Non, ce n'est pas un classement par points ou par statistiques, même si les résultats entrent bien sûr en ligne de compte. Ce «power ranking» est un mélange d'impression générale, de jeu offensif, de victoires et de défaites aussi, mais aussi de spectacle dans les tribunes. Il est un peu subjectif, forcément, et toutes les positions laissent la place au débat. Aucun avis définitif dans ce classement, simplement une tentative de photographie après les deux premières journées de compétition.
Allemagne
Deux belles victoires, un engouement populaire retrouvé, un jeu attractif, un meneur de jeu génial en la personne de Jamal Musiala, de l'expérience et du sens du sacrifice avec Toni Kroos et Ilkay Gündogan: cette Mannschaft fait plaisir à voir.
Le joueur-frisson: Jamal Musiala. Un génie du football, tout simplement.
Espagne
Finies les longues phases de possession stérile! L'Espagne sait toujours mieux que quiconque faire circuler le ballon, mais, désormais, ses ailiers sont des dragsters. Et Nico Williams l'un des meilleurs joueurs offensifs en ce début de compétition. Et que dire du milieu de terrain, où Rodri et même Fabian Ruiz règnent en maîtres.
Le joueur-frisson: Nico Williams. Percutant, provocateur, dribbleur.
Portugal
Un premier match poussif, mais gagné au finish, et une démonstration face à la Turquie. Le Portugal est bien entré dans son Euro et semble avoir réussi à créer un groupe pour aller jusqu'au bout. Et si même Cristiano Ronaldo devient altruiste, alors tous les rêves sont permis.
Le joueur-frisson: Vitinha, sur la lancée de sa saison à Paris. Disponible, en confiance, il est au départ de toutes les actions et constitue le lien entre les blocs. Il assure l'équilibre, une tâche essentielle.
Roumanie
Les Tricolorii sont là, que ce soit en tribunes ou sur le terrain! Un match merveilleux face à l'Ukraine (3-0), puis une rencontre spectaculaire, mais perdue 2-0 contre les Belges, leur donnent un bilan comptable équilibré. Mais ils méritent globalement une bonne appréciation, tant leur style de jeu et l'engouement autour de la sélection sont appréciables. Les Roumains sont sans doute trop limités en défense pour aller loin dans le tournoi, mais ils apportent un vent de fraîcheur bienvenu à cet Euro. Est-il étonnant de les voir aussi bien classés dans ce power ranking alors qu'ils ont perdu un match contrairement à la France, à la Suisse, à l'Angleterre et aux Pays-Bas qu'ils devancent ici? Peut-être. Mais ils le méritent au vu de ce qu'ils dégagent.
Le joueur-frisson: Andrei Ratiu fait d'énormes différences sur son côté. Il va vite, il percute, et il n'oublie pas de bien défendre. L'une des révélations de cet Euro.
France
Dépassés en tribunes, où ils sont l'une des équipes les plus faibles de l'Euro, les Bleus sont solides sur le terrain, au moins. Mais une compétition comme l'Euro étant aussi une affaire de spectacle, impossible de les classer dans le top 4 sur ces deux premiers matches. Ils ne montrent rien, mais il est tellement difficile d'aller leur marquer un but qu'ils suivent leur plan de jeu à la lettre. Sont-ils meilleurs que les Roumains? Oui. Irons-ils plus loin dans la compétition? Oui. Ont-ils fait un meilleur début d'Euro sur le plan du plaisir apporté aux spectateurs et téléspectateurs? Non.
Le joueur-frisson: N'Golo Kanté. Il est partout. Il récupère, il distribue, il oriente. Il donne même envie d'aller jouer en Arabie saoudite.
Suisse
Arrivée en Allemagne escortée d'un certain scepticisme, la Nati a balayé tous les doutes face à la Hongrie, même si la deuxième mi-temps a été moins bonne. La performance face à l'Ecosse était cependant bien moins aboutie. Les gros tests arrivent maintenant, mais le début de compétition est globalement rassurant.
Le joueur-frisson: Xherdan Shaqiri. Au moins un but lors des trois derniers Euros et des trois dernières Coupes du monde.
