L'image était belle. Denis Zakaria et Kevin Mbabu posaient tout sourire avec le drapeau genevois, quelques minutes après la victoire épique contre la France à l'Euro. Cette équipe de Suisse, qui a fait vibrer tout le pays durant l'été, avec des reflets grenat grâce à trois représentant de la République (il faut encore ajouter le défenseur Becir Omeragic). Des enfants de la Cité de Calvin qui partagent un autre point commun: ils ont tous les trois éclos au meilleur niveau loin de l'arc lémanique.
Leverkusen, leader européen
Cette semaine, le Centre international d'étude du sport, basé à Neuchâtel, a publié une étude sur l'utilisation des joueurs de moins de 21 ans en Europe. Dans les cinq meilleurs championnats du continent, le Bayer Leverkusen et le Barça sont les deux meilleurs élèves, tandis que la Ligue 1 place plusieurs représentants dans le haut du classement.
Qu'en est-il en Suisse? Lanterne rouge de Super League, le Lausanne-Sport fait figure de référence avec la plus faible moyenne d'âge (23,44 ans) et un rôle important pour les joueurs n'ayant pas encore soufflé leur 21e bougie (36,1% du temps de jeu total de l'équipe).
Un «jeunisme» qui s'explique par la structure d'INEOS qui relie le LS à l'OGC Nice. Plusieurs talents arrivent chaque été sur les bords du Léman pour y parfaire leur formation. «Leur but est mettre en valeur ces jeunes talents pour leur permettre de murir, de se faire ensuite une place en France ou d'être transféré vers un autre club, explique Raffaele Poli, directeur de l'Observatoire du football au CIES et co-auteur de l'étude. Pour revendre un joueur et faire une plus-value, il faut qu'il puisse jouer un maximum.»
Deux minots genevois
Tout en bas du classement, Servette est à la traîne dans l'intégration de leurs espoirs en première équipe. Le contingent grenat est l'un des plus vieux du championnat suisse (28,08 ans de moyenne d'âge) et les joueurs de moins de 21 ans jouent très peu (1,1% du temps de jeu globale). Un comble pour le SFC dont le stade est situé à la Route des Jeunes.
Seuls Nicolas Vouilloz (20 ans) et Roggerio Nyakossi (17 ans) ont foulé la pelouse en Super League. À eux deux, ces Genevois formés au SFC cumulent quatre apparitions pour 75 minutes en sept rencontres. Alexis Antunes, qui a pris du galon cette saison, a fêté ses 21 ans quelques jours après la reprise.
«No comment» au SFC
À Servette, personne n'est disponible pour commenter ces chiffres, le directeur sportif Philippe Senderos y compris. Ce dernier évoquait le sujet dans les colonnes de Blick cet été. «La formation prend du temps. Nous cherchons à avoir une cohérence entre notre discours et nos décisions, notamment dans le recrutement. Nous construisons pour l’avenir avec un vivier de talents très intéressant.»
Des arguments qui ne convainquent pas Raffaele Poli. «Je me base sur les faits et des tendances claires s'en dégagent. Servette ne construit pas une politique basée sur la jeunesse. Au contraire, le club mise sur des joueurs expérimentés et étrangers, notamment français. Les chiffres étaient déjà similaires la saison dernière.»
En Suisse, seul Lugano fait moins bien en terme de moyenne d'âge (28,31 ans). Avec l'arrivée des propriétaires américains et la collaboration avec Chicago, la donne pourrait changer au Tessin pour se rapprocher du modèle lausannois.