«Je me sens déjà comme le troisième Suisse de NBA.» Au bout du fil, Kyshawn George n'attend pas le premier match officiel de sa carrière pour et accepte volontiers d'être listé en compagnie des pionniers Thabo Seofolosha et Clint Capela parmi les joueurs à croix blanche évoluant dans la prestigieuse ligue. Cela ne veut pas dire pour autant que le joueur drafté en juin dernier se sent arrivé quelque part. «Ce serait une erreur et je ne vais pas la commettre, précise-t-il. Lorque tu arrives dans une franchise de NBA, tu sens très vite que tu vas devoir bosser dur.»
Cela tombe bien, il y est préparé. «En arrivant ici, je ne m'attendais à pas grand-chose, poursuit le Chablaisien. Je sais juste que je dois bosser et contrôle ce que je peux. Le reste? Je ne dois pas perdre d'énergie sur ce qui est hors de mon pouvoir. Ici, c'est finalement très simple: tu dois toujours prouver que tu es à ta place. Il faut garder cette faim en permanence. Mais je le fais plus pour moi que pour le coaching staff. Je veux me prouver que je suis à ma place.»
Depuis que les Washington Wizards ont décidé de s'attacher les droits du jeune Romand, sa vie a changé. «Débarquer en NBA, ce sont énormément de nouvelles choses à apprendre et d'expériences à vivre. Entre la Summer League (ndlr compétition d'été axée sur le développement de jeunes) et les différents camps d'entraînement, j'ai déjà beaucoup appris.» Après le tournoi disputé à Las Vegas, Kyshawn George a tout de même pris le temps de revenir brièvement en Suisse. «Cela m'a fait du bien.»
«Beaucoup de temps à la salle»
Mais cette nouvelle vie à cent à l'heure ne lui a laissé que bien peu de répit. Aujourd'hui, il a trouvé un appartement à une quinzaine de minutes de la Capital One Arena, la salle de plus de 20'000 places où évolue son équipe. «Pour le moment, je passe beaucoup de temps à la salle d'entraînement, poursuit-il. Mais j'ai également des meetings avec des membres du staff qui seront chargés de me suivre personnellement.»
À Washington, on ne rigole pas avec la relève. Après plusieurs années compliquées, les Wizards sont en pleine reconstruction. Est-ce à dire que les ambitions sont différentes qu'ailleurs? «Je ne le vois pas ainsi, coupe Kyshawn George. Toutes les organisations ont le même but: jouer pour le titre. Mais toutes ne sont pas au même stade du processus.»
Ce processus, justement, a été lancé en juin dernier lors de la draft puisque, outre le Chablaisien, Washington a drafté le Français Alex Sarr (2e choix) et l'Américain Bub Carrington (14e choix). George, lui, a été sélectionné plus tard, en 24e position. Une hiérarchie entre les trois rookies existe forcément dans un monde où le rang du repêchage octroie un salaire prédéfini. «Mais l'entraîneur va toujours faire jouer celui qui mérite d'être sur le terrain, apprécie-t-il. C'est finalement le grand avantage de me retrouver dans une équipe comme celle-ci qui mettra en avant ses jeunes. Le staff met beaucoup l'accent sur les habitudes. Celles qui vont nous suivre tout au long de la progression de l'équipe.»
Les conseils de Thabo Sefolosha
Durant la préparation, il a eu l'opportunité de jouer au Madison Square Garden que les New-Yorkais désignent comme la salle la plus célèbre du monde. Ce n'était certes pas un match officiel, mais le Romand n'a pas été plus impressionné que cela. «C'était vraiment incroyable, constate-t-il. Mais au final, que ce soit Boston, Detroit ou à domicile, il faut préparer et jouer le match de la même manière.»
Durant le camp d'entraînement, Kyshawn George a eu droit à une visite particulière, celle de Thabo Sefolosha. Le premier Suisse en NBA a tenu à lui donner quelques conseils. «C'était lià à la défense et sur plein de petits détails qui peuvent faire la différence, apprcie-t-il Quand un ancien joueur avec une telle longévité veut t'aider, c'est important d'écouter. Je suis toujours parti du principe que je pouvais apprendre de tout le monde. Alors forcément, avec lui c'est encore plus vrai.»
Grands débuts à Boston
Il a également eu des contacts avec le second Suisse encore actif en NBA, Clint Capela. «Mais j'essaie également de tracer mon propre chemin, précise-t-il. Mais comme pour Thabo, je suis impressionné lorsque je vois qu'il joue dans cette Ligue depuis plus de dix ans. La carrière moyenne dure entre trois et quatre ans. Cela prouve à quel point ils ont travaillé pour réussir.
Vendredi, Kyshawn George va, lui, commencer officiellement sa carrière. «L'important, désormais, sera de trouver mon rôle dans cette équipe tout en étant capable de m'exprimer, analyse-t-il. Il faut bien jouer pour l'équipe, mais également être conscient d'avoir mon propre style de jeu et de parvenir à l'inclure dans un système.» Il paraît toutefois serein face à ce challenge. «Le point qui pourrait être le plus compliqué, c'est de savoir manager une saison de 82 matches en quelques mois, admet-il. Je vais devoir trouver une routine pour que cela se passe bien.»
Mais avant de penser à cela, il va déjà avoir les Boston Celtics dans la tête où Washington entamera sa saison dans la nuit de jeudi à vendredi. Quoi de mieux qu'un match dans une salle mythique face au champion en titre pour lancer sa carrière? «C'est sûr que c'est un rêve qui devient réalité.» Rêve auquel il a déjà eu droit à un avant-goût depuis quelques semaines.