Turquie
Un premier match formidable, tant en tribunes que sur le terrain. La sélection de Vincenzo Montella, auteur de choix curieux lors de sa deuxième composition d'équipe, a sombré face au Portugal, mais elle reste l'une des équipes-frissons de ce début d'Euro. Elle jouera sa qualification face à la Tchéquie.
Le joueur-frisson: Arda Güler, auteur d'un but splendide face à la Géorgie. Le joyau du Real Madrid a débuté sur le banc contre le Portugal, ce qui a surpris tout le monde.
Angleterre
Quatre points après deux matches, certes, mais quelle agonie que ce match nul face au Danemark... Et même la victoire face à la Serbie n'a pas été belle à voir, tant la sélection de Dragan Stojkovic aurait mérité de prendre un point en deuxième mi-temps. Au vu de la qualité de ses joueurs, les Three Lions sous-performent terriblement pour l'instant. Mais ils ont quatre points...
Le joueur-frisson: Jude Bellingham pour sa première demi-heure face à la Serbie, mais c'est tout. Il n'a pas été bon contre le Danemark.
Pays-Bas
Un nul horrible à regarder contre la France, une victoire logique face à la Pologne: les Pays-Bas n'ont pas encore montré grand-chose dans cet Euro. Le terrain est moins convaincant que les tribunes pour l'instant, où la marée orange fait la loi dans toute l'Allemagne. Au rayon des supporters, seules la Turquie, la Roumanie et l'Ecosse peuvent regarder les Néerlandais droit dans les yeux.
Le joueur-frisson: Nathan Aké a été bon tant face à la France que contre les Polonais. Il a pris une dimension supplémentaire depuis quelques mois.
Autriche
Fidèle à ce qu'on attendait d'elle: bien organisée mais trop limitée pour prendre un point face aux Français, dominatrice et victorieuse contre la Pologne. Ce sera dur contre les Pays-Bas, mais jouable. Ralf Rangnick est un génie du football et cela se voit sur le terrain, où l'Autriche dégage une vraie identité et un vrai style.
Le joueur-frisson: Christoph Baumgartner pour sa deuxième période face à la Pologne.
Belgique
Aussi loin de la Roumanie dans ce power-ranking alors qu'elle vient de battre la sélection d'Edi Iordanescu en la dominant et en comptant le même nombre de points qu'elle? Oui. La Belgique est certes revenue dans la course à la qualification samedi soir, mais elle peut faire mieux. Elle doit faire mieux, même.
Le joueur-frisson: Kevin De Bruyne, bien sûr. Même s'il a manqué des occasions et n'a pas été toujours brillant dans le dernier geste, le génie belge trouve des angles de passe que lui seul peut imaginer.
Slovénie
Deux matches nuls pour autant de bonnes prestations, mais le drame slovène est de jouer contre l'Angleterre lors du troisième match et que celle-ci a besoin de la victoire. Les Slovènes pourraient ainsi se retrouver éliminés, alors même qu'ils sont l'une des bonnes surprises de ce début de compétition.
Le joueur-frisson: Jan Oblak était attendu et il ne déçoit pas. Si la Slovénie veut espérer quelque chose dans ce tournoi, elle aura encore besoin d'un grand gardien lors du troisième match.
Slovaquie
Deux entames de match formidables, puis une sérieuse baisse de régime à chaque fois. La Slovaquie a trois points après deux journées et jouera sa qualification contre la Roumanie lors de la dernière rencontre. Dommage de ne pas avoir tenu le rythme: ils seraient déjà qualifiés.
Le joueur-frisson: Lukas Haraslin. L'ailier s'est montré très convaincant tant face à la Belgique que contre l'Ukraine. Une sacrée patte et une belle vision du jeu.
Danemark
Une déception pour l'heure, au vu de leur dernier Euro (demi-finale) et de leur potentiel. Cette sélection peut mieux faire qu'un nul face à la Slovénie et à l'Angleterre.
Le joueur-frisson: Morten Hjulmand, pour son but exceptionnel contre l'Angleterre et pour son sens du collectif.
Italie
L'Italie est-elle encore un grand pays de football? Sur ces deux premières journées, la question mérite d'être posée: une victoire arrachée face à l'Albanie et une prestation incroyable de faiblesse face à l'Espagne. Il faudra être bien meilleurs face aux Croates.
