Critique des nouveaux objectifs climatiques pour 2035
«Ce que la Confédération propose ne sert à rien», critique Greenpeace

Pas assez ambitieux et injustes: avec les nouveaux objectifs climatiques, la Confédération renonce à l'objectif de 1,5 degré, déclare Georg Klingler de Greenpeace dans une interview.
Publié: 11.02.2025 à 12:54 heures
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«On n'atteint jamais des objectifs ambitieux avec un pied sur le frein», estime Georg Klingler, expert climatique de Greenpeace.
Photo: A. Morgenstern/Greenpeace, Keystone, – Montage: Beobachter
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Tina Berg

Tous les cinq ans, la Suisse doit se fixer des objectifs climatiques plus élevés. C'est ce qu'exige l'accord de Paris sur le climat. La dernière fois, la Confédération voulait réduire de moitié les émissions de gaz à effet de serre d'ici à 2030, par rapport à l'année 1990. Le nouvel objectif prévoit une réduction de 65% d'ici à 2035.

La Confédération formule élégamment que les objectifs «doivent être atteints en priorité par des mesures prises à l'intérieur du pays». Ce qui est certes correct, mais masque le fait que l'on veut justement, avec la nouvelle loi suisse sur le CO2, exporter davantage d'émissions qu'auparavant à l'étranger. Avec des projets qui, dans la pratique, se heurtent à de plus gros problèmes.

Pourquoi il faut regarder de très près ce que la Confédération soumet ici concrètement à l'ONU, c'est ce que Georg Klingler, expert climatique de Greenpeace, explique dans cette interview.

Dans le cadre de l'accord de Paris sur le climat, la Suisse a annoncé de nouveaux objectifs de réduction jusqu'en 2035. Pourquoi est-ce important?
C'est extrêmement important, c'est le cœur de l'accord. Il nous permet de savoir où nous en sommes globalement en matière de protection du climat. Nous avons convenu avec les autres pays que nous devions stabiliser le réchauffement climatique à 1,5 degré. Mais on ne s'est pas mis d'accord sur qui fait quoi exactement pour cela.

Il n'a tout simplement pas été possible de convaincre les pays de faire le nécessaire dès le début. C'est pourquoi on a choisi un modèle qui fonctionne un peu comme une vente aux enchères: les offres doivent être de plus en plus intéressantes pour que l'on se rapproche de l'objectif. C'est également le principe qui doit prévaloir pour les soumissions que les pays font tous les cinq ans. À chaque tour, les Etats s'engagent à atteindre des objectifs plus ambitieux.

Vous reprochez à la Confédération d'abandonner l'objectif de 1,5 degré avec les nouveaux objectifs climatiques. Sur quoi vous basez-vous concrètement?
Tout d'abord, il faut dire que la Confédération prétend simplement pouvoir respecter l'objectif de 1,5 degré avec les réductions d'émissions adoptées, et qu'elle n'apporte aucune preuve scientifique. La Confédération écrit explicitement que la Suisse ne veut réduire ses émissions que dans la mesure de la moyenne mondiale. La Suisse s'engage donc sur une voie qui ne permet pas de respecter l'objectif de 1,5 degré et de stopper le réchauffement climatique.

Pourquoi pas?
Cela signifierait qu'à l'avenir, les pays dont les émissions sont plus faibles et la puissance économique moins importante devraient consommer nettement moins d'émissions par habitant que la Suisse. La Suisse veut s'approprier une part trop importante du maigre budget résiduel de CO2.

«
Les pays riches sont avantagés par le plan de la Confédération. Ce n'est pas juste
»

Les pays riches sont avantagés par le plan de la Confédération. Ce n'est pas juste. Et contredit le principe fondamental des «responsabilités communes, mais différentes et des capacités respectives». La Confédération explique certes en long et en large ce qui serait juste, mais ne le met pas elle-même en œuvre. C'est comme si l'on partageait une pizza en parts égales et qu'au lieu que chacun reçoive sa part équitable, la Suisse vienne tout simplement réclamer deux parts pour elle.

Est-ce nouveau ou la Suisse s'est-elle déjà alignée sur la moyenne auparavant?
Ce n'est pas nouveau. C'est d'ailleurs avec cette argumentation que la Suisse a plaidé et perdu devant la Cour européenne des droits de l'homme (CEDH). Avec les objectifs de réduction qu'elle vient de déposer, elle montre une fois de plus qu'elle se moque de ce jugement.

La proposition du Conseil fédéral n'est-elle pas tout simplement réaliste? Après tout, il doit faire passer cela sur le plan de la politique intérieure.
Bien sûr, il faut entraîner sa propre population. Mais si le gouvernement aborde les négociations avec un pied sur le frein, il ne parviendra jamais à faire passer des objectifs ambitieux. L'obéissance anticipée devient une prophétie auto-réalisatrice.

La Suisse est nettement à la traîne par rapport à d'autres pays: le Danemark a par exemple déjà pour objectif de réduire ses émissions de 70% d'ici à 2030. La Suisse devrait viser des émissions nettes nulles d'ici à 2035. Pour y parvenir, nous ne devrions pas reculer devant les interdictions, comme par exemple en Norvège, où aucune nouvelle voiture à combustion n'est autorisée depuis le 1er janvier 2025.

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