Il s'était lui-même rendu coupable de dopage. Et aujourd'hui? Bien des années après ses aveux, Rolf Järmann (58 ans) se dit surpris par les actuelles rumeurs de dopage qui entourent les performances quasi surhumaines de Tadej Pogacar, vainqueur du dernier Tour de France. «Ce n'est pas parce qu'il a gravi la montagne plus vite que Marco Pantani il y a 26 ans qu'il a fait quelque chose d'interdit», s'indigne l'ex-professionnel.
Marco Pantani (décédé en 2004) a été le dernier cycliste à réaliser le doublé Giro-Tour de France lors d'une même année – c'était en 1998. Un exploit que Pogacar a fini par réitérer dimanche dernier. «Bien sûr, Pantani était sans doute dopé à l'époque. Mais il a couru dans des conditions qui ne devraient en aucun cas être comparées à celles d'aujourd'hui», explique Rolf Järmann.
Le cyclisme a atteint de nouvelles dimensions
Pour le Thurgovien, il est clair que le cyclisme s'est profondément transformé et professionnalisé au cours des dernières décennies. «Méthodologie d'entraînement, alimentation, équipement... Tout a pris de nouvelles dimensions.» L'ex-cycliste se dit particulièrement agacé par la comparaison du nombre de watts par kilogramme de poids corporel – une valeur de 6,98 aurait été atteinte par Pogacar lors de la montée du plateau de la Beille, comptant pour la 15e étape du Tour.
Une performance que Rolf Järmann relativise: «Peut-être qu'Eddy Merckx a donné des coups de pied similaires il y a 50 ans. Nous ne le savons pas, car rien n'a été mesuré à l'époque. Et Merckx roulait sur des routes bien plus mauvaises avec un vélo bien plus mauvais. Il avait un maillot en coton qui pesait deux kilos.» A cela s'ajoutent, selon lui, le déroulement de la course et les conditions météorologiques, qui sont d'autres aspects à prendre en compte. «Alors pourquoi Pogacar ne serait-il pas clean?», demande-t-il.
«Aujourd'hui, il arrive aussi que quelqu'un craque»
Rolf Järmann est convaincu que le cyclisme actuel est plus propre qu'il ne l'était son époque – entre 1987 et 1999 - ou à celle de Lance Armstrong. «Aujourd'hui, une superstar s'effondre parfois parce qu'elle est dans un mauvais jour. A l'époque, avec Indurain, Ullrich et Armstrong, cela n'existait pas. Pour moi, c'est un signe clair que l'on se dope moins.»
Et les Jeux olympiques? Järmann se souvient avec plaisir de l'édition 1996 à Atlanta (Etats-Unis), lorsque son coéquipier Pascal Richard avait remporté l'or. «Même si mes mains étaient alors liées par son attaque et que je n'ai pas pu montrer ma bonne forme.» Une chose est sûre: il ne croit pas à la réduction du peloton à 90 coureurs lors de la course en ligne masculine qui se tiendra 3 août. «Cela pourrait casser la course.»