Le joueur-frisson: Gianluigi Donnarumma, sans lequel l'Espagne aurait gagné 4 ou 5-0 lors de la deuxième rencontre.
Albanie
Une équipe qui a du cœur et qui l'a prouvé en arrachant un point contre les Croates, mais elle aurait pu (dû?) faire mieux contre l'Italie. Aller chercher la qualification face aux Espagnols serait l'un des plus grands exploits de l'histoire du football albanais. Peut-être même le plus grand, même si la Roja est déjà assurée de terminer première de son groupe.
Le joueur-frisson: Armando Broja a rappelé à tout le monde face à l'Italie qu'il était un bon avant-centre, si certains en doutaient encore.
Ukraine
Les 120 premières minutes de la Zbirna sur sol allemand ont fait craindre le pire. Mais la sélection de Sergeï Rebrov a su faire preuve du caractère nécessaire et ce qu'elle a montré face à la Slovaquie, montant en puissance au fil du match, laisse entrevoir son potentiel et ses indiscutables qualités techniques.
Le joueur-frisson: Mykola Shaparenko, un but et une passe décisive contre la Slovaquie. Et une jolie petite technique soyeuse.
Géorgie
Quel caractère, quelle équipe! Les Géorgiens sont passés tout près de prendre un point à la Turquie dans le plus beau match depuis le début de la compétition et ont accroché la Tchéquie. L'exploit face au Portugal semble impossible, mais qui sait, avec ce cœur et cette ferveur populaire? Ils mériteraient mieux que cette 18e place dans ce power ranking, tant ils sont enthousiasmants, mais la réalité du terrain est qu'ils ne comptent qu'un point. Mal payés.
Le joueur-frisson: Giorgi Mamardashvili, énorme face à la Tchéquie et déjà très fort contre les Turcs.
Croatie
Cette vieillissante génération croate peut encore s'inventer un avenir à (très) court terme en battant l'Italie. Mais ce qu'elle présente pour l'heure ressemble surtout à un long crépuscule. La dernière ronde des éléphants est cependant encore jouable. Surtout face à cette Italie-là…
Le joueur-frisson: Mateo Kovacic est le seul parmi les cadres à avoir évolué à son meilleur niveau lors de ce début d'Euro.
Ecosse
Une défaite 5-1 pour débuter face à l'Allemagne, puis une belle réaction contre la Suisse. Et quel soutien populaire! L'Ecosse joue avec le cœur et peut se qualifier pour les 8es en battant la Hongrie. Ses supporters le mériteraient, en tout cas.
Le joueur-frisson: Scott McTominay pour sa discipline et son sens du sacrifice face à Granit Xhaka.
Tchéquie
Un point sauvé face à la Géorgie, une défaite tardive mais logique contre le Portugal: la Tchéquie n'est pas honteuse, mais ses supporters espéraient tout de même mieux d'elle. Ce sera quitte ou double face à la Turquie.
Le joueur-frisson: Lukas Provod est en train de réussir son Euro. Un joli but contre le Portugal et une prestation correcte contre la Géorgie.
Hongrie
Les Magyars pouvaient être l'une des surprises potentielles de l'Euro. Ils peuvent toujours l'être, d'ailleurs, même en ayant perdu leurs deux premiers matches, mais il faudra être bien meilleurs face à l'Ecosse que face à la Suisse et l'Allemagne.
Le joueur-frisson: Il n'y a pas grand monde à sauver pour l'instant. Barnabas Varga pour son but face à la Suisse peut-être. Et encore…
Serbie
Individuellement, les Serbes font partie de l'élite élargie du football européen au même titre que la Suisse. Mais ils sont toujours autant incapables de confirmer ce potentiel. Leur expression collective est d'une tristesse affligeante.
Le joueur-frisson: Personne ne mérite une telle distinction. Allez, le gardien Predrag Rajkovic, pour en trouver un.
Pologne
Personne n'attendait rien des Polonais et, du coup, personne ne peut être déçu. Cette sélection sous-performe toujours autant que cela en devient gentiment tragique. La seule nation officiellement éliminée après deux journées.
Le joueur-frisson: Jakub Kiwior. Lui au moins a réussi son Euro et s'est fait une bonne publicité. Ce n'est de loin pas le cas de tous ses coéquipiers.