Chris DiDomenico, ange et démon
«Je suis fier de ma réputation»

Il provoque autant qu'il polarise: Chris DiDomenico ne peut s'empêcher de mettre des émotions dès qu'il est sur la glace. L'enfant terrible de la ligue se livre sur son arrivée à Berne, sur ses débordements passés et sur sa vie privée guidée par la religion.
Publié: 11.09.2022 à 15:50 heures
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Dernière mise à jour: 11.09.2022 à 15:57 heures
En huit ans en Suisse, Chris DiDomenico a porté les maillots de trois clubs de National League et empoisonné la vie des fans de tous les autres.
Photo: PIUS KOLLER
Nicole Vandenbrouck

Tantôt tête brûlée, bagarreur et simulateur. Tantôt formidable joueur et leader charismatique. Aucun joueur de notre championnat ne polarise et n'échauffe autant les esprits que Chris DiDomenico. En huit saisons en Suisse (avec une brève parenthèse en NHL), «DiDo» a tout fait. Il s'est battu avec des spectateurs après un match, a échangé des noms d'oiseaux avec tous ceux qu'il a croisés et a laissé libre cours à ses émotions.

Chaque fois qu'il change de club, on demande à son coach comment diable il pourra dompter le feu follet né dans la banlieue nord de Toronto. Un faux procès, coupe l'intéressé, qui assure se contrôler beaucoup mieux que par le passé. Mais «DiDo» reste un paradoxe: sitôt les patins chaussés, le joueur carbure aux émotions, alors que l'homme de 33 ans est calme et réservé. Ce qui ne l'empêche pas d'être ouvert et honnête. Blick est allé le rencontrer.

Aimeriez-vous changer votre réputation? Ou, au contraire, en êtes- vous fier?
Bien sûr que j'en suis fier! Les gens adorent parler de moi, donc cette réputation est forcément intéressante. Mais attention: il s'agit du joueur Chris DiDomenico, pas de l'être humain.

Vous distinguez souvent les deux, comme s'il s'agissait de deux personnes différentes. Cela veut dire que dès que vous entrez sur la glace, un interrupteur s'enclenche et vous libérez vos émotions?
Ce n'est pas une question d'émotions, mais d'ambition. Déjà quand j'étais petit, je détestais perdre. Tout tourne autour d'une seule chose: gagner.

En tout cas, vous ne laissez personne indifférent: soit on vous adore, soit on vous déteste.
On peut dire ça comme ça. J'espère que mes coéquipiers m'aiment et que mes adversaires me détestent. C'est comme ça que cela devrait se passer sur la glace. Mais, en dehors, je suis une personne complètement différente de ce que la plupart des gens supposent.

Et être hué sur la glace, cela ne vous dérange pas?
Au contraire, cela me donne davantage de motivation vis-à-vis de ceux qui me remettent en question. C'est ça le sel de la vie, non? Prouver aux gens qu'ils ont tort.

Vous dites que les gens ont une fausse opinion sur votre personnalité. Pourtant, vous faites tout pour polariser, non?
De toute façon, quand vous êtes un sportif professionnel, tout le monde a une opinion sur vous. C'est le droit de chacun de se forger un avis. Mais il est vrai que, parfois, je me demande ce qui relève de l'opinion et où commence le harcèlement. Est-ce acceptable qu'un spectateur vous insulte et vous crie dessus? Dès que vous lui répondez. vous avez des problèmes. Bien évidemment, je sais que cela fait partie de notre métier d'apprendre à gérer cela, mais dans un certain sens, je ne comprends pas toujours où est la légitimité de cette différence.

Quelle est la définition parfaite de Chris DiDomenico?
Il donne tout sur la glace, travaille dur et a soif de victoire. En dehors de la glace, il est calme, garde les pieds sur terre et fait rire les autres. Il profite de la vie à fond, car on ne sait jamais ce qui peut arriver. Ne jamais rien prendre pour acquis: c'est ma devise. Je veux être chaque jour la meilleure version de moi-même.

Vous m'avez dit un jour que tout dans la vie arrive pour une raison précise. Pour quelle raison avez-vous atterri à Berne?
C'est une grande chance. Tout le monde parle toujours de Berne, c'est un club avec une histoire. Avoir l'opportunité de jouer ici, dans la capitale, met beaucoup de pression. J'aime cette pression, je m'en nourris. Les deux dernières saisons n'ont pas été très bonnes pour le SCB. Pouvoir venir ici et contribuer à redresser la barre, c'est un bond dans ma carrière et un gros objectif.

