Peut-on tourner la page comme ça? Lorsqu'il sera en vacances, dans les prochaines heures, avec son épouse Mélanie, Manuel Akanji pourra-t-il profiter pleinement de quelques jours de repos avant de reprendre l'entraînement avec Manchester City? «C'est un cheminement intérieur», a expliqué Murat Yakin, qui a tenté de le réconforter directement après la défaite suisse dans la séance de tirs au but face à l'Angleterre samedi à Düsseldorf. Que lui a-t-il dit? «Des mots de consolation n'apportent pas grand-chose… Je l'ai remercié pour sa performance, pour la manière dont il a mené l'équipe.»
Oui, Manuel Akanji a grandi pendant cet Euro, et a définitivement pris les commandes de la défense de la Nati. Déjà avant, bien sûr, il était le patron, mais ses performances n'avaient pas toujours été à la hauteur, notamment lors des qualifications. Mais là, au cœur de cette défense à trois, il a encore franchi un palier, faisant parler son calme, mais aussi sa force physique et ses énormes qualités à la relance. Il est sans aucun doute l'un des meilleurs défenseurs centraux du tournoi, avec William Saliba et sera dans l'équipe-type de beaucoup d'observateurs.
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«Il en a tiré 200 sans en rater un seul»
Mais, bien sûr, le dernier souvenir sera ce penalty manqué, et fort mal tiré, alors même que l'exercice avait été bien préparé. Était-ce une erreur de l'avoir fait tirer en premier? La réponse, Giorgio Contini l'a donnée à l'ATS. «Non jamais de la vie. À l'entraînement, Manu en a tiré 200. Sans en rater un seul. Il annonçait même au gardien le coin où il allait tirer. Et malgré ses indications, le gardien ne pouvait rien faire. Ce qui s'est passé contre l'Angleterre rappelle une vérité: le football échappe parfois à toute logique.»
La Nati a donc perdu une nouvelle séance de tirs au but, après celle contre l'Espagne il y a trois ans et la vérité est qu'elle est sortie vaincue de cinq des six dernières qu'elle a eu à disputer. Mais il est difficile de reprocher quelque chose à Murat Yakin, lequel avait imposé à ses troupes de travailler l'exercice dans l'intimité de leur camp de base de Stuttgart et avait bien préparé cette séance. Ainsi, Xherdan Shaqiri, Zeki Amdouni et Vincent Sierro sont entrés au cours des prolongations dans l'optique de cette séance et les deux premiers ont fort bien tiré. Le Valaisan, lui, était le cinquième tireur prévu et a prouvé cette saison avec Toulouse qu'il maîtrisait bien ce geste si particulier. Et il ne faut pas croire que faire entrer trois joueurs ainsi est une évidence. Le soir d'avant, Didier Deschamps avait voulu en faire de même avec Olivier Giroud et n'avait pas réussi, son avant-centre restant finalement sur la touche, le sélectionneur français s'y étant pris trop tard.
Il a encore franchi un palier
En vérité, il n'y a rien à reprocher à Murat Yakin et à son staff, même si Manuel Akanji a fait preuve d'une fébrilité étonnante sur son envoi, lui qui, ironie cruelle, avait déjà manqué un tir au but en 2021 face à l'Espagne et avait malheureusement été à l'origine du but suédois en 8es de finale de la Coupe du monde 2018 à Saint-Pétersbourg… Peut-être pensera-t-il à tout ça en vacances, mais on ne le lui souhaite pas. Lorsqu'il tirera le bilan de son Euro, il pourra se dire en toute objectivité qu'il a encore franchi un palier. Et qu'après les larmes arrivent parfois les grandes joies, à l'image de celle de Bukayo Saka, élu homme du match.
La particularité de l'ailier anglais? Il a marqué un but splendide ce samedi et a, en plus, marqué son tir au but, lui qui avait échoué en finale face à l'Italie en 2021 et envoyé toute l'Angleterre en dépression. Visiblement, il a su s'en relever. Son secret? «Tu peux échouer une fois. Mais ensuite, c'est à toi de décider si tu y retournes ou non. Je suis le genre de gars qui a envie d'y retourner. J'ai cru en moi, je n'ai pas eu peur, je suis allé tirer. Et quand j'ai vu que le ballon était au fond, j'étais un homme heureux.» Manuel Akanji connaît la recette du bonheur, et les larmes de joie sont toujours plus belles et plus sincères lorsqu'elles succèdent à celles de tristesse.