«Elle connaissait chaque virage ici»
Les parents de Muriel Furrer s'expriment pour la première fois

Les parents de la jeune cycliste Muriel Furrer, décédée après une chute aux Mondiaux de Zurich, s'expriment pour la première fois sur la perte tragique de leur fille. Ils demandent l'amélioration des systèmes de tracking lors des courses.
Publié: 21.12.2024 à 16:01 heures
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Une cérémonie funéraire publique a eu lieu le 8 novembre à Uster (ZH) pour dire adieu à Muriel Furrer.
Photo: keystone-sda.ch
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Matthias Dubach

Le décès toujours aussi difficile à comprendre de la cycliste Muriel Furrer lors des championnats du monde de Zurich continue d’émouvoir le monde du sport. The Athletic, la plateforme sportive internationale du «New York Times», consacre un grand reportage à la Zurichoise tragiquement décédée à l’âge de 18 ans.

Un reporter anglais s’est rendu en Suisse pendant quelques jours en novembre. Pour la première fois, les parents de Muriel Furrer ont brisé le silence. Christine et Reto Furrer ont même ouvert la porte de leur maison à Egg (ZH) et ont montré la chambre d’enfant de leur fille cadette, Muriel. Au mur, on lit clairement l’inscription «2032 Brisbane Olympics». Les Jeux olympiques australiens étaient un objectif à long terme, un rêve pour la jeune femme.

Douleur immense

Mais les Furrer doivent désormais surmonter l’inconcevable. Reto, le père, explique qu’il est d’autant plus difficile d’accepter ce drame car il s’est produit tout près de chez eux. «Elle connaissait chaque mètre et chaque virage ici», assure-t-il à propos de la descente fatale vers Küsnacht (ZH), où la cycliste a chuté dans un virage à gauche dans des conditions humides. Elle n’a été retrouvée qu’environ 90 minutes plus tard avec de graves blessures à la tête. Elle est décédée le lendemain à l’hôpital.

Muriel Furrer a dévalé cette route étroite un nombre incalculable de fois pour se rendre sur son terrain d’entraînement favori. Christine, la mère, ajoute: «C’est donc tout simplement incroyable que cela se soit passé ainsi.»

L’immense douleur des parents ne peut être qu’imaginée. Ce qu’ils ont dû endurer à l’hôpital reste douloureux à exprimer. La mère raconte qu’ils ont dû se préparer au pire, car l’opération urgente menée le jour du drame n’avait rien donné. Mais Muriel a continué à se battre jusqu’au lendemain après-midi, contrairement aux pronostics des médecins.

Christine et Reto Furrer souhaitent vivement qu’à l’avenir au moins, les parents d’athlètes n’aient plus jamais à endurer les mêmes souffrances. «J’espère vraiment que des changements interviendront», déclare le père. «Certes, ils ne pourront plus faire revenir Muriel. Mais nous devons faire en sorte que cela ne puisse plus se produire.»

1h30 d’angoisse

Les Furrer demandent que des systèmes de suivi valables soient utilisés à l’avenir. Selon eux, il est difficile de comprendre qu’il ne soit pas possible de tracer les coureurs lors d’une course de championnat du monde, alors que les parents pouvaient voir à tout moment où se trouvait leur fille grâce à une technologie sur le vélo lorsqu’elle s’entraînait seule.

«Pour moi, cela a pris trop de temps pour la retrouver. Trente minutes après la chute, j’étais déjà sûr qu’il s’était passé quelque chose de grave. Quand on a un tracker, il faut l’utiliser. Elle en avait un pendant la course. Pas le meilleur, mais elle en avait un», souligne Reto. Mais cette technologie de course n’a été utilisée que pour les informations télévisées, et non pas pour permettre à la direction de course ou aux fédérations nationales de contrôler en permanence où se trouvaient les jeunes coureuses.

Après le départ de la course à Uster, les parents s’étaient rendus à Zurich et s’étaient positionnés sur la spectaculaire montée de la Zürichbergstrasse. «Mais Muriel n’est pas passée», explique la mère. Comme Muriel a également participé à de nombreuses courses de VTT, le père ajoute: «En VTT, il arrive qu’il y ait une chute ou une crevaison, mais dans une course sur route, ce n’est pas courant. J’étais donc un peu nerveux.»

Le père raconte qu’il a appelé Kathrin Stirnemann, l’entraîneuse des femmes de moins de 19 ans, qui accompagnait la course dans la voiture de Swiss Cycling. La fédération suisse a aussi gardé le silence jusqu’à présent sur le drame. Mais Kathrin Stirnemann s’est exprimée auprès de The Athletic: «Quand le père de Muriel m’a appelé, je lui ai dit: nous sommes en train de la chercher. Nous avons téléphoné partout et sollicité la zone de ravitaillement et notre médecin à l’arrivée. À un moment donné, la course était terminée et nous ne savions toujours pas où était Muriel.»

Les parents étaient alors arrivés dans l’aire d’arrivée, mais il n’y avait toujours aucune information de la part de Swiss Cycling. «Nous avons attendu et attendu encore. Lorsque tous les membres de l’équipe ont franchi la ligne d’arrivée, tout le monde a eu très peur», raconte Christine Furrer.

Vivre avec le vide

La chute s’est produite aux alentours de 11 heures. A 12h36, Reto, le père, a même tenté d’appeler Muriel sur son portable. En vain. Ce n’est qu’après qu’un officiel de l’UCI a transmis l’information selon laquelle le tracker de Muriel Furrer avait été localisé dans la forêt au-dessus de Küsnacht. C’est alors qu’a commencé le sauvetage, mais il était déjà bien trop tard.

Dans le garage de la maison familiale, à côté de divers vélos encore en état de marche, se trouve également le panneau d’affichage de sa dernière course. Il s’agit du panneau sur lequel toutes les coureuses se sont inscrites avant le départ de la course. Les organisateurs ont remis l’affiche à la famille.

Mais ce sont aussi les choses invisibles qui font mal, surtout en cette période de l’Avent. «Elle aimait beaucoup faire des gaufres, des muffins et des biscuits. Ensuite, la maison sentait toujours merveilleusement bon. C’est quelque chose qui me manque», soupire Christine Furrer.

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