Depuis le début de la guerre en Ukraine, tout a changé. L'armée suisse veut retrouver le plus rapidement possible une capacité de défense de haut niveau. Les forces aériennes, très vulnérables, sont les premières concernées. Celles-ci ne disposent plus que de trois aérodromes sur lesquels sont stationnés tous les avions de combat: à Payerne (VD), Emmen (LU) et Meiringen (BE).
Mais cette concentration des forces met l'armée suisse dans une position de fragilité. Car en cas d'attaque ciblée, les dégâts seraient importants, explique le chef des Forces aériennes Peter Merz. Les Forces aériennes ont donc besoin de plus d'options.
Des nouvelles alternatives sont actuellement en phase de test. Mercredi prochain, des avions de combat F/A-18 atterriront et décolleront sur l'autoroute A1 entre Payerne et Avenches, dans le canton de Vaud. L'exercice, surnommé «Alpha Uno», a pour objectif de vérifier si l'engagement des avions de combat à partir de sites improvisés, où l'infrastructure habituelle fait souvent défaut, est possible. Les Forces aériennes veulent pouvoir répartir en très peu de temps les hommes et le matériel dans tout le pays afin de réduire la concentration à risque de la flotte.
Les automobilistes agacés de la fermeture de l'autoroute?
Mercredi prochain vers 10 heures, quatre F/A-18 se poseront sur l'A1. Ils seront ensuite ravitaillés en carburant et préparés pour le décollage. L'après-midi, une deuxième vague devrait atterrir et décoller. Le tronçon d'autoroute sera spécialement transformé en piste pour l'exercice. La glissière de sécurité centrale doit notamment être démontée. Le tronçon de l'A1 sera donc fermé de mardi 21 heures à jeudi matin 6 heures.
Fermer l'autoroute en milieu de semaine? Les automobilistes risquent d'être agacés. L'Office fédéral des routes (OFROU) s'est montré rassurant: «En semaine, environ 23'500 véhicules circulent en moyenne sur le tronçon routier concerné.» Comparé à d'autres tronçons de l'A1, le volume de trafic est plutôt faible, selon l'OFROU. Le trafic sera dévié par le réseau routier cantonal et le terrain d'exercice bouclé à grande échelle.
Ce concept d'atterrissage a été abandonné après la guerre froide
Faire décoller et atterrir des avions de combat sur des autoroutes n'est pas une idée qui date d'hier. Dès la fin des années 1950, en pleine guerre froide, le réseau des routes nationales avait été préparé en conséquence. Les scénarios de menace de l'époque considéraient également les pistes d'atterrissage des aéroports comme une zone à risque. Si ces dernières avaient été détruites par d'éventuels combats, elles auraient été rendues inexploitables et les avions n'auraient plus pu y décoller ni y atterrir.
Plusieurs tronçons d'autoroute ont été conçus de manière à pouvoir servir de piste d'atterrissage d'urgence. Elles ont été construites en ligne droite et sont équipées de glissières de sécurité centrales faciles à démonter. Les pistes s'étendent sur des distances d'environ deux kilomètres. En 1970, un premier exercice a eu lieu dans le canton de Soleure entre Oensingen et Härkingen. Le dernier exercice a eu lieu en 1991, au Tessin. Après la réforme Armée 95, le concept de pistes d'atterrissage sur autoroute a été abandonné – jusqu'à aujourd'hui.
L'armée doit à nouveau se former sur les procédures à connaître pour de telles manœuvres. Pour cela, des groupes d'aérodromes mobiles ont été mis en place. Ces derniers sont en mesure de transformer une autoroute en piste d'atterrissage et de décollage, de l'exploiter et de la surveiller. Parallèlement, l'armée est actuellement à la recherche des sites en Suisse qui peuvent être réaménagés en aérodromes militaires temporaires en peu de temps. Les lieux concernés restent inconnus et ne seront activés qu'en cas de besoin de défense. Le chef de l'armée de l'air Peter Merz a toutefois promis une chose: «Nous n'installerons pas de tours de contrôle le long de l'autoroute.»