Elle prie pour ses patients
La spiritualité est utilisée pour soigner... même dans les hôpitaux

Les guérisseurs possédant le «secret» ou autres «pouvoirs spirituels» sont très demandés en Suisse romande - et encore plus depuis la pandémie. En Valais, une médecin utilise ses prières... à l'hôpital.
Publié: 26.12.2022 à 09:18 heures
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Dernière mise à jour: 03.01.2023 à 16:19 heures
Camille Kündig

La Suisse tousse et renifle. Alors que beaucoup se maintiennent à flot avec des médicaments et des sirops, certains misent sur l'aide spirituelle. En Suisse romande, par exemple, on fait appel à des «faiseurs de secret», des guérisseurs qui doivent aider à distance par une prière secrète. Gratuitement, car selon la tradition, ils ne peuvent pas demander d'honoraires.

Beaucoup de «faiseurs de secrets» affirment que leurs lignes téléphoniques sont surchargées. Blick a posé la question à plus de 30 d'entre eux. Ils reçoivent actuellement jusqu'à 40 appels par jour. «Depuis la pandémie, de nombreuses personnes âgées, craignant pour leur santé future, vivent dans un isolement total. Ils nous contactent donc», explique Marie-Christine Vaucher, guérisseuse fribourgeoise.

Contrairement aux églises libres qui font actuellement de la publicité en masse dans les rues avec des promesses de guérison, le «secret» est un élément du patrimoine culturel qui figure sur la liste de l'Unesco des traditions suisses vivantes.

Une courte formule de bénédiction à teneur religieuse

Le «secret» ne peut être transmis que sur la base de la confiance et seuls les initiés savent en quoi il consiste. Il s'agit probablement d'une courte formule de bénédiction à contenu religieux, destinée à soulager et à guérir diverses maladies et blessures. Bien que la pratique ne résiste pas à une explication scientifique, elle a une constance en Suisse romande dans toutes les couches de la société et dans toutes les classes d'âge. Selon le principe, elle ne peut pas faire de mal.

Même les hôpitaux n'y sont pas opposés. L'hôpital de Fribourg, les cliniques Hirslanden de Lausanne (VD) et Genève ainsi que le service d'oncologie de l'hôpital intercantonal de Payerne (VD), tiennent à disposition des patients les numéros de téléphone de guérisseurs, classés selon les affections qu'ils traitent. De son côté, le CHUV confirme sobrement que «pour des cas particuliers et en fonction de la situation, il est possible qu'il fasse appel ou ait fait appel à des faiseurs de secrets.»

L'Hôpital du Valais à Sion va encore plus loin et soutient l'intégration de différentes formes de soins et de médecine, comme le rapporte la porte-parole Célia Clavien. «Cela peut être une bonne option, notamment dans les cas de Covid long, où la science atteint ses limites.»

L'interne Florence Sierro-Müller accompagne ses patients, s'ils le souhaitent, avec le «secret» en plus des moyens de la médecine traditionnelle. Elle l'utilise le plus souvent dans les soins palliatifs et, selon les cas, pour les douleurs ou les brûlures. Elle l'utilise aussi en privé. «Ma belle-mère a saisi par erreur à mains nues une plaque dans le four brûlant. Elle a passé sa main sous l'eau froide et m'a appelée - le lendemain, elle n'avait même pas d'ampoules.»

L'effet placebo comme explication

Le «secret» n'est nullement en contradiction avec son titre de docteur, affirme Florence Sierro-Müller. Elle souligne que la médecine conventionnelle n'a pas de réponse à toutes les questions et propose la guérison par la prière comme un complément, jamais comme un substitut à un traitement. «Même si je fais une prière pour soulager la douleur, je donne de la morphine au patient si nécessaire.»

Les défenseurs du «secret» supposent qu'en prononçant les prières, le niveau de stress des patients baisse, ce qui déclenche des mécanismes chimiques et hormonaux positifs. Une explication possible est l'effet placebo, qui peut justement être démontré dans le cas de la douleur.

De l'autre côté de la Sarine, on se montre plus réticent. Philippe Luchsinger, médecin exerçant à Zurich et président de l'Association suisse des médecins de famille et de l'enfance, déclare: «Il existe de nombreuses possibilités différentes d'aborder les problèmes de santé. Comme il manque des études sur ces méthodes alternatives, nous ne pouvons pas non plus juger si elles font plus de mal ou plus de bien.»

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