L’armée suisse s’est-elle réjouie pour rien? Au printemps dernier, elle avait pourtant de quoi sourire. Le Parlement, échaudé par la guerre en Ukraine, avait décidé d’augmenter progressivement le budget de l'armée jusqu’en 2030. Des opposants étaient rapidement montés au créneau pour dénoncer un chèque en blanc, car l’armée avait mis des mois à démontrer comment ces fonds supplémentaires seraient utilisés.
Des économies d’ici à 2026
Le gouvernement semble avoir, lui aussi, décidé de lui mettre des bâtons dans les roues. Le Conseil fédéral veut en partie faire marche arrière. Le ministre des Finances sortant, Ueli Maurer, avait déjà prévenu que la Suisse devrait faire face des déficits de plusieurs milliards à partir de 2024.
Et son département, dirigé aujourd’hui par la PLR Karin Keller-Sutter, a pris cet avertissement au sérieux. Afin d’atteindre l’équilibre en 2024, elle a décidé de prendre différentes mesures. Et l’armée est dans sa ligne de mire. Dans les années à venir, son budget pourrait augmenter nettement moins vite que ce qui était prévu par le législateur.
Pour l’an prochain, le Conseil fédéral envisage encore d’investir plus de 5,6 milliards de francs. Toutefois, ce chiffre signifie que l’extension devrait être réduite de 300 millions de francs en 2023 par rapport à ce qui était annoncé dans le plan financier initial. L’année suivante, cette réduction devrait se monter à 500 millions et, en 2026, à 800 millions.
Le gouvernement affirme être certain que ce montant sera suffisant. La croissance réelle de ce montant serait toujours de 3% par an, souligne-t-il. Ce qui représente plus du double par rapport à la croissance actuelle. D’importants projets prêts à être acquis pourraient ainsi être financés, relève le Conseil fédéral.
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«Pur gaspillage de l’argent du contribuable»
Dans le camp gauche-vert, on applaudit: les plans d’économie sont accueillis avec satisfaction. Les partis bourgeois ainsi que le Département de la défense (DDPS) de Viola Amherd doivent même s’en réjouir, a osé le coprésident des socialistes Cédric Wermuth sur Twitter. «Car si le budget initial avait été mis sur la table, on aurait dû dire à quoi servirait cet argent. Et c'était un pur gaspillage de l’argent du contribuable.»
Mais le conseiller aux États UDC Werner Salzmann, quant à lui, voit rouge. Le président de la Commission de la politique de sécurité s’est agacé du fait que le Conseil fédéral ne tienne absolument pas compte de la volonté du Parlement avec ses plans d’économies.
L’armée doit à nouveau planifier ses renoncements
Sa commission a tout de même discuté avec l’armée d’un plan indiquant quand et quelles acquisitions devaient être effectuées pour l’armée d’ici à 2030. Il faut maintenant tout remettre à plat, s’est plaint le Bernois sur les ondes de la radio SRF: «L’armée doit faire une planification de renoncement et répartir toutes les acquisitions jusqu’en 2035.» Selon lui, cela aurait pour conséquence de retarder la pleine capacité de défense de la Suisse.
Les coupes prévues par le Conseil fédéral dans l’extension de l’armée doivent encore être approuvées par le Conseil national et le Conseil des Etats dans le cadre du budget global. Le Parlement aura donc le dernier mot.