La Suisse fait partie des nations ayant le revenu par habitant le plus élevé au monde, et ça se voit. Malgré l'inflation, les Suisses se sont fait plaisir cette année pour les fêtes de fin d'année. Les achats de cadeaux ont été spectaculaires.
Pourtant, à la fin 2022, on voyait venir un troisième trimestre plutôt sombre. Le moral des consommateurs s'est effondré face à une économie mondiale en berne, une inflation galopante, une hausse des coûts de l'énergie et des primes d'assurance maladie.
«Économiser! Économiser! Économiser!», tel était le mot d'ordre. Mais ce que les consommateurs et consommatrices déclarent dans les sondages ne correspond pas forcément à la réalité. Du moins aux caisses des magasins, réelles ou virtuelles, où on ne ressent pas cette privation. Les achats de Noël en particulier, qui offrent à chaque fois aux détaillants les plus gros chiffres d'affaires de l'année, leur donnent de l'espoir comme jamais.
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Des Suisses prêts à consommer
Cette année, la population suisse se montre exceptionnellement encline à consommer. C'est ce que démontre une récente étude du cabinet d'audit et de conseil EY en Suisse. Selon leurs propres données, Monsieur et Madame Tout-le-monde ont l'intention de dépenser en moyenne 343 francs pour les cadeaux de Noël.
La valeur record atteinte l'année précédente (334 francs en 2021) augmente ainsi de 3%. Mais cette augmentation doit certainement beaucoup au genre des personnes interrogées. Les hommes étaient effectivement majoritaires. Et avec 375 francs en moyenne, ils ont révélé avoir l'intention de dépenser nettement plus que l'année précédente, où le budget était de 351 francs. En revanche, les femmes pensent dépenser environ 309 francs pour les cadeaux de Noël. Soit moins qu'en 2021, où elles parlaient d'un budget de Noël de 320 francs.
Ce qui étonne malgré tout le psychologue social et économique Christian Fichter. «Celui qui regarde le comportement des consommateurs avec les modèles économiques traditionnels n'y comprend sûrement plus rien.» Mais aussi irrationnelle que soit la fièvre acheteuse, des indicateurs positifs pousseraient selon lui actuellement à la consommation. «D'abord, la situation sur le marché du travail est bonne et les porte-monnaie sont pleins. C'est toujours le plus important dans les décisions d'achat. Deuxièmement, nos besoins de consommation demeurent malgré l'ambiance de crise. Et Noël est de toute façon sacré pour nous.»
Les Suisses ont encore de l'épargne
Effectivement, selon les enquêtes du Centre de recherches conjoncturelles (KOF) de l'Ecole polytechnique fédérale de Zurich (EPFZ), le taux d'épargne des ménages suisses a atteint un niveau record en 2020, année de la pandémie. Depuis, il est certes en baisse, mais au dernier trimestre, il se situe toujours au-dessus du niveau d'avant la crise: des économies qui sont désormais échangées contre des marchandises.
C'est également ce qu'observe Dagmar Jenni, directrice de la Swiss Retail Federation, l'association faîtière des grandes et moyennes entreprises du commerce de détail. «Pour la première fois depuis la pandémie, nous pouvons à nouveau faire du vrai shopping à Noël et nous puisons volontiers dans nos économies pour cela.» Selon elle, le commerce stationnaire était en hausse de 4,5% jusqu'à fin novembre et elle s'attend à nouveau à de très bons chiffres pour le mois de décembre.
Le plus grand magasin virtuel de Suisse, qui a réalisé un chiffre d'affaires de deux milliards de francs en 2021, ressent lui aussi l'enthousiasme des acheteurs. Seraina Cadonau, porte-parole de Digitec-Galaxus, peut l'expliquer. «Notre clientèle est d'humeur à acheter pour Noël. Elle est encore plus dépensière que l'année dernière.» Pour décembre, le commerçant en ligne s'attend en moyenne à plus de 50'000 colis envoyés par jour.
Deux fois plus de chiffre d'affaires
Le commerce de Noël est vraiment très important. En effet, de nombreux détaillants génèrent deux fois plus de chiffre d'affaires pendant les quatre semaines précédant Noël que durant un mois ordinaire. Mais cette année, les fêtes sont entachées par un sujet bien moins jovial: la menace d'une pénurie d'énergie. Celle-ci a entraîné une ruée durable sur les produits censés aider à économiser l'électricité, dont les compteurs d'énergie et les douchettes économiques jusqu'aux bougies. A la mi-décembre, les douchettes affichaient à elles seules une hausse de 1000% par rapport au même mois de l'année précédente.
Toutefois, après la fièvre acheteuse de la fin de l'année, une redescente menace. Selon le KOF, le PIB ne devrait plus augmenter que de 1% au premier semestre 2023. Certes, la consommation devrait aussi augmenter de 1,4% l'année prochaine, mais nettement moins que l'année qui s'achève avec une hausse d'environ 4%. Les détaillants devraient également en ressentir les effets.