«La décision de classement doit être annulée. Nous estimons qu'il doit y avoir au minimum un procès public», a déclaré Me Christophe Tafelmacher, avocat de la mère de Lamin Fatty, mort en cellule après avoir été arrêté par erreur. Il confirmait mardi des informations de la RTS.
Au vu des «graves négligences commises», l'avocat demande la mise en prévention de plusieurs médecins et policiers. Dans cette histoire complexe, «il y a énormément d'intervenants qui ont commis une série de négligences. Chacun d'entre eux aurait pu facilement rattraper l'erreur d'avant», souligne l'avocat.
Confondu avec un homonyme
Les faits remontent à l'automne 2017. Le 22 octobre au soir, le jeune Gambien qui vivait dans un foyer EVAM à Crissier (VD) se fait repérer à la gare de Lausanne pour une toute petite quantité de marijuana. Les garde-frontières impliqués dans son interpellation le confondent avec un homonyme qui devait être renvoyé à Lucerne, puis en Italie. «Lamin Fatty a ainsi été privé de liberté sans aucune justification légale», relèvent les recourants.
En raison de nausées et de vomissements, le jeune requérant d'asile, qui suivait un traitement pour une épilepsie grave, est emmené au CHUV pour des contrôles. Au terme de son hospitalisation, il est placé en détention dans la zone carcérale de la police cantonale sans qu'elle soit informée de sa maladie. «Cette absence d'informations a abaissé le niveau d'attention tant de l'infirmier que des agents de la zone carcérale», estime Christophe Tafelmacher.
Le 24 octobre au matin, alors qu'il est filmé en permanence par des caméras, le jeune homme est victime d'une crise d'épilepsie au centre de la police à la Blécherette qui dure environ 1h30. Il décède dans sa cellule, sans que personne n'intervienne. Un agent chargé de la vidéosurveillance sera prévenu d'homicide par négligence pour ne pas avoir remarqué cette crise.
Concours de circonstances
Selon l'ordonnance de classement approuvée par le Ministère public central le 15 novembre dernier, le décès de Lamin Fatty est dû à «une chaîne de malheureux concours de circonstances» sans qu'aucun comportement précis, en particulier celui du centraliste, n'ait joué un rôle direct et imputable à faute dans l'issue tragique.
Si à aucun moment, l'équipe médicale n'a communiqué avec les gendarmes qui escortaient le jeune homme au sujet de son état de santé et ses antécédents médicaux, le Parquet estime que les médecins du CHUV n'ont fait que respecter les directives sur le secret médical. «Il est indéniable qu'aucun lien de causalité ne peut être établi entre la prise en charge de Lamin Fatty au CHUV et son décès subséquent au centre de la Blécherette», écrit-il.
Ce recours intervient dans un contexte critique envers l'action de la police dans le canton. Plusieurs manifestations ont notamment dénoncé le racisme et les violences policières, suite à la mort du Congolais Hervé, en 2016 à Bex, du Nigérian Mike Ben Peter, en 2018 à Lausanne et du Suisse d'origine sud-africaine Nzoy en 2021 à Morges.