Après Al-Qaïda et Daech
La Suisse est-elle à vraiment deux doigts de classer le Hamas comme organisation terroriste?

Le ministre des Affaires étrangères PLR Ignazio Cassis souhaite interdire le Hamas au plus vite. Mais sur ce dossier, les avis divergent, y compris au sein même du Conseil fédéral. Pour quelles raisons? Blick fait le point.
Publié: 16.11.2023 à 11:32 heures
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Dernière mise à jour: 16.11.2023 à 11:51 heures
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Le conseiller fédéral PLR Ignazio Cassis veut faire avancer rapidement le dossier sur l'interdiction du Hamas.
Photo: keystone-sda.ch
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Ruedi Studer et Pascal Tischhauser

Le ministre des Affaires étrangères PLR Ignazio Cassis veut appuyer sur le champignon en interdisant dès que possible le Hamas par une loi urgente, comme l'ont rapporté le «Tages-Anzeiger» et différentes sources de Blick. «Le Conseil fédéral considère l'attaque du Hamas comme une attaque terroriste et classe donc le Hamas dans la catégorie des organisations terroristes», a souligné Cassis peu après l'opération du mouvement contre l'Etat hébreu du 7 octobre.

Entre-temps, les deux commissions de sécurité du Conseil national et du Conseil des États se sont également prononcées en faveur d'une interdiction de l'organisation palestinienne du Hamas et ont déposé des recours dans ce sens. Bref: la pression politique se fait de plus en plus forte.

Pourquoi Cassis appuie-t-il sur l'accélérateur?

Selon plusieurs informations, la volonté du conseiller fédéral d'interdire le Hamas n'est pas seulement d'envoyer un signal fort, mais aussi de mettre rapidement fin à la propagande de l'organisation palestinienne et lui couper les vivres. Dans le climat actuel de menaces terroristes, les enjeux sécuritaires sont importants.

Toutefois, une loi spéciale permettrait parallèlement de maintenir des liens diplomatiques avec le Hamas, de sorte que la Suisse conserve son rôle de médiateur.

Mais la course d'Ignazio Cassis a été stoppée net. Selon nos informations, le président de la Confédération Alain Berset a émis des réserves sur la procédure. La Constitution fédérale stipule en effet que les lois ne peuvent être déclarées urgentes que si leur entrée en vigueur «ne peut être différée».

Problème: y a-t-il vraiment «urgence»? La Suisse subirait-elle un préjudice si une interdiction du Hamas ne prenait effet qu'un an plus tard?

Si l'urgence est avérée, le Parlement ne devrait pas donner son feu vert avant la session de printemps 2024 pour qu'une interdiction soit ensuite mise en vigueur. Un éventuel référendum ne serait possible qu'a posteriori.

Dans le cadre de la procédure ordinaire, il faudrait même attendre au moins 2025 pour qu'une interdiction du Hamas puisse entrer en vigueur. Le Conseil fédéral doit maintenant décider du rythme qu'il juge approprié.

Quelles seraient les conséquences d'une procédure d'urgence?

Si les organisations terroristes islamistes Al-Qaïda et l'État islamique sont déjà interdites en Suisse depuis des années, l'interdiction du Hamas est, elle, couverte par des décisions des Nations Unies. Selon la loi sur le renseignement, il faut donc une prescription de l'ONU pour interdire une organisation.

C'est la raison pour laquelle des organisations comme le Parti des travailleurs kurdes (PKK) n'ont par exemple jamais figuré sur une liste d'interdiction en Suisse. Une «Lex Hamas» ouvrirait rapidement le débat sur la nécessité de déclarer rapidement illégaux d'autres organisations. Ce qui accentuerait la pression sur la Suisse pour durcir sa législation.

Enfin, l'interdiction du Hamas pourrait revenir sur le tapis lors des prochaines séances du Conseil fédéral, car s'agit d'une première lecture, simplement mise en pause par la visite d'Emmanuel Macron.

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