La votation du 3 mars prochain s'annonce être un véritable casse-tête: l'initiative pour une 13e rente AVS, puisque 53% des personnes interrogées lors du nouveau sondage de la SSR se disent favorables à son introduction. La majorité des cantons sera aussi un point critique. Aujourd'hui une tendance au oui se dessinerait dans dix cantons et une tendance au non dans huit cantons. La course serait alors ouverte dans cinq cantons: Zurich, Grisons, Lucerne, Schaffhouse et Glaris.
La Suisse pourrait assister à un scénario semblable à celui vécu pour l'initiative «Entreprises responsables» de 2020. L'initiative populaire avait réussi à obtenir le oui du peuple avec 50,7%, mais avait finalement échoué à cause des cantons, à 8,5 contre 14,5.
Le projet pour une 13e rente rappelle l'initiative AVS Plus de 2016. Rappelez-vous: cette dernière demandait une augmentation des rentes de 10% – à l'époque, seuls cinq cantons l'avaient approuvée. L'initiative actuelle, en revanche, ne vise que 8,3% d'augmentation des rentes. Cette variante plus modérée portera-t-elle chance au camp du oui?
Sur l'AVS
12 cantons sur 23 doivent dire oui
Mais même si les initiants parviennent à convaincre les électeurs, il reste un élément clé à régler: la majorité des cantons. Pour que celle-ci soit atteinte, il faut qu'au moins 12 des 23 cantons approuvent l'initiative. Un oui semble clair dans les six cantons romands ainsi qu'au Tessin. Pour les partisans du oui, la bataille continue donc dans cinq cantons alémaniques. Et à moins de deux semaines de la votation, ce n'est pas le moment de lâcher.
Si l'on se fie au destin de l'initiative AVS Plus, c'est dans les deux cantons bâlois ainsi que dans les cantons de Schaffhouse, Soleure, Berne et Zurich que les pourcentages de oui ont été les plus élevés du côté alémanique. Bâle-Ville a frôlé la barre des 50% avec un résultat de 49,1%. Zurich, de son côté, en était loin, avec 38,3% de voix favorables.
Compenser la perte de pouvoir d'achat
La mission des initiants pour une 13e rente AVS n'est-elle pas finalement un combat perdu d'avance? «Non, la situation de départ est aujourd'hui très différente de celle d'il y a huit ans», estime Urban Hodel, responsable de la campagne pour le oui à l'Union syndicale suisse (USS)
L'augmentation des loyers, des primes d'assurance-maladie et des prix de l'énergie donneraient du fil à retordre à la population. La baisse des rentes des caisses de pension aussi. «La population en général et les seniors en particulier perdent du pouvoir d'achat, la 13e rente AVS permet de compenser cela, y compris pour les futurs retraités», argumente le responsable à l'USS.
Urban Hodel tient également à préciser ce qu'impliquerait un non: «Si l'initiative ne passe pas, la classe moyenne se retrouvera à nouveau sans rien.» Par ailleurs, aucun fossé entre la ville et la campagne n'est identifiable cette fois-ci. «A la campagne justement, de nombreuses personnes issues du milieu paysan et artisanal dépendent encore plus de l'AVS, car elles n'ont souvent qu'une petite caisse de pension, voire pas de caisse du tout», rappelle l'intervenant. Ce dernier est convaincu que l'initiative a donc de grandes chances de sortir gagnante dans les cantons ruraux.
61% de oui dans le premier sondage
Les sondages référendaires de la SSR prouvent par ailleurs que la tendance s'est inversée ces dernières années. Cinq semaines avant la votation, l'initiative AVS Plus avait recueilli 49% de oui, contre 40% dix jours plus tôt... pour finir à 41% le dimanche de la votation.
Il en va tout autrement pour la position de départ de la 13e rente AVS. Le deuxième sondage publié ce mercredi montre une baisse similaire à celle de l'initiative AVS Plus. Cependant, la 13e rente AVS devrait encore pouvoir compter sur une légère majorité populaire.
La mobilisation populaire sera décisive
Ces prochains jours marqueront la dernière ligne droite: les deux camps tenteront tous les deux de gagner du terrain comme ils peuvent. «Pour la majorité des cantons, ce sera serré, mais nous donnerons tout pour surmonter cet obstacle», clame Urban Hodel. «L'issue sera déterminée par le côté qui pourra mobiliser le mieux dans le sprint final.»
Le camp adverse, en revanche, mettra tout en œuvre pour faire capoter l'initiative opposée avec un double non du peuple et des cantons. «Tout autre résultat serait déplaisant», déclare le président des jeunes libéraux-radicaux Matthias Müller, qui se bat pour un âge de la retraite plus élevé avec son initiative sur les retraites.
Une chose est sûre: les opposants à la 13e rente tenteront une dernière fois d'attirer l'attention sur le trou de plusieurs milliards qui menace l'AVS. «Nous ne devons pas faire peser cette charge gigantesque sur les jeunes, avertit le président de droite. Si nous parvenons à écarter la 13e rente AVS, nous chercherons rapidement une autre solution pour offrir de meilleures rentes aux personnes à bas revenus.»
