Au frais en altitude
Comment la chaleur estivale fait revivre un petit village suisse

Grâce aux vagues de chaleur persistantes, les hôtels de montagne en Suisse n'ont pas connu l'effondrement tant redouté après la pandémie de Covid-19. En témoigne l'hôtel Solaria à Bivio dans les Grisons – l'une des localités les plus fraîches de Suisse.
Publié: 11.08.2022 à 06:12 heures
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Dernière mise à jour: 12.08.2022 à 09:27 heures
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Moins de 25 degrés sous le soleil de midi à Bivio dans les Grisons: l'hôtelier Gregorio Torriani en profite.
Photo: fotoswiss.com/cattaneo
Levin Stamm

Un petit vent agréable souffle sur la route principale de Bivio (GR). Même peu avant midi, le thermomètre n'indique pas plus de 19 degrés. La température dans ce village de 217 âmes contraste fortement ces jours-ci avec celle de la plaine, accablée de chaleur.

La température est enregistrée un peu en dehors du village, qui se trouve à près de 1800 mètres d'altitude. C'est là, juste à côté de la route du col du Julier, que se trouve l'une des 151 stations de mesure exploitées par Météo Suisse. En juillet, elle a enregistré une température moyenne de 13,5 degrés. Soit la valeur la plus basse de toutes les stations situées à proximité d'un village ou d'une ville. Bivio est l'une des localités les plus fraîches de Suisse en cet été caniculaire 2022.

L'effondrement redouté ne s'est pas produit

Il n'y a pas de centre du village à Bivio. En revanche, il y a une route de transit qui, depuis des décennies, conduit à Saint-Moritz (GR), en passant par le col du Julier. L'hôtel Solaria se trouve à moins de cent mètres de là. Gregorio Torriani, le directeur de l'hôtel, arrange tranquillement les coussins de sa terrasse. Il n'y a personne, mais les apparences sont trompeuses. «Notre hôtel est complet en ce moment. Pratiquement tous les clients sont en train de faire de la randonnée en montagne», explique-t-il.

Gregorio Torriani est soulagé. Avant le début de la saison estivale, les hôteliers des vallées grisonnes craignaient - maintenant que les frontières avec l'étranger sont à nouveau ouvertes sans restriction - un effondrement du nombre de clients. C'est le contraire qui s'est produit, grâce aux habitants de la plaine qui fuient la chaleur.

Les associations hôtelières le confirment à Blick: les régions de montagne renouent avec le succès des dernières années grâce aux Suisses restés au pays. «Lorsque les températures dépassent les 30 degrés en plaine, nous sommes sur le qui-vive», déclare Gregorio Torriani. En comparaison avec la saison précédente qui battait déjà des records, son entreprise a augmenté son chiffre d'affaires de 20%.

«Le Tessin était trop chaud pour nous»

Peu après midi, les premiers clients reviennent à l'hôtel. Le thermomètre que Gregorio Torriani tient à la main n'affiche que 24 degrés, même sous le soleil de midi. En comparaison, Genève enregistre le même jour 38,3 degrés à l'ombre! C'est le record suisse de l'année.

La famille Bill, originaire de l'Emmental (BE), est assise sur la terrasse, de retour de sa randonnée matinale. «Nous avons récemment essayé de passer des vacances au Tessin, mais il faisait trop chaud pour nous», explique Kathrin Bill, 39 ans.

Les auberges pleines font plaisir à voir, pour les habitants de Bivio. Ici, une saison réussie était bien plus rare par le passé, contrairement à Saint-Moritz. En se rapprochant de la ville guindée, Bivio a voulu se tailler une part du gâteau, mais cela n'a jamais vraiment fonctionné les décennies précédentes. Aujourd'hui encore, le village a la réputation d'être un lieu de passage endormi - à tort, selon beaucoup. Il faut alors les prix bas et la chaleur du plateau pour que les gens apprécient enfin Bivio à sa juste valeur

Le «lieu de passage» revit

Gregorio Torriani représente la quatrième génération de patrons à l'hôtel Solaria. Il y a trois ans, il l'a repris de son père, Giancarlo. Ce dernier déclare fièrement: «Tous les hôteliers ne peuvent pas se vanter d'avoir vu leurs descendants reprendre leur entreprise.»

Et les descendants mettent les bouchées doubles. Près de l'ancien bunker militaire, sur une colline surplombant Bivio, ils installent une scène de concert et un chapiteau. Des jeunes organisent un open air de trois jours. Ils attendent environ 400 visiteurs qui fuient la chaleur et montent des tentes ou réservent une chambre d'hôtel dans le village.

«Le festival d'été le plus frais de Suisse!», annonce la co-organisatrice Marie-Hélène Froidevaux. Originaire de Wil (SG), elle vit dans la région depuis quelques années - notamment en raison des températures agréables en été. Elle n'est pas la seule de son âge à venir de la plaine et à apporter du sang neuf à la région. A Bivio, le nombre d'habitants a augmenté de 20% au cours des cinq dernières années, alors qu'il était en baisse constante auparavant.

«La saison d'été devient de plus en plus prospère»

Gian-Marco Thomann a rejoint l'effort pour repeupler Bivio. Avec l'hôtelier Gregorio Torriani et d'autres amis, il a ramené un magasin de sport au village en 2019. Autrefois, l'accent était entièrement mis sur la saison d'hiver, mais désormais, les températures plus chaudes ont changé la donne. Les vélos et chaussettes de randonnée sont devenus une source de revenus importante. «La saison d'été a un énorme potentiel, elle devient de plus en plus prospère», dit-il.

Des jeunes, une vie de village animée, le retour de l'artisanat et de commerces, et surtout les nombreuses personnes qui fuient la chaleur: à Bivio, on a su transformer un endroit autrefois ignoré en perle de la région.

(Adaptation par Lliana Doudot)


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