Le commentaire de Richard Werly
Qui protège les dissidents chinois harcelés à Genève à l'ONU?

Publiée par le consortium de journalistes (ICJ) et par Tamedia en Suisse, l'enquête «China Targets» recense les pressions de Pékin sur les dissidents chinois qui osent témoigner à l'ONU à Genève. Une vérité dérangeante pour notre journaliste Richard Werly.
Publié: 16:22 heures
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Régulièrement, les Tibétains viennent avec courage plaider leur cause sur la place des Nations à Genève.
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Richard WerlyJournaliste Blick

La République populaire de Chine est dirigée par un régime communiste impitoyable avec ses opposants. Cette simple vérité ne doit jamais être oubliée lorsqu’il s’agit de négocier avec la seconde puissance économique mondiale, devenue ces temps-ci l’opposante n° 1 aux Etats-Unis de Donald Trump. Et cette vérité a un prix, que le consortium international de journalistes (ICJ) et les publications de Tamedia en Suisse, mettent à nu dans leur enquête fouillée: «China Targets», qui décortique le ciblage et le harcèlement systématique des opposants à Pékin dans les instances internationales.

Ecrire cette vérité, confirmée sur le terrain par cette enquête, ne signifie pas qu’il faut boycotter la Chine, cette puissance de plus d’un milliard d’habitants dont le poids et l’influence sont considérables. Notre obligation, et celle des autorités qui abritent les institutions multilatérales infiltrées par les espions chinois, est de faire en sorte que les enceintes de l’ONU, et particulièrement celles dévolues aux droits de l’homme, ne soient pas foulées aux pieds par les dictatures.

Le prix de la puissance

Cela vaut pour la Chine, d’autant plus que celle-ci s’affirme comme une grande puissance «responsable». Mais aussi pour les autres régimes autoritaires mis en cause dans ces instances, en particulier lors des sessions du Conseil des droits de l’homme à Genève. La Suisse, gardienne du Palais des Nations, et le Canton de Genève, n’ont pas pour mission de traquer les agents chinois, sauf s’ils constituent un danger pour la sécurité de la Confédération. Notre devoir de pays hôte et de capitale onusienne est en revanche de protéger ceux qui osent parler et ceux qui, parfois au risque de leur vie, viennent témoigner sur les bords du Léman.

Une autre responsabilité, qui échoit en partie au pays hôte, est de distinguer entre les organisations non gouvernementales légitimes, et celles qui ont pour seul but de faire un travail d’obstruction et de harcèlement au service d’Etats sans scrupule. Il en va de la réputation de la Genève internationale, mais aussi du respect de la neutralité helvétique. Il en va, surtout, de notre crédibilité comme pays défenseur, sur son territoire, de la liberté d’expression.

Médias sous contrôle

La Chine n’est pas un pays comme les autres. Ses moyens financiers et sa volonté de s’imposer sur la scène internationale, mais aussi sa maîtrise des outils de surveillance technologiques les plus sophistiqués, lui donnent une capacité presque unique de répression. Il faut donc avoir cela en tête à tous les instants. Pas pour nier le droit souverain du gouvernement chinois à défendre ses positions dans tous les domaines. Mais pour éviter que l’ONU, et la Genève internationale se transforment en piège pour les défenseurs des libertés, dans l’indifférence quasi-générale.

Les médias ont, en la matière, une responsabilité particulière. En Chine, ils sont contrôlés, verrouillés, écrasés, asservis. Notre rôle est donc de parler des négociations entre Pékin et Washington, ou des offres commerciales chinoises faites à l’Europe, sans oublier la persécution des Tibétains, la répression des Ouïgours, les condamnations à répétition à Hong Kong, ou la volonté affichée de Pékin de reprendre Taïwan.

Le monde de 2025 a besoin de la Chine. Mais ceux qui osent encore, face au rouleau compresseur la Chine communiste, défendre les libertés et leur simple droit à exister, ont cruellement besoin de nous.

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