Pierre-Yves Maillard — ou PYM, voire Pym-il-Sung — a ses petits secrets. Comme celui d’être plutôt apprécié à droite malgré son statut de figure de proue du socialisme et du syndicalisme en Suisse. Même du côté de Christoph Blocher et de l’Union démocratique du centre (UDC), on chante ses louanges et on l’envisage comme potentiel conseiller fédéral.
C’est ce qui ressort du prochain «Temps Présent», consacré à PYM et diffusé ce jeudi 26 septembre au soir sur la RTS. Blick a pu regarder l’émission d’une cinquantaine de minutes en exclusivité. Entre le passé et le présent, le documentaire suit à la trace le conseiller aux États vaudois, président de l’Union syndicale suisse (USS), encore vainqueur lors de la votation sur la réforme de la LPP dimanche.
Le plus puissant du pays, c’est Blick qui l’a dit
Blick avait qualifié Pierre-Yves Maillard de politicien «le plus puissant du pays en 2024» au début de l’année. C’est pourquoi les équipes de «Temps Présent» se sont rendues dans nos locaux alémaniques, à la rencontre de la journaliste politique Sermîn Faki. Pour celle qui a couronné le Vaudois comme l’homme le plus influent du pays, l’élément central de la «méthode Maillard», c’est d’être un «deal-maker». Un faiseur de compromis.
Jusqu’à faire des arrangements avec l’UDC sur les accords bilatéraux avec l’Union européenne? Difficile à imaginer pour le syndicaliste socialiste, fervent opposant au parti de droite dure, populiste et nationaliste dans ses jeunes années.
Maillard parle de Blocher, et vice-versa
Une archive du 6 décembre 1992 dévoile un Pierre-Yves Maillard qui harangue la foule à Lausanne après le refus du référendum sur l’adhésion de la Suisse à l’Espace économique européen. «La Suisse de Christoph Blocher, ça ressemble à un cimetière des idées et des perspectives», assène le jeune homme engagé. «Nous, on n’a pas peur des étrangers, continue le tribun. Parce qu’on a appris à lire avec eux, parce qu’on a grandi avec eux, parce qu’on a joué avec eux.»
Mais que reste-t-il du jeune homme radical chez le socialiste d’aujourd’hui, considéré par certains comme «conservateur»? La presse alémanique met sur un pied d’égalité PYM et Christoph Blocher sur leur rhétorique, leur populisme et leur capacité à gagner presque en solitaire. Et le premier cite volontiers le deuxième lorsqu’on le questionne sur sa forte personnalisation dans la vie politique: «Blocher peut mettre 50 millions sur la table et s’acheter une campagne. Moi, je ne peux mettre que ma présence.»
Les caméras de la RTS se sont donc rendues dans la villa démesurée du milliardaire zurichois, leader historique de l’UDC. Pour l’ancien conseiller fédéral, Pierre-Yves Maillard est quelqu’un «avec qui on peut discuter, qui est ouvert» et qui, en cas de «deal», respectera sa parole si l’autre respecte la sienne. «Moi, j’aime ces politiciens-là», lâche l’homme politique à la retraite, du haut de sa stature de faiseur de rois.
Soutenu, il aurait renoncé à la consécration
On croirait au baiser du diable ultime, pour un socialiste. Mais pas pour le Pierre-Yves Maillard des temps modernes. Récent invité d’honneur par Blocher, à la grande foire de l’UDC Zurich, PYM dit lui-même avoir reçu des «appels du pied de l’UDC» pour devenir conseiller fédéral en 2020, lui qui avait échoué à l’investiture face à Alain Berset en 2011.
Mais le syndicaliste socialiste le répète à qui veut bien l’entendre: il a lâché l’affaire et ne sera plus candidat au Conseil fédéral. Mais quand notre confrère du service public lui demande si c’est un engagement qu’il prend, le conseiller aux États répond en bon Vaudois. «Si vous me faites jurer quoi que ce soit sur mon futur, je ne pourrai jamais le faire. Parce que par définition, le futur est impossible à prévoir», philosophe, un brin agacé, l’adepte du «ne jamais dire jamais».
Imaginez la puissance de frappe d’une alliance entre syndicats et UDC en votation, par exemple sur un sujet aussi crucial que l’Europe… Blick et «Temps Présent» en sont certains: Pierre-Yves Maillard est bien le politicien le plus puissant de ce pays.