Ce n'est qu'un malheureux clic sur LinkedIn, mais il a déjà fait couler beaucoup d'encre et agité les pixels des principaux médias du pays. La semaine dernière, le chef de l'armée Thomas Süssli a mis un «like» sur une photo du ministre des Finances Ueli Maurer affublé de la chemise des désormais fameux «Freiheitstrychler».
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Ces «sonneurs de cloches», dont l'action avait déjà été saluée par Chistoph Blocher dans un passé récent, ont gagné en notoriété lors de manifestations non autorisées contre les mesures du Conseil fédéral. La photo sur LinkedIn était néanmoins affublée de la légende: «Ueli Maurer, le premier conseiller fédéral à se réveiller!»
Les réactions outrées ont été immédiates. Est-ce que le chef de l'armée est un coronasceptique? Après un conseiller fédéral, un haut gradé à la rescousse des sonneurs de cloche?
«J'ai appuyé par mégarde»
Thomas Süssli n'a pas attendu longtemps avant de tenter d'éteindre l'incendie, directement sur LinkedIn: «J'ai appuyé par mégarde en scrollant, ce matin», a-t-il expliqué, assurant de tout son soutien à la politique anti-Covid du gouvernement.
Parmi les enseignements de cet incident, un principal: l'impact des réseaux sociaux est immense. En 2021, un clic suffit pour se retrouver dans la tourmente et mettre en jeu sa réputation, quand bien même on est le chef de l'armée.
Viola Amherd en est consciente, et l'était déjà bien avant le malencontreux like sur LinkedIn. En janvier déjà, la ministre de la Défense a chargé ses sbires du DDPS d'examiner les règles «réseaux sociaux» de son département.
A la clé, un rapport daté du 18 août, que nos collègues du Sonntagsblick ont pu consulter. Ses auteurs suggèrent de faire évoluer l'approche du DDPS en ce qui concerne les réseaux sociaux. A commencer par la rédaction d'une stratégie «Quel canal pour quel public-cible?». Le 6 septembre, une semaine avant le raté de Thomas Süssli, la conseillère fédérale du Centre avait recommandé de mettre en place les conseils d'ici mi-2022.
Bientôt sur TikTok?
Selon les experts, les réseaux sociaux ne représentent pas qu'un risque pour l'armée — ils sont aussi une chance. Une étude de la «Milac», l'académie militaire de l'Université de Zurich, a conclu que la présence de l'armée sur les réseaux sociaux améliorait son image. La population considérerait l'institution comme plus proche d'elle et plus moderne.
L'objectif derrière l'offensive sur les réseaux sociaux est évidemment de motiver les citoyennes et citoyens à effectuer un service militaire. La cible est donc particulièrement les jeunes. Mais alors que l'armée possède 250 canaux sur Facebook, Instagram, YouTube et Twitter, elle est absente du réseau TikTok. «Nous aurions pensé que TikTok, là où se trouvent les jeunes actuellement, jouerait un rôle de premier plan», regrettent les auteurs du rapport.
L'armée va-t-elle bientôt lancer l'offensive sur le réseau de vidéos divertissantes? «Si nous sommes convaincus que TikTok peut générer une valeur ajoutée, nous allons l'envisager», explique Daniel Reist, porte-parole de l'armée.