Pierluigi Tami a de la mémoire. Le directeur des équipes nationales se rappelle bien les moqueries auxquelles a été confrontées Murat Yakin juste avant l'Euro, lorsqu'il avait décidé de pré-sélectionner 38 joueurs, comme personne d'autre, pour, au final, n'en garder que 23, comme tout le monde.
Murat Yakin, un coup d'avance
«Beaucoup de choses ont été dites... Mais Murat a eu raison. Il a pu préparer l'avenir, intégrer des jeunes, voir comment ils se comportaient avec l'équipe nationale», glisse aujourd'hui Pierluigi Tami. A quelques semaines de partir en Allemagne, Murat Yakin avait pris un risque aux yeux de l'opinion publique en sélectionnant autant de joueurs et en donnant l'illusion de ne pas savoir où aller alors que tout était maîtrisé. Comme aux échecs, le tacticien avait un coup d'avance et avait tenté de l'expliquer, mais au sortir de qualifications douloureuses, il était inaudible pour qui ne voulait pas prendre la peine de l'écouter.
«Et ce stage à Saint-Gall a été une réussite totale. On a passé de belles semaines, on a appris à connaître ces jeunes joueurs et on est montés en puissance en vue de l'Euro. Avec le recul, c'était parfait», enchaîne Pierluigi Tami, lequel ne regrette pas une seconde d'avoir continué à miser sur Murat Yakin après les interrogations légitimes de l'automne au sortir de matches médiocres contre Israël, le Kosovo et la Biélorussie.
La Suisse a en effet réussi son Euro, tant sur le plan des résultats que celui du jeu. «Et c'est encore mieux ainsi. Nous avons montré un football pro-actif, très performant techniquement, tactiquement et mentalement. Nous avons donné une bonne image du football suisse au monde», assure le Tessinois, qui a fixé un objectif à Murat Yakin: continuer sur cette lancée lors de la Ligue des Nations, qui débute jeudi à Copenhague.
Préparer 2025, la grande priorité
«Nous sommes tombés dans un groupe excitant avec l'Espagne, le Danemark et la Serbie. Je n'ai pas besoin de présenter le champion d'Europe en titre. Les Danois nous ressemblent sur le plan des résultats et du statut et la Serbie est forte techniquement et physiquement», analyse Pierluigi Tami, lequel espère que la Suisse profitera également de ces six matches de Ligue des Nations, agendés de septembre à décembre, pour préparer les qualifications pour la Coupe du monde 2026.
«Evidemment, la Coupe du monde est notre grand objectif. Nous voulons nous qualifier, il n'y a rien d'autre à dire. Nous voulons donc profiter de cette Ligue des Nations pour préparer une nouvelle équipe capable de nous emmener au Mexique, aux Etats-Unis et au Canada. Nous devons intégrer les nouveaux joueurs.» Et donc tourner la page Yann Sommer, Xherdan Shaqiri et Fabian Schär.
Une cérémonie en octobre à Saint-Gall
«Je n'étais pas surpris que quelques joueurs arrêtent. Au lendemain de l'élimination à l'Euro, je vous ai répondu que je ne savais pas qui allait continuer ou non. Mais il est logique qu'après une telle compétition, certains joueurs annoncent qu'ils ne veulent pas repartir pour un nouveau cycle. Une nouvelle histoire débute», assure Pierluigi Tami, qui indique que ces trois joueurs emblématiques seront honorés en octobre à Saint-Gall avant Suisse-Danemark.
Le maintien en Ligue A, voire mieux
Si l'idée est de préparer l'année 2025, celle des qualifications pour la Coupe du monde, la Suisse ne veut toutefois pas brader cette Ligue des Nations. Surtout pas, même! «C'est une compétition importante pour plusieurs raisons. Nous voulons rester en Ligue A et même pourquoi pas aller disputer les play-offs en mars prochain», annonce le directeur des équipes nationales. Le procédé est simple: les deux premiers seront qualifiés pour ces play-off, le troisième jouera un barrage face à une équipe de Ligue B, le quatrième sera relégué automatiquement. La Suisse peut raisonnablement viser la deuxième place, mais sait bien qu'elle n'a pas une marge suffisante sur le Danemark et la Serbie pour jouer en dilettante. Très loin de là.
«Nous devons avoir de la patience avec les jeunes qui intègrent notre équipe et en même temps, nous conservons un très haut niveau d'exigence. Nous allons au Danemark pour prendre les trois points, rien d'autre. Globalement, le niveau du football suisse est bon, nous avons de la relève. Les M21 sont en route pour la qualification à l'Euro, nous avons des raisons d'être positifs.»
Pour Noah Okafor, la porte est toujours ouverte
Un point négatif concerne Noah Okafor, écarté pour l'instant de la Nati. Murat Yakin lui en a donné les raisons, visiblement mal acceptées par le joueur de l'AC Milan. «La perception est différente de chaque côté pour l'instant. Murat a eu un long téléphone avec Noah, il lui a dit clairement et ouvertement quel était son avis en ce moment à son sujet. Il a laissé la porte ouverte. Je suis convaincu que l'on reverra Noah Okafor à l'avenir en équipe nationale.» Ce ne sera ni jeudi au Danemark, ni dimanche à Genève face à l'Espagne.