Ses coachs réagissent
«Il ne pouvait rien m'arriver de mieux que d'entraîner Beat Feuz»

Même certains de ses proches n'étaient pas au courant des projets de retraite du skieur bernois Beat Feuz. Mais l'un de ses entraîneurs a fait un rêve très particulier la nuit précédant l'annonce.
Publié: 22.12.2022 à 14:22 heures
Manfred Widauer a longtemps entraîné Beat Feuz.
Photo: Sven Thomann
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Marcel W. Perren

Depuis des années, le principal interlocuteur de Beat Feuz au sein de l'équipe suisse de descente est un Autrichien. Il s'appelle Manfred Widauer. Le Tyrolien, qui vit près de Kitzbühel, s'occupe de «Kugelblitz» depuis 2014. Il est le co-entraîneur du patron de la vitesse Reto Nydegger — et pas seulement sur les pistes de ski. Lors des entraînements de remise en forme estival, Beat Feuz a déjà parcouru d'innombrables kilomètres sur son vélo de course, collé à la roue arrière de Manfred Widauer.

Dans la nuit de mardi à mercredi, le quinquagénaire — qui s'était jadis classé 4e aux Championnats du monde juniors de descente en 1992 — a fait un rêve prémonitoire: «Même si je ne savais rien de ses plans, j'ai rêvé que Beat annonçait sa retraite.» Au réveil, «Manni» n'a guère accordé d'importance à ce rêve, enfourchant son vélo pour quelques heures.

Son coach a versé quelques larmes

Mais il a ensuite reçu un message sur son téléphone portable, qui a fait de son rêve une réalité: «Beat m'a écrit qu'il mettait fin à sa carrière après la descente de Kitzbühel.» L'entraîneur de haut niveau, d'habitude si tranquille, a versé quelques larmes, sans retenue.

«En tant qu'entraîneur, il ne pouvait rien m'arriver de mieux que Beat, sanglote le père de famille. Lorsque je me suis entraîné avec lui pour la première fois en 2014, il ne savait pas, en raison des séquelles de sa grave infection au genou, s'il parviendrait encore une fois à se hisser au sommet de la hiérarchie mondiale. Mais aujourd'hui, Beat a remporté quatre Globes de descente, l'or aux Championnats du monde et aux Jeux olympiques, ainsi que de nombreuses autres courses, bien qu'il ait été régulièrement retardé par des blessures par la suite. C'est unique!»

«Ça manquait de prise de risques»

Rainer Salzgeber (vice-champion du monde de géant en 1993) a lui aussi fortement contribué à la carrière de Beat Feuz. En tant que boss chez le fabricant de skis Head, il équipe l'Emmentalois depuis 2012. Rainer Salzgeber a appris que le champion s'arrêtait peu avant que le public ne soit informé par un communiqué. Cette nouvelle ne l'a toutefois pas totalement surpris. «Samedi dernier, lors de la descente à Val Gardena, Beat a certes très bien skié sur le plan technique. Mais dans certains passages, on a vu qu'il manquait de prise de risques. Et c'est souvent le signe que quelque chose est en train de se passer.»

Et Beat Feuz donne raison à Rainer Salzgeber: «Repousser les limites et prendre des risques ont été pendant des années ma passion dans le ski de compétition. Mon intuition a souvent été la clé du succès. Mais maintenant, mes sensations me disent que les limites physiques sont atteintes.»

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«On le trouvait plus souvent en train de jouer au casino qu'en salle de musculation.»
Sepp Brunner
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C'est également l'impression qu'a eue en Italie le boss de la vitesse autrichienne, Sepp Brunner, qui a coaché Beat Feuz de 2006 à 2017. «Il ne m'a certes rien dit sur ses envies de retraite, mais j'avais l'impression qu'il n'était plus animé de la même flamme. Quand je lui ai proposé de venir s'entraîner avec nous sur la piste des Championnats du monde de 2025 à Saalbach pendant la première semaine de janvier, il n'a pas accepté.»

L'un des plus performants de l'histoire

Lorsqu'il repense à ses débuts avec Beat Feuz, Sepp Brunner ne peut s'empêcher de rire: «Durant ses premières années en Coupe du monde, Beat ne travaillait pas vraiment de manière très professionnelle. Au camp d'entraînement en Argentine, on le trouvait plus souvent en train de jouer au casino qu'en salle de musculation. Et quand il a concédé sept secondes sur les meilleurs lors d'un entraînement à Wengen, je lui ai dit qu'il ferait mieux de prendre le départ chez les femmes.»

Mais comme chacun le sait, Beat Feuz est devenu l'un des skieurs de vitesse les plus performants de l'histoire du ski alpin. Ses 16 victoires en Coupe du monde, entre descente et super-G, le placent parmi les plus grands. Il est l'un des six seuls skieurs de l'histoire (dont trois Suisses) à avoir signé le triplé JO-Mondiaux-Globe de cristal dans la catégorie reine de la descente. Et en plus, il s'est offert les deux mythes absolus de la discipline, le Lauberhorn à Wengen (BE) et la Streif à Kitzbühel (Aut). Un palmarès de légende!

Mais désormais, Beat Feuz se réjouit de pouvoir consacrer beaucoup plus de temps à sa compagne Katrin et à ses deux filles Clea et Luisa à partir de février. Mais d'ici là, le skieur de bientôt 36 ans veut encore tout donner en Coupe du monde. Dès la semaine prochaine à Bormio (It), puis lors de ses courses préférées à Wengen et Kitzbühel.

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