Avec Langnau puis Fribourg, vous avez toujours disputé des derbys émotionnels contre le SCB. Vous souvenez-vous d'un joueur bernois que vous provoquiez à chaque fois?
Probablement tous (rires). Pour être honnête, je ne me souviens pas de quelqu'un en particulier. Je me réjouis simplement d'être un des leurs, désormais.

«Avoir l'opportunité de jouer à Berne, dans la capitale, met beaucoup de pression. J'aime cette pression, je m'en nourris.»
Photo: Pius Koller

Vous êtes suspendu pour les deux premiers matches, à cause d'une exclusion avec Fribourg lors des derniers play-off. Ça va être dur pour vous, de regarder?
Bien sûr que c'est dur! Surtout le premier match à domicile... Ce n'est pas l'idéal, c'est certain, mais je paie les conséquences de mes actes.

A propos de payer, vous vous acquittez vous-même de vos amendes?
Oui (il sourit). La saison dernière a fait très mal à ce niveau-là. Rien que pour les play-off, je crois que j'ai dû lâcher plus de 10'000 francs.

C'est le moyen pour vous faire mal, votre porte-monnaie?
Non. Après tout, ce n'est que de l'argent... Ce qui fait le plus mal, c'est de ne pas pouvoir jouer à cause des suspensions. Ne pas pouvoir pratiquer le sport que l'on aime, ne pas pouvoir être sur la glace avec ses coéquipiers, ça ça fait vraiment mal.

Lorsque vous visionnez les matches et que vous vous revoyez en train de péter un plomb ou d'insulter un adversaire, qu'est-ce qui vous passe par la tête?

Que cela fait partie du jeu. Tout va tellement vite... C'est ma nature: en un instant, je peux péter les plombs, et l'action suivante je réussis un geste de grande classe. J'ai toujours été comme ça — même si, depuis que je suis arrivé dans cette ligue, j'ai appris à mieux me contrôler. Mais c'est vrai, je peux toujours m'améliorer dans ce registre.

Et dans la vie, qu'est-ce qui vous met en colère?
En colère? (Réfléchit.) Rien, honnêtement.

En ne considérant que le joueur Chris DiDomenico, on passe à côté d'éléments essentiels. Il suffit de l'observer sans son maillot: tout ce qui compose le personnage est dessiné sur son corps, grâce à des tatouages. Ils évoquent sa famille mais aussi la foi qui l'a guidé tout au long de sa vie. Le Canadien en parle sans détour.

Famille, religion: l'Ontarien a fait de son corps une fresque qui lui correspond.
Photo: PIUS KOLLER

La religion est omniprésente sur vos tatouages. Quelle place occupe-t-elle dans votre vie?
J'ai grandi avec la religion. Ma mère a toujours prié. Moi aussi, je prie de temps en temps quand quelque chose de bien doit arriver. Regardez: l'archange Michaël orne le haut de mon bras, et j'ai des paroles de Mère Teresa sur l'avant-bras. Là aussi (il montre son autre bras) j'ai encore des anges, la porte du ciel et des colombes de la paix.

Croyez-vous à la vie après la mort?
J'espère! Je le découvrirai un jour. Ce serait dommage que tout soit simplement fini dès que l'on ferme les yeux pour toujours.

Vous réfléchissez souvent à des choses aussi profondes?
Bien sûr! Après tout, j'ai vieilli. J'ai 33 ans, j'ai mûri et j'ai appris davantage sur la vie.

National League 24/25
Équipe
J.
DB.
PT.
1
HC Davos
HC Davos
29
31
57
2
ZSC Lions
ZSC Lions
26
31
55
3
Lausanne HC
Lausanne HC
28
2
50
4
SC Berne
SC Berne
28
18
49
5
EHC Kloten
EHC Kloten
29
-5
47
6
EV Zoug
EV Zoug
28
19
46
7
EHC Bienne
EHC Bienne
28
4
40
8
HC Ambri-Piotta
HC Ambri-Piotta
28
-11
39
9
HC Fribourg-Gottéron
HC Fribourg-Gottéron
29
-6
39
10
SCL Tigers
SCL Tigers
27
1
38
11
Genève-Servette HC
Genève-Servette HC
26
1
36
12
HC Lugano
HC Lugano
27
-22
33
13
Rapperswil-Jona Lakers
Rapperswil-Jona Lakers
29
-20
33
14
HC Ajoie
HC Ajoie
28
-43
23
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