Edith Lehner est en entièrement dévolue à son métier de gardienne de refuge. Cela fait désormais six ans qu'elle et son mari dirigent une équipe de 14 personnes pour gérer la cabane Hörnli – sans doute la plus connue au monde – qui se situe au pied du Cervin à Zermatt (VS).
Un travail de rêve pour Edith Lehner, mais l'ambiance est morose. «Le manque de respect est parfois inconcevable», déplore-t-elle dans un entretien avec Blick.
Son témoignage ressemble à celui de Claudia Freitag, gardienne de la cabane du Muttsee, sur les hauteurs de Linthal (GL). Après quatre ans, Claudia Freitag jettera l'éponge à la fin de la saison.
Dans les Alpes glaronnaises aussi, les clients sont le problème. Ils ne connaissent pas la différence entre un bistrot dans la vallée et une cabane, a-t-elle expliqué au «Glarner Nachrichten». Elle aussi déplore le manque de respect des hôtes pour les conditions particulières de la haute montagne.
Un travail colossal en cuisine
Pourtant, les refuges en Suisse essaient d'offrir à leurs hôtes le plus grand confort possible. Au refuge Hörnli, perché à 3260 m d'altitude, 150 montagnards peuvent passer la nuit dans des chambres confortables, l'époque des dortoirs avec des matelas affaissés est révolue depuis longtemps. Il y a des douches, le wifi, des chambres à deux lits, des salons et beaucoup d'espace – l'ambiance de la cabane rappelle effectivement un peu celle d'un hôtel.
«Nous aimons nos hôtes, nous faisons tout pour qu'ils se sentent aussi bien que possible, le cas échéant pour qu'ils atteignent le sommet du Cervin», explique la gardienne de la cabane. On le voit: elle est fière de son métier, de l'offre et du service qu'elle et son équipe peuvent proposer.
Cela comprend également la prise en compte des souhaits alimentaires des hôtes. Que ce soit végétalien, sans gluten ou sans lactose, sans viande de porc: le menu de la cabane Hörnli offre des plats pour tous. «Nous employons des cuisiniers qualifiés pour que tout soit parfait en matière d'alimentation», explique Edith Lehner.
Sur ce point aussi, rien ne doit entraver la réussite des hôtes au sommet. L'équipe du refuge Hörnli prépare jusqu'à 400 repas par jour. «Cela nécessite une planification, des gens motivés et beaucoup de flexibilité.»
Un minorité bruyante et fatiguante
Mais ceux qui pensent que l'énorme effort est apprécié par tous les hôtes se trompent. Edith Lehner déclare: «Bien sûr, le contact avec la plupart d'entre eux est très agréable. Mais il y a aussi les autres – ceux qui n'apprécient pas ce que nous faisons ici en haut.»
C'est à ces hôtes que Edith Lehner fait allusion lorsqu'elle parle de manque de respect. Les exemples sont choquants. «Chaque jour, il y a des clients qui disparaissent sans payer», explique la gardienne de la cabane. Cela concerne surtout ceux qui se rendent sur place pour un déjeuner.
Mais à l'intérieur de la cabane aussi, les choses se passent parfois de manière assez indélicate. «Les déchets laissés dans les toilettes sont parfois tout simplement indécents», s'énerve la gardienne de la cabane. Qu'il s'agisse d'excréments à côté des toilettes ou de serviettes hygiéniques usagées collées au mur: l'équipe de la cabane doit régulièrement nettoyer des salissures inutiles. «Bien sûr, nettoyer fait partie du travail, mais salir volontairement, c'est inacceptable», regrette Edith Lehner.
Dans les chambres aussi, certains clients manquent de civisme. Les déchets ne sont pas jetés dans les nombreuses poubelles, alors que c'est obligatoire, et certains hôtes n'utilisent pas de sac de couchage de cabane. «Ils nous mentent en face quand nous demandons.» Le sac de couchage de cabane a pourtant de bonnes raisons: Il sert d'une part à l'hygiène et d'autre part à la protection des draps, car il n'y a pas de possibilité de lavage dans les cabanes.
Pas une bonne publicité pour le travail
Les problèmes sont également fréquents après les heures de repas. En principe, les hôtes devraient débarrasser eux-mêmes leurs tables – ce qui est tout à fait commun dans les cabanes de montagne en Suisse. «Mais dans de nombreux cas, la vaisselle est tout naturellement laissée sur place. Cela rend la vie du personnel très difficile», dit Edith Lehner, qui ajoute: «Nous sommes une cabane de montagne, pas un hôtel.»
Pourtant, même sans clients irrespectueux, le travail est déjà suffisamment exigeant. Les journées sont longues, les nuits courtes. «C'est un travail magnifique, mais qui exige une bonne dose de pragmatisme», explique Edith Lehner. La famille est loin, on pourrait gagner nettement plus dans la vallée.
Une autre ombre plane sur la cabane
A cela s'ajoute le fait que l'équipe de la cabane Hörnli est souvent confrontée à la mort. Régulièrement, le Cervin fait des victimes. Les proches viennent alors à la cabane pour faire leur deuil. Il arrive que les membres de l'équipe connaissent même personnellement les victimes, par exemple lorsqu'un guide de montagne est concerné.
Edith Lehner explique: «Nous devons nous en remettre, mais en même temps faire notre travail. Il n'y a pas besoin de problèmes supplémentaires avec les clients. Ce genre de choses nous épuise.» Ce faisant, les problèmes augmentent. Avec des conséquences fatales.
Edith Lehner semble inquiète: «Si l'on fait trop d'expériences négatives, on finit par ne plus avoir envie de faire son travail.» La gardienne de la cabane Hörnli pense que le cas de la gardienne glaronaise n'est qu'un début. «D'autres jetteront l'éponge, ou alors il ne sera plus possible de trouver des successeurs.»
En d'autres termes: les clients irrespectueux menacent très directement la tradition des cabanes de montagne suisses. Une tradition qui risque de s'éteindre petit à petit si cela continue comme ça.