À l'entrée de la maison suisse, un brasero grille des saucisses et des cervelas. Rien d'anormal. La présence de la fameuse croquante d'Ajoie, par contre, peut surprendre. Est-ce dû à la soirée jurassienne qui se préparait? Même pas. Le menu sera le même pour la suite de la quinzaine. Mais les drapeaux blancs à la crosse épiscopale rouge étaient suffisamment nombreux pour amplifier encore la sensation de se retrouver quelque part entre Saignelégier et Delémont. Ou à un match du HCA.
Mais c'était pour un événement plus inhabituel que de nombreux fans se sont agglutinés dans le jardin de l'Ambassade helvétique. Médaillée de bronze la veille, Audrey Gogniat était reçue en star à la maison suisse. «J'en ai marre d'utiliser ce mot, mais c'est extraordinaire, souffle-t-elle. Que le Conseiller fédéral soit là pour moi, Audrey Gogniat, qui vient d'un petit village au Noirmont.» Mais d'une sensation à l'autre, un dénominateur commun: le bonheur.
La visite du Conseiller fédéral
Sur scène, Audrey Gogniat a été reçue par le Conseiller fédéral Ignazio Cassis. Ce dernier a même joué les journalistes pour interviewer la première médaillée de la délégation suisse lors de ces joutes parisiennes. «Pourquoi avez-vous commencé le tir?» Spontanée et naturelle, elle raconte avoir suivi son père dans les stands, chaque week-end. Et le politicien de rétorquer que lui, il aurait plutôt fait dans la rébellion en allant à l'encontre de son paternel. Rires dans l'assistance.
Ce moment a surtout permis à Audrey Gogniat de mettre de mots - et quelques larmes - sur ce qu'elle vit depuis plus de 24 heures désormais: «Ce qui m'a le plus marqué? C'est de voir à quel point je suis soutenue. Je ne me rendais pas compte.» Les centaines de messages non-lus se sont accumulés sur son téléphone. «Je dois bien avouer que je n'ai pas pu tout lire», s'excuse-t-elle presque. Celui qu'elle a préféré? «Ah, mais ce sont les félicitations reçues par les gens présents à Chateauroux. De les avoir proche de moi, c'était inestimable.»
«Je vais rester la même»
Depuis 24 heures, la scène du moment précis où elle gagne la médaille de bronze a tourné en boucle sur les différentes chaînes nationales suisses. A-t-elle eu le temps de la revoir? «Oui quand même, rigole-t-elle avec sa médaille autour du cou. Ça dure une fraction de seconde, mais au moment où je sais que je serai sur le podium, j'ai envie d'exploser. Mais j'ai dû me contenir pour les deux derniers coups.»
Mais ce n'est pas ce moment précis qu'elle retient. C'est un autre, juste après. «C'est quand je vais serrer mon papa dans les bras», s'étrangle-t-elle. Avenante, drôle et naturelle, Audrey Gogniat n'a pas peur de la suite. Du moment où les caméras seront moins nombreuses à suivre chacun de ses faits et gestes. «Je vais rester la même», précise-t-elle. Mais était-ce bien nécessaire?
Loin de la fièvre olympique
Mais pour l'heure, elle apprécie cette notoriété soudaine et les nombreuses demandes médiatiques, comme en témoigne le temps accordé à chacun tantôt en allemand et tantôt en français. «J'ai du plaisir à le faire», poursuit la Jurassienne. À l'écart de la fièvre olympique durant ses compétitions, elle n'a pas seulement gagné une médaille avec sa troisième place, mais aussi le droit de passer un petit peu de temps à Paris. «C'était bien de rester dans notre bulle, remarque-t-elle. Mais c'est vrai que je suis contente de vivre ce moment.»
La soirée s'est poursuivie à la maison suisse. Dans le Jura, la fête attendra encore un peu. Mais elle aura lieu, parole de Jurassiens. Mais avant cela, Audrey Gogniat va retourner à Châteauroux pour voir des compétitions de tir avec son père. «J'espère réussir à passer tout de même au village olympique», remarque la médaillée.