Pour les propriétaires de maisons individuelles, la situation devient de plus en plus inconfortable. En effet, depuis que la Banque nationale suisse (BNS) a relevé son taux directeur de manière surprenante, le faisant passer de -0,75 à -0,25%, plus d'un propriétaire de maison craint pour son logement.
Dans son dernier rapport sur la stabilité financière, la Banque nationale suisse affirme qu'avec un taux hypothécaire de plus de 3%, un ménage sur cinq possédant son propre logement ne pourrait plus satisfaire aux règles de viabilité. Blick répond aux principales questions qui se posent aux propriétaires quant à l'évolution des taux d'intérêt.
Que signifie la notion de capacité financière? Il y a des années, les instituts de financement ont eux-mêmes durci l'octroi des hypothèques et introduit ce que l'on appelle les coûts calculés. Selon cette règle générale, les coûts des intérêts, de l'entretien et de l'amortissement ne devraient pas représenter plus d'un tiers du revenu.
Qui sont les propriétaires immobiliers concernés? Il s'agit le plus souvent des ménages dont les revenus ont baissé depuis la prise de la dernière hypothèque. Par exemple, parce que les personnes ont pris leur retraite entre-temps. Il peut aussi s'agir des ménages à double revenu, dont les propriétaires sont âgés de 30 à 40 ans. Ceux-ci achètent un appartement ou une maison et réduisent ensuite leur temps de travail avec l'arrivée d'un enfant. De nombreux cas sont également dus à des exceptions des banques lors de l'octroi des hypothèques.
Les banques ont-elles été trop souples dans l'octroi des hypothèques? Les fournisseurs d'hypothèques ont souvent fermé les yeux sur les règles de capacité financière. «Selon nos analyses, plus d'un financement hypothécaire sur trois est désormais conclu dans le cadre de ce que l'on appelle une exception à la politique», explique Martin Tschopp, CEO de Moneypark. Les banques relâchent surtout la bride pour les acheteurs de maisons aux revenus élevés, à partir de 180'000 francs, comme le montre une analyse du service de comparaison en ligne.
Un cinquième des ménages ne pourra-t-il bientôt plus financer son logement? Le revirement des taux d'intérêt empêche surtout les débiteurs hypothécaires de dormir. Ceux-ci doivent remplacer leurs hypothèques arrivant à échéance avec un taux d'intérêt de 3% ou plus. «Environ 85 à 90% des propriétaires de logements ne sont pas directement concernés par des coûts d'intérêt plus élevés. Ils ont des hypothèques à taux fixe qui continuent parfois à courir pendant de nombreuses années», souligne Martin Tschopp. Les propriétaires ont donc le temps de réagir pour continuer à remplir les critères de viabilité. Et même si cela n'est pas possible: «Les retraités, en particulier, disposent souvent d'un patrimoine qui leur permet de supporter sans problème leur logement, même avec des taux d'intérêt plus élevés», complète Adrian Wenger, conseiller en hypothèques chez VZ Vermögenszentrum, un prestataire financier dont le siège est à Zurich.
Pour qui la situation devient-elle vraiment tendue? Les ménages sans réserves qui se sont endettés jusqu'à la limite de leurs capacités. «Les premiers à rencontrer des problèmes seront les jeunes nouveaux acquéreurs», affirme Adrian Wenger. Beaucoup d'entre eux sous-estimeraient les frais annexes et l'entretien des appartements ou des maisons. «Celui qui payait auparavant un loyer de 2500 francs par mois et qui achète ensuite un bien immobilier plus ancien pour un million, paie soudain 20'000 à 30'000 francs par an rien que pour l'entretien», continue Adrian Wenger. A cela s'ajoute le prix élevé de l'énergie.
Va-t-on assister à un déluge de saisies immobilières? C'est peu probable. Il n'y en a pas eu non plus lors de la crise immobilière du début des années 1990. L'inflation élevée de l'époque avait fait grimper le niveau des taux d'intérêt à plus de 7%. «Dans cette situation, il s'est avéré que de nombreux propriétaires de logements ont d'abord limité leurs dépenses de consommation, comme les vacances ou la voiture, avant de ne plus payer les intérêts hypothécaires», explique Martin Tschopp.
Les banques pourraient-elles même exiger un remboursement partiel de l'hypothèque? C'est très improbable. Selon Martin Tschopp: «Tant que le preneur d'hypothèque paie correctement les intérêts d'une hypothèque, la banque ne vérifie normalement pas la valeur du bien.» Le contrôle a lieu à l'échéance de l'hypothèque fixe. Si l'hypothèque représente alors plus des deux tiers de la valeur actuelle du logement, des amortissements dits obligatoires sont dus.
Où les prix des logements en propriété baissent-ils? Dans les régions rurales et les petites villes, on a assisté aux premières baisses de prix cette année. Selon le dernier rapport de la BNS sur la stabilité financière, les prix des maisons sont surévalués de 10 à 35% sur plusieurs années si l'on compare leur évolution à celle des salaires, du produit intérieur brut ou des taux d'intérêt. Mais Martin Tschopp relativise: «Depuis la pandémie, l'importance de la maison individuelle s'est encore accrue. La demande est durable.»
Combien coûte actuellement une hypothèque à taux fixe sur 10 ans? Chez les prestataires les plus avantageux, les acheteurs bénéficient d'un taux d'intérêt à partir de 2,26%. Selon le portail de comparaison Comparis, il faut débourser 3,16% auprès de Credit Suisse, de la Banque cantonale de Zurich ou de la Banque Valiant. Raiffeisen demande même 3,24% et Postfinance 3,25%. Il y a douze mois, le taux d'intérêt pour une hypothèque fixe sur 10 ans était encore de 1,2%.
Quels sont les prestataires qui vendent le plus d'hypothèques en Suisse? Avec une part de 17%, Raiffeisen est le plus grand fournisseur sur le marché hypothécaire. UBS et Credit Suisse représentent ensemble 25% du marché et les banques cantonales 36% au total.
(Adaptation par Thibault Gilgen)