Collaboration du géant orange avec Socar
L'argent des croissants de Migrolino part-il en Azerbaïdjan?

Une pétition en ligne demande à Migros de mettre fin à sa collaboration avec Socar. Les parties en conflit se sont maintenant rencontrées à Zurich pour un sommet de crise. L'unanimité n'est pas de mise.
Publié: 03.02.2023 à 10:09 heures
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Dernière mise à jour: 03.02.2023 à 10:17 heures
Migros est accusé de faire le beurre d'un dirigeant autoritaire de l'Azerbaïdjan.
Photo: KEYSTONE
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Nicola Imfeld et Sarah Frattaroli

Migrolino veut-il forcément dire Migros? Pas nécessairement. Il s'agit bien d'une filiale de Migros, mais elle collabore également avec Socar, cette fameuse compagnie pétrolière nationale d'Azerbaïdjan.

En Suisse, 200 stations-service sont actuellement sous la houlette du géant d'Azerbaïdjan. Parmi elles, 60 disposent d'un shop de station-service Migrolino. Mais la marque suisse n'exploite pas ces shops. Bien qu'elles soient approvisionnées en produits Migrolino et que son logo soit apposé sur les magasins, les employés sont bien à la solde de Socar.

Comment cela se fait-il? La compagnie pétrolière dispose de ce que l'on appelle un contrat de franchise. C'est-à-dire que le bénéfice de la vente de croissants suisses revient à Socar. Autrement dit, l'argent des petites pâtisseries part tout droit en Azerbaïdjan.

Ce partenariat entre Migros et Socar existe depuis dix ans. Et il suscite régulièrement des critiques. Mais à la fin de l'année 2022, elles ont pris une nouvelle tournure: l'Association Suisse-Arménie (ASA) a lancé une pétition demandant à Migros de mettre fin à son partenariat avec Socar.

Migros soutient-elle un belliciste?

Lundi dernier, une rencontre au sommet a eu lieu. La délégation de la société, composée entre autres du conseiller aux Etats socialiste Carlo Sommaruga et du conseiller national centriste Stefan Müller-Altermatt, a rencontré la direction générale de la Fédération des coopératives Migros à Zurich.

Comment le géant orange se défend-il? Migros balaie simplement d'une main ces remarques. La marque suisse parle d'un échange «constructif» et «amical». Mais l'ASA ne veut rien savoir. Elle a envoyé ce mardi — le lendemain de la rencontre — un communiqué de presse. Son titre: «Selon Migros, la menace de génocide n'est pas une raison suffisante pour résilier les contrats avec Socar.»

La critique principale: par ce partenariat, Migros ferait le beurre du dirigeant autoritaire de l'Azerbaïdjan, Ilham Alijew. Celui-ci est considéré comme un fauteur de guerre dans la région du Haut-Karabagh, à la frontière avec l'Arménie. Rappelons que les combats ont repris pour la dernière fois en septembre. Et Socar est non seulement entièrement détenu par l'Etat azerbaïdjanais, mais il se livre aussi parfois à une propagande massive, par exemple via sa page Facebook.

Migros ne dispose d'aucun contact en Azerbaïdjan

Interrogé sur le communiqué de presse de l'ASA après le sommet, le porte-parole de Migros, Marcel Schlatter, a accepté de s'exprimer. «Ces reproches ne sont pas nouveaux — et ils ne sont pas surprenants», admet-il.

Selon lui, la raison en est simple: ces parlementaires suisses représentent les intérêts de la partie arménienne en conflit en Suisse. Ils veulent leur donner une voix forte par le biais du lobbying politique et du travail médiatique.

Mais Migros ne disposerait d'aucun contact avec l'Azerbaïdjan, assure-t-il. «En ce qui concerne le conflit entre l'Arménie et l'Azerbaïdjan, nous nous basons — comme toujours dans de telles situations — sur l'ordre juridique en vigueur.»

L'ASA ne veut pas accepter le «brouillage des intérêts commerciaux au détriment des violations des droits de l'homme». L'association souligne donc une nouvelle fois sa demande: les contrats avec Socar doivent être résiliés. Et au cours des deux derniers mois et demi, à peine 10'000 personnes ont signé la pétition en ligne.

Le porte-parole de Migros Schlatter poursuit: «La fixation de sanctions se fait par voie politique au Parlement. A cet égard, les parlementaires ont, parmi les pétitionnaires, une influence bien plus grande que Migros, dont le rôle dans ce conflit vieux de plus d'un siècle est totalement surestimé.»

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