Parmi tout ce que Murat Yakin a fait de juste cet été, une mesure portera particulièrement ses fruits d'ici quelques mois: le fait d'avoir considérablement rajeuni la ligne d'attaque de l'équipe de Suisse. La transition de Haris Seferovic, Admir Mehmedi et Mario Gavranovic à Dan Ndoye, Ruben Vargas et Zeki Amdouni est désormais effectuée, avec Breel Embolo en «point médian». Murat Yakin a ouvert la porte aux jeunes, qui l'ont désormais refermée sur le nez des anciens. Seul Noah Okafor s'est pour l'heure coincé le pied dedans, mais il a le temps, et le potentiel, pour lui aussi s'installer, tandis qu'Andi Zeqiri, pas loin, a encore une carte à jouer.
Une chose est sûre: avant l'Euro, tout le monde se demandait qui allait marquer des buts pour l'équipe de Suisse et la réponse a été épatante puisque la Nati a scoré huit fois grâce à sept joueurs différents! À ce constat, il ne faut pas oublier l'inattendu Kwadwo Duah, lequel mérite peut-être d'être revu dans les prochaines semaines. En une phrase comme en dix, la Suisse a réussi sa transition offensive.
Aux autres postes, par contre, le changement de génération est encore à effectuer et plusieurs joueurs doivent désormais se poser la question de savoir s'ils repartent pour une campagne, ou non. Le prochain rassemblement pour la Ligue des Nations arrive très vite et la Suisse, tombée dans un groupe avec l'Espagne, la Serbie et le Danemark, ne peut pas avoir comme simple ambition d'obtenir le maintien. Pas après cet Euro aussi réussi.
Oui, cette Nati décomplexée peut avoir comme objectif de poser des problèmes à l'Espagne, qui sera la favorite légitime du groupe, et ne doit pas craindre une quatrième place synonyme de relégation.
Une fois ces six matches effectués, l'année 2025 sera celle de la qualification pour la Coupe du monde 2026. Grâce à ses excellents résultats à l'Euro, la Suisse devrait être tête de série, mais la tâche sera ardue: 16 équipes européennes sur 55 obtiendront leur ticket pour l'Amérique du nord. La Suisse, aujourd'hui, fait partie du top 16, c'est une certitude, mais il est tout aussi sûr qu'elle ne pourra pas se permettre la même campagne de qualifications que celle pour l'Euro si elle entend voir Guadalajara, Toronto et Kansas City à l'été 2026.
Éviter le psychodrame
La question centrale est donc la suivante: lesquels des trentenaires voudront pousser jusque-là? Et peuvent-ils sortir en beauté, en évitant le psychodrame vécu autour de Valon Behrami, surtout, de Stephan Lichtsteiner, de Johan Djourou et de Blerim Dzemaili sous Vladimir Petkovic au sortir de la Coupe du monde en Russie? L'ASF aura sans doute appris de ses erreurs et il faudra de toute façon mieux gérer la situation quel que soit le sélectionneur en place.
La première interrogation concerne le poste de gardien de but, où tout est clair, sauf dans le timing. Dès que Yann Sommer (35 ans) arrêtera, Gregor Kobel s'installera dans le but et la Suisse n'y perdra pas en qualité individuelle. Le vécu de Yann Sommer est immense et, globalement, il n'a pas déçu avec la Nati, mais son successeur est, sur le papier, au moins à la hauteur. Le gardien de l'Inter va-t-il pousser jusqu'à la fin de l'année civile et laisser la campagne nord-américaine à Gregor Kobel? Ou ira-t-il jusqu'à New York? Il apportera la réponse lui-même. Ses performances, sa personnalité et son vécu lui en donnent le droit.
Des soldats fidèles
En défense, Silvan Widmer et Ricardo Rodriguez ont 31 ans, Fabian Schär 32. Eux aussi vont peut-être se poser la question, et la réponse leur appartient. Si le défenseur central de Newcastle était resté réserviste, il aurait probablement bâché. Mais là, il est titulaire, il est bon, et Murat Yakin lui fait confiance. La logique serait que les trois continuent, mais le voudront-ils?
À mi-terrain, une retraite internationale de Granit Xhaka (31 ans) serait un choc immense et fortement improbable. Qu'en est-il de Remo Freuler (32 ans)? Lui, peut-être, pourrait être tenté de s'en aller sur cet Euro réussi.
Et puis, il y a les trois milieux offensifs de 1991, Xherdan Shaqiri, Steven Zuber et Renato Steffen. Le premier est une légende de la Nati et son cas sera scruté de près. En ce qui concerne les deux autres, peut-être ne formaliseront-ils pas leur retrait, mais que celui-ci se fera naturellement, sans vagues. Ils auront été des soldats fidèles et personne n'oubliera l'Euro magnifique de Steven Zuber en 2021.
Dernière question, celle du sélectionneur. Acceptera-t-il l'offre de prolongation de l'ASF? Il a promis qu'il n'avait pour l'heure aucun contact extérieur et que la Nati était sa priorité. Une discussion aura lieu dans les prochaines semaines, voire même les prochains jours. L'Euro réussi de l'équipe de Suisse le met dans une position de force extrêmement appréciable. A lui de voir comment il veut l'utiliser.