La levée de l'interdiction de construire de nouvelles centrales nucléaires a provoqué de gros remous au sein du Conseil fédéral. Le ministre de l'Union démocratique du centre (UDC) de l'Energie Albert Rösti a obtenu qu'un contre-projet indirect soit opposé à l'initiative «Halte au black-out». Il est flanqué de son collègue de parti Guy Parmelin et des deux conseillers libéraux-radicaux (PLR) Karin Keller-Sutter et Ignazio Cassis.
Le quatuor de droite a ainsi éliminé le trio de centre-gauche au Conseil fédéral. La ministre de la Défense du Centre Viola Amherd ainsi que les deux magistrats socialistes (PS) Elisabeth Baume-Schneider et Beat Jans se sont opposés avec véhémence aux plans d'Albert Rösti et ont proposé de rejeter l'initiative sans contre-projet.
«Précipitée, pas mûre, unilatérale»
Viola Amherd s'en est déjà pris au ministre de l'Énergie, comme le prouvent des documents internes à l'administration que Blick a obtenus sur la base de la loi sur la transparence. «De notre point de vue, il n'y a aucune raison de proposer de manière précipitée la levée de l'interdiction de nouvelles centrales nucléaires», a répondu son secrétariat général lors de la consultation des offices. Il n'a pas apprécié le projet de discussion: l'exposé d'Albert Rösti «n'est pas mûr et ne présente la situation complexe que de manière très unilatérale».
Et elle a relevé des contradictions. Ainsi, l'Office fédéral de l'énergie d'Albert Rösti a déclaré dans son document qu'il était «très incertain» que le courant nucléaire supprimé puisse être compensé par des énergies renouvelables. Pour affirmer en même temps: «Si les projets correspondants peuvent être mis en œuvre dans une mesure suffisante, une telle compensation n'est pas totalement absurde.» Selon le ministère de la Défense, il manque dans le dossier une appréciation de l'augmentation des énergies renouvelables obtenue jusqu'à présent.
Opposition des conseillers fédéraux PS
Viola Amherd n'est pas restée seule dans sa critique, les conseillers fédéraux socialistes ont également marqué leur opposition. «Avec un contre-projet indirect, le Conseil fédéral donne un mauvais signal et suscite de faux espoirs», a jugé le secrétariat général de Beat Jans.
Albert Rösti réduit ainsi la pression en faveur du développement des énergies renouvelables et augmente l'incertitude quant aux investissements dans les énergies vertes. «Comme il n'est pas réaliste de construire à temps une nouvelle centrale nucléaire, freiner le développement des énergies renouvelables est d'autant plus fatal.»
La ministre de la Santé, Elisabeth Baume-Schneider, a mis en garde contre les risques environnementaux et financiers liés à l'énergie nucléaire. En se référant à la guerre en Ukraine, elle a également précisé que les centrales nucléaires représenteraient un risque élevé en cas de conflit ou si elles étaient la cible d'attentats terroristes.
Des divergences au Parlement
Au sein du Conseil fédéral, les tensions ont été vives. Lorsque Albert Rösti a présenté le dossier à ses collègues à la mi-août, une conférence de presse était déjà prévue. Mais l'équipe l'a rappelé à l'ordre et lui à demander de clarifier encore quelques points. Deux semaines plus tard, l'UDC s'est finalement imposé dans ce conflit.
Albert Rösti doit mettre un projet en consultation d'ici à la fin de l'année. La résistance du Parlement est d'ores et déjà programmée. Mais l'alliance bourgeoise UDC/PLR, déjà victorieuse au Conseil fédéral, défendra la mesure corps et âme. Le PS, les Vert-e-s et les Vert'libéraux feront eux bloc pour maintenir l'interdiction de construire de nouvelles centrales nucléaires. Et le Centre défendra majoritairement la sortie du nucléaire mise en place par son ancienne conseillère fédérale Doris Leuthard.
Des dissidents des deux côtés pourraient toutefois donner lieu à une décision serrée. Mais qu'il s'agisse d'une initiative ou d'un contre-projet, ce sont les électeurs qui trancheront en fin de compte sur la question.