Bientôt un changement?
Son bébé meurt à la naissance et son congé paternité s'envole

Si l'enfant meurt à la naissance, le droit au congé de paternité s'envole. Fabian Lämmler ne l'a appris que peu de temps après avoir perdu son fils à l'hôpital. Le Conseil national pourrait désormais accorder aux pères plus de temps pour faire leur deuil.
Publié: 07.06.2024 à 06:05 heures
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Dernière mise à jour: 07.06.2024 à 07:50 heures
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Peu après sa naissance, le fils de Fabian Lämmler est décédé à l'hôpital. Le prunier du jardin est là en souvenir.
Photo: Philippe Rossier
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Céline Zahno et Philippe Rossier

Dans le jardin de Fabian Lämmlere, le prunier est déjà garni de petits fruits. Son jardin situé entre les collines de l'Appenzell est protégé par une clôture en bois. C'est là qu'il a planté l'arbre fruitier en souvenir de son fils. Le père n'a pas pu ramener le petit Noah de l'hôpital après sa naissance.

Noah est né le 6 janvier 2023 après une opération d'urgence, quelques semaines trop tôt. Il a réussi à respirer tout seul, tout semblait bien se dérouler, malgré des soupçons d'une infection bactérienne. Peu de temps après, les bactéries ont provoqué une septicémie. L'état de santé de Noah s'est rapidement détérioré, malgré trois antibiotiques différents.

Aujourd'hui, Fabian Lämmler en est sûr: si l'ordre des médicaments avait été différent, le prunier ne serait peut-être pas dans le jardin aujourd'hui. Et Noah serait encore en vie. «Le premier médicament n'a pas été efficace. Les autres auraient peut-être fait effet à temps. Mais c'est la loterie. C'était tout simplement de la malchance», se remémore-t-il. Mais à l'époque, plus rien n'a de sens pour lui.

La mort d'un enfant met fin au congé de paternité

Avec la mort de son fils, c'est aussi le congé de paternité de Fabian qui s'envole. «Je suis tombé des nues.» Même les médecins de l'hôpital cantonal ne savaient pas ce qui s'appliquait lors de ce genre de drame. Mais la loi est claire: Fabian Lämmler devait retourner au travail après les trois jours de congé accordés en cas de décès d'un proche.

Une lacune dans la loi, selon le père. «J'avais besoin d'être à la maison», se confie-t-il. Sa femme a dû rester à l'hôpital après l'opération, il a dû s'occuper lui-même de sa fille. Et se procurer un certificat de décès, organiser des funérailles, clarifier les prestations des caisses d'assurance maladie. «On retombe toujours dans ses travers. On se débat.»

Le Parlement s'active

La conseillère nationale des Vert-e-s Greta Gysin souhaite accorder plus de temps de deuil à Fabian Lämmler. Lui et d'autres pères devraient avoir droit à dix jours de congé paternité si l'enfant décède peu avant ou à la naissance. Cette condition est d'ailleurs déjà appliquée pour les mères. Elles obtiennent un congé de maternité si l'enfant meurt à partir de la 23e semaine de grossesse.

Fabian Lämmler n'est pas seul dans cette situation. En 2022, 607 enfants sont morts à la naissance ou peu après. Le centre kindsverlust.ch estime que la requête de Greta Gysin est d'autant plus importante. «Devoir immédiatement reprendre le travail après la perte de son propre enfant peut engendrer une pression énorme», explique la conseillère Anne Siegenthaler. Tout le monde ne peut pas se permettre de prendre un congé non payé et espérer un arrêt maladie du médecin ne peut pas être une solution.

Le Conseil fédéral s'y oppose

Selon le rapport de la commission compétente du Conseil des Etats, un droit au congé paternité en cas de décès d'un enfant devrait entraîner des coûts supplémentaires de 1,3 million de francs. Travailsuisse, l'organisation faîtière des travailleurs, estime que cela est tout à fait justifiable. Il y a assez d'argent, c'est une question de priorités. Les pères et les mères doivent avoir le même droit de faire leur deuil.

Le Conseil fédéral voit les choses différemment. Le congé de paternité sert à ce que le père puisse s'intégrer dans la nouvelle situation familiale. Cela n'est pas nécessaire après le décès d'un enfant. En revanche, la mère doit se reposer physiquement.

Le Conseil des Etats a tout de même approuvé la demande de Greta Gysin en mars. Il lui a même donné plus de poids: le congé de paternité doit être garanti même si l'enfant décède jusqu'à deux semaines après la naissance. Tout est maintenant entre les mains du Conseil national. Il votera mercredi prochain, le 12 juin. S'il dit oui, le Conseil fédéral devra agir contre son gré.

Tout le village était triste

Fabian Lämmler a eu de la chance, un médecin l'a mis en arrêt maladie pendant une semaine. Sa femme et lui ont pu compter sur leur entourage. «Nous avons eu l'impression que tout le village était en deuil avec nous.»

Pour faire son deuil, le menuisier s'est donné une mission dès son retour au travail. Il a façonné l'urne funéraire de Noah. Il voulait réaliser lui-même la dernière demeure de son fils.

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