de massue tombera en juin 2014, alors qu’elle est encore en cours de congé maternité. Natalie Urwyler est licenciée, en raison d’une «relation de confiance complètement brisée».

Elle ne se laisse pas faire. Elle conteste le licenciement en justice, celle-ci lui donne raison: le tribunal parle d’un «licenciement discriminatoire de vengeance». Si l’hôpital ne conteste pas la décision, l’affaire n’est toutefois pas terminée. Alors que Natalie Urwyler cherche un nouvel emploi, elle se rend compte que l’Inselspital continue son travail de sape: «Je me suis adressée à plusieurs hôpitaux en Suisse, mais toutes mes demandes sont restées lettre morte», raconte-t-elle à Blick.

Lorsqu’elle est enfin contactée pour passer un entretien d’embauche auprès d’une connaissance, celle-ci lui explique pourquoi elle peine à trouver un nouvel emploi: «elle m’a dit que l’Inselspital avait prévenu les autres hôpitaux à mon sujet. Ils leur ont dit de ne pas m’engager parce que j’avais un caractère difficile. C’est la pire chose que j’ai vécue dans ma vie. J’étais très triste et j’ai pleuré dans la voiture après l’entretien.» C’est alors qu’elle décide de ne pas se laisser faire.

Poursuite pour sa carrière détruite

Natalie Urwyler, qui a finalement obtenu un poste de médecin-cheffe adjointe dans le département de médecine de soins intensifs de l’hôpital de Sion en 2015 après des mois de recherche, poursuit l’Inselspital pour cinq millions de francs de dommages et intérêts. Cette somme correspond au salaire qu’elle a perdu n’ayant pu poursuivre sa carrière prometteuse comme prévu. Avec son curriculum vitae, un poste de professeur n’aurait été qu’une question de temps.

Le montant a été calculé sur la base d’un salaire moyen masculin. Si Natalie Urwyler gagne, elle sera la première femme à arracher l’égalité salariale aux tribunaux en Suisse. La décision pourrait tomber le 31 août, lors d’une rencontre entre les parties en vue d’un accord.

Natalie Urwyler exige de l’Inselspital que les femmes aient les mêmes droits et salaires que les hommes. «Je veux voir de l’action, dit-elle, et j’espère vraiment que nous pourrons parvenir à un accord le 31 août. Ce processus n’apporte pas grand-chose à la lutte, il n’a de sens que si les femmes qui viennent après moi s’en sortent mieux.»

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