Une image symbolise le vide que va causer la suspension de Granit Xhaka, vendredi, en quart de finale de l'Euro. Lundi face à la France, c'était lui le noyau de cette équipe face à la France. Tant dans le jeu que dans l'attitude.. Au centre du cercle formé par ses coéquipiers avant la prolongation et avant la séance de tirs aux buts, le milieu de terrain d'Arsenal a harangué les troupes.
Leader incontesté (à l'interne) et devenu incontestable au fil de la compétition n'a jamais douté de l'issue de ce huitième de finale face à la France. «Wir machen das.» Granit Xhaka en était persuadé. «Son» équipe de Suisse «allait le faire», allait faire tomber les champions du monde. Même avant le début de cet Euro, le capitaine affirmait qu’il avait pris assez d’affaires pour tenir jusqu’au 11 juillet, date de la finale à Wembley.
Lundi soir, le Bâlois a répété, encore et encore, cette litanie si tentante. Le capitaine a réuni tout le groupe suisse juste avant les prolongations. Autour de lui, les fidèles ont écouté religieusement son prêche qui a été acclamé par une seule voix. Celui d’une équipe portée par une foi aussi profonde qu’insoupçonnée, d’une équipe qui n’a eu peur de rien à Bucarest pas même du meilleur trio d’attaquants de la planète.
Un carton malheureux
Une demi-heure plus tard, le numéro 10 a motivé une dernière fois les siens au moment des tirs au but fatidiques. Un dernier jugement auquel il ne s’est pas soumis. A bout de forces, le capitaine a préféré renoncer. Ses coéquipiers n’ont pas tremblé. Ils ont effacé le traumatisme de la séance perdue face à la Pologne, cinq ans plus tôt, où Granit Xhaka avait été le seul Suisse à rater son essai.
L’équipe de Suisse devra encore faire sans son meneur peroxydé vendredi contre l’Espagne à Saint-Pétersbourg. Quelques mots de trop, après le 3-1 français, lui ont coûté un carton jaune. Une rare erreur de jugement face aux Bleus qui l’obligera à soutenir les siens depuis les tribunes du stade russe.
Une absence lourde de sens. Même si Denis Zakaria — qui devrait être aligné à sa place — est un joueur de classe mondiale, l’importance du capitaine Xhaka dépasse ses qualités footballistiques. Le joueur d’Arsenal l’a encore rappelé lundi à Bucarest.
Présent aux quatre coins du terrain, le milieu a réussi 87 passes contre la France, plus qu’aucun autre joueur. Il a surtout replacé, recadré et relancé sans cesse ses coéquipiers. Une conviction infaillible qui a protégé, comme deux mains bienveillantes, la flamme de l’espoir qui vacillait dangereusement après les trois buts tricolores.
Lorsque Kylian Mbappé a envoyé la Nati au paradis, Granit Xhaka ne s’est pas élancé à la poursuite d’un Yann Sommer extatique comme le reste de l’équipe. Non, il est allé embrasser avec une joie débordante son sélectionneur: Vladimir Petkovic.
Le duo a résisté à toutes les polémiques, à toutes les critiques. Comme le sélectionneur, qui était prêt à mourir avec ses idées et ses choix à Bucarest, le capitaine a (définitivement) prouvé sa valeur et son attachement viscéral à ce maillot. Plus personne n’aura désormais le droit d’en douter.
Granit Xhaka mériterait tellement que le «miracle de Bucarest» ne soit pas le dernier match de son Euro. Ses compagnons de fortune feront tout pour lui permettre de porter encore une fois ce brassard (presque) assorti à ses cheveux. Sie machen das.