C'est à sa technique géniale que Joël Gaspoz doit son surnom de «Mozart du ski». En dehors des pistes, le Chablaisien s'est plutôt montré autant fou que le guitariste des Rolling Stones Keith Richards. La légende de la descente grisonne, Dani Mahrer, nous livre un témoignage particulier sur le style de vie de Joël Gaspoz: «Lors d'un séjour de Coupe du monde à Whistler Mountain, au Canada, j'ai partagé une chambre avec Gusti Oehrli. De la fumée de cigarette s'échappait constamment de la chambre voisine. Gusti et moi nous demandions toujours qui pouvait être cette personne qui fumait comme un pompier dans la chambre d'à côté. A la fin de la semaine, j'ai vu par hasard Joël Gaspoz et son pote fribourgeois Jacques Lüthy sortir de ce 'fumoir'.»
Agressé au Brésil
Hans Pieren, qui a longtemps été directeur des courses d'Adelboden, a lui aussi des souvenirs cocasses du vainqueur du classement général de la Coupe du monde de géant en 1985-86: «Lors des camps d'entraînement en Argentine notamment, il arrivait souvent que Joël ne se présente pas sur la piste le matin parce qu'il avait trop fait la fête la veille. Dans ces moments-là, il expliquait à chaque fois avec son magnifique accent romand qu'il souffrait d'un 'mal de cheveux'.»
Après un camp en Argentine, une escale à Rio de Janeiro s'est également terminée de manière très douloureuse pour Joël Gaspoz. «Les entraîneurs nous avaient dit à l'époque qu'en raison de la forte criminalité dans la métropole brésilienne, nous devions effectuer de courts trajets en taxi après la tombée de la nuit. Mais il va de soi que Joël n'a pas suivi ce conseil. Et il a dû en payer le prix», raconte Hans Pieren. Que s'est-il passé? «Joël a été pris en grippe par un gang de rue. Et comme il ne voulait pas donner son argent, l'un des gangsters l'a frappé avec une barre. Il en a résulté une énorme balafre sur son dos.»
Les chaussures de ski détachées
Le style de conduite de Joël Gaspoz en voiture était également légendaire, révèle l'ancien spécialiste de slalom de l'Oberland bernois Peter Aellig: «J'étais assis sur le siège du passager lorsque Joël a foncé comme un pilote de rallye sur une route de montagne à Adelboden. La voiture était vraiment en travers à chaque virage.»
Mais revenons plutôt au génie de Gaspoz sur la piste. «Joël était tellement un bon skieur qu'il nous battait à l'entraînement avec les boucles de ses chaussures de ski ouvertes», s'étonne encore Peter Aellig. Le résident de Morgins a remporté sept courses de Coupe du monde. C'est lors du slalom du Lauberhorn en 1987 que Joël a fêté son dernier grand triomphe.
La chute à Crans-Montana
Quelques semaines plus tard, Joël Gaspoz a plongé dans une profonde crise après avoir été éliminé lors du géant des championnats du monde à Crans-Montana, à quelques portes de l'arrivée, alors qu'il avait clairement réalisé le meilleur temps. «Jusqu'à ce moment-là, Joël était un jeune homme merveilleux. Mais son élimination à Crans-Montana l'a fait craquer mentalement», pense Bruno Kernen.
Joël Gaspoz a mis un terme à sa carrière en 1989, et depuis, il n'est apparu que très rarement en public. «Je sais que ce type a parfois eu de gros problèmes. Mais heureusement, il s'est très bien repris en main entre-temps», souffle Hans Pieren. Aujourd'hui âgé de 60 ans, Joël Gaspoz travaille dans l'immobilier.